La saisie des récoltes sur pieds constitue une forme particulière de saisie mobilière qui demeure peu utilisée dans la pratique. Cette procédure exige le respect de formalités spécifiques pour garantir sa validité. Décortiquons ensemble les étapes clés du procès-verbal, sa signification et la gestion des biens saisis.
Le procès-verbal de saisie
Mentions obligatoires et description spécifique
L’article R. 221-58 du Code des procédures civiles d’exécution renvoie aux dispositions de l’article R. 221-16, à l’exception du 2° relatif à la désignation détaillée des biens. En effet, s’agissant de récoltes, le procès-verbal doit plutôt comporter :
- La description du terrain où sont situées les récoltes
- La contenance et la situation géographique précise de ce terrain
- L’indication de la nature des fruits
Cette description doit permettre d’identifier sans ambiguïté le lieu exact de la récolte, notamment par ses références cadastrales, et la nature des cultures saisies. L’huissier devra parfois obtenir des précisions du débiteur quant à l’espèce exacte des céréales, fruits ou bois concernés.
La prise de photographies par l’huissier est recommandée pour justifier l’état de maturité des fruits lors de la saisie, conformément à l’article R. 221-12 du Code des procédures civiles d’exécution.
Transport sur les lieux de la récolte
L’huissier doit se rendre physiquement sur les lieux où croît la récolte, et non au domicile du débiteur. Cette règle, bien qu’absente de l’ancien Code de procédure civile, était déjà observée avant 1806. Le jurisconsulte Pothier écrivait dans son traité de procédure civile que le « sergent qui fait cette saisie doit, pour cet effet, se transporter sur l’héritage où les fruits sont pendants ».
Signification du procès-verbal
Modalités selon la présence du débiteur
Si le débiteur est présent lors de la saisie, l’huissier lui remet sur place une copie du procès-verbal, ce qui vaut signification selon l’article R. 221-17, alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution.
En revanche, si le débiteur est absent, une copie du procès-verbal doit lui être signifiée ultérieurement. L’acte lui impartit alors un délai de 8 jours pour informer l’huissier d’une éventuelle saisie antérieure et lui communiquer le procès-verbal correspondant, conformément à l’article R. 221-18 du même code.
Informations à communiquer au saisi
Avant la remise du procès-verbal, l’huissier doit rappeler verbalement au débiteur présent :
- Que les biens saisis sont indisponibles
- Qu’il s’expose à des sanctions pénales en cas de détournement
- Qu’il a la faculté de procéder à une vente amiable dans les conditions prévues aux articles R. 221-30 à R. 221-32
L’huissier doit également renouveler oralement la demande de paiement et informer le saisi qu’il est tenu de faire connaître les biens qui auraient fait l’objet d’une saisie antérieure.
Désignation du gardien ou gérant
La gestion des récoltes saisies présente des particularités liées à la nature vivante et évolutive des fruits.
Responsabilité du débiteur comme gardien
Le procès-verbal désigne par défaut le débiteur comme gardien des récoltes saisies, selon l’article R. 221-59 du Code des procédures civiles d’exécution. Cette garde a un caractère dynamique, car la récolte évolue jusqu’à maturité.
Rôle actif dans la surveillance de la récolte
Le débiteur-gardien doit :
- Veiller à la récolte
- Lui apporter les soins nécessaires
- Informer l’huissier de tout événement climatique susceptible de la compromettre
Recours au juge de l’exécution pour désigner un gérant
Si le créancier craint que le débiteur néglige son rôle de gardien, il peut saisir le juge de l’exécution pour faire désigner un gérant à l’exploitation. Cette demande suit la procédure prévue aux articles R. 121-11 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution.
Le gérant, généralement un professionnel agricole (agriculteur, entrepreneur de battage ou expert agricole), devra :
- Veiller à la récolte
- Lui prodiguer les soins nécessaires
- Faire procéder au transport de la récolte dans un entrepôt ou sur un marché pour la vente
La rémunération du gérant s’ajoute aux frais de la procédure à la charge du débiteur.
Sources
- Code des procédures civiles d’exécution, articles R. 221-16, R. 221-17, R. 221-18, R. 221-57 à R. 221-61
- Pothier, Traité de la procédure civile, partie IV, chapitre 2, section 5
- JurisClasseur Procédure civile, Fasc. 1600-85 : SAISIE-VENTE. – Récoltes sur pieds, par Nathalie Casal, mise à jour du 16 juillet 2021