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Comment rédiger et notifier efficacement une mise en demeure

Table des matières

Une mise en demeure efficace peut éviter bien des tracas judiciaires. Ce document, interface entre la phase amiable et contentieuse, exige une attention particulière tant dans sa rédaction que dans sa notification. Pour une gestion optimale, notamment en matière de recouvrement de créances, l’assistance d’experts est souvent recommandée.

1. L’importance du contenu et de la forme

Pour une compréhension fondamentale des principes, définitions et enjeux juridiques, la mise en demeure est un acte juridique unilatéral qui interpelle un débiteur sur son retard d’exécution. Elle marque le point de départ des intérêts moratoires et cristallise la défaillance du destinataire (Civ. 3e, 4 mars 2021, n° 18-25.755).

Sa rédaction demande de la rigueur car un formalisme insuffisant peut compromettre son efficacité. Un contenu imprécis ou une notification irrégulière risquent d’affaiblir la position du créancier, voire d’invalider les procédures ultérieures. Il est toutefois important de savoir qu’il existe des cas où il est possible de se passer légalement d’une mise en demeure.

2. Le contenu de la mise en demeure

Les mentions obligatoires

Toute mise en demeure doit contenir plusieurs éléments essentiels :

  • La mention explicite « mise en demeure »
  • La date (élément crucial qui marque le point de départ des intérêts)
  • L’identité précise de l’auteur et du destinataire
  • Le constat détaillé du retard concernant une obligation existante
  • Une demande claire d’exécution

La jurisprudence exerce un contrôle strict sur ces informations. Le destinataire doit pouvoir comprendre ce qui lui est reproché et disposer des éléments pour éventuellement contester la demande (Civ. 2e, 7 avril 2022, n° 20-21.072). Pour mieux appréhender l’impact de ces éléments sur la suite des événements, il est essentiel de comprendre les effets juridiques de la mise en demeure.

La formulation adaptée

Les termes doivent être clairs, fermes, mais mesurés. Un langage abusivement comminatoire pourrait être jugé disproportionné.

L’article 1344 du Code civil exige « une interpellation suffisante ». Cette formulation doit exprimer nettement la volonté du créancier d’obtenir satisfaction, comme le souligne Nathalie Porchy-Simon dans son ouvrage Droit civil 2e année. Les obligations (15e éd., 2022).

Pour les contrats de prêt, la jurisprudence exige que la mise en demeure mentionne explicitement la possibilité de déchéance du terme (Civ. 1re, 4 avril 2024, n° 21-12.274).

Le délai d’exécution

Un délai raisonnable doit être accordé au débiteur pour s’exécuter. L’exigence d’une exécution « immédiate et sans délai » ne satisfait pas aux exigences formelles (Civ. 3e, 14 déc. 1994, n° 93-12.191).

Certains textes imposent un délai spécifique, comme l’article R. 133-3 du Code de la Sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations.

Les juges vérifient que le délai permet réellement au destinataire de mettre fin au manquement (Civ. 1re, 8 janv. 2020, n° 18-24.232).

3. Les différentes formes de notification

La sommation par huissier

La sommation est un acte extra-judiciaire notifié par un huissier donnant ordre au destinataire d’exécuter une obligation. Elle est soumise aux dispositions des articles 648 à 650 du Code de procédure civile.

Cette forme présente l’avantage de constituer une preuve solide de la notification et de son contenu.

L’acte portant interpellation suffisante

L’article 1344 du Code civil autorise toute forme d’acte comportant une interpellation suffisante. Cela peut être :

  • Une lettre simple
  • Un courrier remis en main propre
  • Un courrier recommandé avec accusé de réception

Cette dernière option est préférable pour préconstituer la preuve de l’envoi et de la réception.

La clause contractuelle d’exigibilité

Les parties peuvent prévoir contractuellement que la mise en demeure résultera de la seule exigibilité de l’obligation (art. 1344 C. civ.).

Attention toutefois aux clauses abusives. La Cour de cassation a renvoyé à la CJUE la question de savoir si une dispense conventionnelle de mise en demeure pouvait être considérée comme abusive dans les contrats conclus avec des consommateurs (Civ. 1re, 16 juin 2021, n° 20-12.154).

La demande en justice

La demande en justice opère mise en demeure si elle exprime clairement la volonté d’obtenir l’exécution par le destinataire (Civ. 3e, 30 nov. 1988, n° 87-15.519).

Elle fait courir les intérêts moratoires, même si le succès de la demande repose sur une cause invoquée ultérieurement.

4. Les cas particuliers de notification

Parmi les situations spécifiques, il est notamment crucial d’explorer les exigences de rédaction et de notification adaptées aux différents systèmes juridiques internationaux concernant la mise en demeure à l’étranger.

Pluralité de destinataires

En principe, la mise en demeure doit être adressée à chaque débiteur individuellement (Civ. 2e, 26 mars 2015, n° 14-13.327).

Toutefois, en cas de solidarité entre codébiteurs, la mise en demeure adressée à l’un d’eux produit effet à l’égard de tous (Civ. 1re, 20 déc. 2017, n° 16-12.129).

Cette règle s’applique uniquement dans les limites de la solidarité (Civ. 1re, 25 mai 2022, n° 20-21.488).

Problématiques de réception

La mise en demeure étant un acte réceptice, elle doit parvenir à son destinataire. Toutefois, le défaut de réception n’affecte pas sa validité si l’envoi est établi (Civ. 2e, 24 janv. 2019, n° 17-28.437).

Il n’est pas nécessaire de prouver que le destinataire en a effectivement pris connaissance (Civ. 1re, 24 juin 1975, n° 74-10.644). Si le débiteur s’abstient délibérément de retirer les courriers, la mise en demeure reste valable (Civ. 1re, 16 févr. 2022, n° 20-18.266).

Changement d’adresse

Les juges n’annulent pas automatiquement une mise en demeure envoyée à une ancienne adresse. Ils vérifient si le destinataire avait informé l’expéditeur de son changement d’adresse (Civ. 2e, 2 juin 2022, n° 19-15.669).

Dans certains cas, une mise en demeure adressée au « service comptabilité » d’une personne morale est jugée valable, même si elle n’est pas envoyée au domicile du gérant (Civ. 3e, 30 janv. 2013, n° 11-26.464).

Sources

  • Code civil, articles 1231, 1344 à 1345-3
  • Code de procédure civile, articles 648 à 650
  • Code de la sécurité sociale, articles L. 244-1, L. 244-2, R. 133-3
  • Civ. 1re, 4 avril 2024, n° 21-12.274
  • Civ. 3e, 4 mars 2021, n° 18-25.755
  • Civ. 2e, 7 avril 2022, n° 20-21.072
  • Civ. 3e, 14 déc. 1994, n° 93-12.191
  • Civ. 1re, 8 janv. 2020, n° 18-24.232
  • Civ. 3e, 30 nov. 1988, n° 87-15.519
  • Civ. 1re, 16 juin 2021, n° 20-12.154
  • Civ. 2e, 26 mars 2015, n° 14-13.327
  • Civ. 1re, 20 déc. 2017, n° 16-12.129
  • Civ. 1re, 25 mai 2022, n° 20-21.488
  • Civ. 2e, 24 janv. 2019, n° 17-28.437
  • Civ. 1re, 24 juin 1975, n° 74-10.644
  • Civ. 1re, 16 févr. 2022, n° 20-18.266
  • Civ. 2e, 2 juin 2022, n° 19-15.669
  • Civ. 3e, 30 janv. 2013, n° 11-26.464
  • PORCHY-SIMON Nathalie, Droit civil 2e année. Les obligations, 15e éd., 2022, Dalloz
  • DEHARO Gaëlle, « La mise en demeure », Répertoire de procédure civile, 2022

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