La réponse que la cour de cassation apporte à la question de l’inopposabilité du mail en matière de saisie immobilière semble aux antipodes de ce que prévoit le code des procédures civiles d’exécution. On fait le point.
L’inopposabilité du bail selon le code des procédures civiles d’exécution
L’article L. 321-4 du code des procédures civiles d’exécution dispose que « Les baux consentis par le débiteur après l’acte de saisie sont, quelle que soit leur durée, inopposables au créancier poursuivant comme à l’acquéreur.
La preuve de l’antériorité du bail peut être faite par tout moyen. »
Il faudrait donc considérer qu’en matière de saisie immobilière, le bail conclu antérieurement à la signification du commandement de payer valant saisie est opposable à l’adjudicataire, tandis que le bail postérieur à cette signification est inopposable au motif qu’il a été conclu en violation de la règle de droit relative à l’indisponibilité du bien.
L’opposabilité du bail selon la cour de cassation
La cour de cassation apporte toutefois un tempérament extrêmement à cette règle, en considérant que « la délivrance d’un commandement valant saisie immobilière n’interdit pas la conclusion d’un bail ou la reconduction tacite d’un bail antérieurement conclu, et que le bail, même conclu après la publication d’un tel commandement est opposable à l’adjudicataire qui en a eu connaissance avant l’adjudication » (Cass. civ., 2e, 27 févr. 2020, n° 18-19.174, publié au Bulletin).
La cour de cassation réitère par cette position une jurisprudence constante dont elle précise les motifs (Civ. 3e, 15 janvier 1976, n° 74-13.676 ; Civ. 3e, 11 février 2004, n° 02-12.762 ; Civ. 3e, 23 mars 2011, n° 10-10.804, Civ. 3e, 9 juin 2016, n° 15-10.595).
Elle contredit frontalement l’article 4 des dispositions générales du cahier des conditions de vente en matière de saisie, qui précise à son deuxième alinéa que « les baux consentis par le débiteur après la délivrance du commandement de payer valant saisie sont inopposables au créancier poursuivant comme à l’acquéreur ».
L’expulsion du locataire
L’adjudicataire qui souhaite expulser le locataire dont le contrat de bail a été conclu postérieurement à la signification du commandement devra ainsi prouver qu’il n’avait pas connaissance de l’existence de ce contrat de bail.
Si, en revanche, le bail est inopposable à l’adjudicataire, alors celui-ci peut se prévaloir des dispositions des articles L. 322-13 et R. 322-64 du code des procédures civiles d’exécution.
L’article L. 322-13 dispose que « Le jugement d’adjudication constitue un titre d’expulsion à l’encontre du saisi. »
L’article R. 322-64, quant à lui, dispose que « Sauf si le cahier des conditions de vente prévoit le maintien dans les lieux du débiteur saisi, l’adjudicataire peut mettre à exécution le titre d’expulsion dont il dispose à l’encontre du saisi et de tout occupant de son chef n’ayant aucun droit qui lui soit opposable à compter du versement du prix ou de sa consignation et du paiement des frais taxés. »