Récupérer un véhicule impayé ou obtenir son paiement? La procédure dépend de votre statut. Simple créancier, propriétaire ou créancier gagiste, chaque situation déclenche un mécanisme juridique distinct.
La diversité des situations de saisie
L’immobilisation d’un véhicule constitue l’étape initiale commune à toutes les procédures. Qu’il s’agisse d’obtenir un paiement ou de récupérer le bien, cette phase technique utilise généralement un sabot de Denver ou tout autre dispositif n’abîmant pas le véhicule.
La spécificité intervient ensuite. Le Code des procédures civiles d’exécution (CPCE) prévoit trois cas distincts selon la qualité du saisissant :
- Le créancier cherchant à obtenir le paiement d’une dette
- Le propriétaire souhaitant récupérer son bien
- Le créancier gagiste exerçant son droit sur le gage
Comprendre ces distinctions permet d’optimiser vos chances de récupération.
Immobilisation en vue d’obtenir le paiement d’une somme d’argent
Procédure et formalités
Pour un créancier ordinaire, l’article R.223-10 du CPCE impose la signification d’un commandement de payer dans les huit jours suivant l’immobilisation.
Ce commandement doit contenir, sous peine de nullité :
- La copie du procès-verbal d’immobilisation
- Le décompte précis des sommes (principal, frais, intérêts)
- L’avertissement qu’à défaut de paiement, le véhicule sera vendu
- L’indication des voies de contestation devant le juge de l’exécution
Un piège à éviter? Omettre ces mentions obligatoires. La procédure serait annulée, obligeant à recommencer depuis le début, avec le risque que le véhicule ait disparu entre-temps.
Vente du véhicule saisi
À défaut de paiement, l’article R.223-11 du CPCE organise la vente selon les règles de la saisie-vente classique.
Le débiteur dispose d’un mois pour vendre lui-même le véhicule à l’amiable, souvent à meilleur prix qu’une vente aux enchères. Le produit de cette vente est alors remis au commissaire de justice pour désintéresser le créancier.
Sans vente amiable dans ce délai, la vente forcée aux enchères publiques s’impose. Les frais de cette vente peuvent réduire significativement le montant disponible pour le remboursement.
Immobilisation à fin de remise au propriétaire
Cas typiques
Cette procédure concerne principalement les contrats de crédit-bail ou de location avec option d’achat. Le bailleur reste propriétaire du véhicule jusqu’au paiement complet ou jusqu’à la levée de l’option d’achat.
En cas d’impayés significatifs, le contrat est généralement résilié. Le bailleur souhaite alors récupérer son bien, pas obtenir un paiement.
Procédure et délais
L’article R.223-12 du CPCE prévoit une procédure spécifique. Le commissaire de justice doit signifier au détenteur, dans les huit jours de l’immobilisation, un acte contenant :
- La copie du procès-verbal d’immobilisation
- L’injonction de se présenter sous huit jours à l’étude du commissaire de justice
- L’avertissement qu’à défaut, le véhicule sera transporté aux frais du détenteur
- L’indication des voies de contestation
L’expérience montre que cette procédure aboutit fréquemment à une remise volontaire du véhicule, évitant ainsi des frais supplémentaires au débiteur.
Si le véhicule est détenu par un tiers? Une sommation spécifique devra lui être adressée. En cas de refus persistant, le juge de l’exécution pourra être saisi.
Immobilisation à fin de remise à un créancier gagiste
Particularités procédurales
Le créancier gagiste bénéficie d’un traitement privilégié par l’article R.223-13 du CPCE. Dans les huit jours de l’immobilisation, le commissaire de justice signifie au détenteur un acte comportant :
- La copie du procès-verbal d’immobilisation
- L’injonction de se présenter sous huit jours pour organiser le transport
- Le décompte des sommes dues
- Les informations sur la vente (amiable ou forcée)
- Les voies de contestation disponibles
Depuis la réforme du droit des sûretés par l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, deux options s’offrent au créancier gagiste :
- La procédure classique avec vente amiable puis vente forcée
- La procédure simplifiée prévue par l’article 2346 du Code civil
Protection spécifique du créancier gagiste
La protection du créancier gagiste reste supérieure aux autres créanciers. Sa créance prime même celle d’un créancier ayant procédé à une saisie par déclaration antérieure auprès de l’autorité administrative.
L’article R.223-5 du CPCE stipule expressément que les effets de la déclaration ne peuvent préjudicier au créancier titulaire d’un gage régulièrement inscrit.
Cette protection s’étend jusqu’à l’indemnité d’assurance en cas de destruction du véhicule. La Cour de cassation accorde au gagiste le bénéfice de la subrogation réelle (Com. 18 févr. 1992, n°90-12.840).
En pratique, il est judicieux pour une entreprise de privilégier le statut de créancier gagiste plutôt que de simple créancier chirographaire lors de transactions importantes impliquant un véhicule.
Une erreur commune? Négliger d’inscrire le gage sur le registre prévu par le décret n°2023-97 du 14 février 2023. Sans cette inscription, le gage reste inopposable aux tiers.
Pour sécuriser vos créances et déterminer la procédure la plus adaptée à votre situation, l’analyse d’un avocat spécialiste des voies d’exécution s’avère souvent déterminante. Nos équipes peuvent évaluer votre dossier et définir la stratégie optimale dès le premier rendez-vous.
Sources
- Code des procédures civiles d’exécution, articles L.223-1 à L.223-2 et R.223-1 à R.223-13
- Ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés
- Décret n°2021-1888 du 29 décembre 2021 pris en application de l’ordonnance n°2021-1192
- Décret n°2023-97 du 14 février 2023 relatif à la publicité du gage portant sur un véhicule terrestre à moteur
- Cour de cassation, Com. 18 février 1992, n°90-12.840
- R. BOUR, Saisie des véhicules terrestres à moteur, Répertoire de procédure civile, Dalloz, octobre 2024