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Les honoraires d’avocats : principes de rémunération et procédure de contestation

Table des matières

La question des honoraires d’avocat suscite souvent des interrogations. Entre tarifs réglementés et liberté contractuelle, le système français présente une certaine complexité. Comprendre les règles qui régissent la rémunération des avocats permet d’éviter bien des malentendus.

La dualité de rémunération des avocats

Le système français distingue deux types de rémunération pour les avocats :

  • Les émoluments de postulation, tarifés selon des barèmes réglementaires
  • Les honoraires librement convenus avec le client

Cette dualité résulte de l’histoire de la profession et des réformes successives, notamment celle issue de la loi du 31 décembre 1971 et modifiée par la loi du 6 août 2015.

La postulation tarifée : un domaine désormais restreint

La loi n°2015-990 du 6 août 2015 a considérablement réduit le champ de la postulation tarifée. Celle-ci ne subsiste plus que dans quatre domaines :

  • La saisie immobilière
  • Le partage
  • La licitation
  • Les sûretés judiciaires

Dans ces matières, l’émolument est calculé selon un tarif prévu aux articles A.444-187 à A.444-202 du Code de commerce. Ces tarifs font l’objet de révisions biennales.

Pour les procédures engagées avant le 7 août 2015, les anciens tarifs restent applicables. La date d’achèvement de la mission de représentation – et non l’établissement de l’état de frais – détermine le tarif applicable (Civ. 2e, 12 octobre 2023, n°21-23.693).

La liberté conventionnelle de l’honoraire : principe et encadrement

L’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, affirme que « les honoraires de postulation, de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client. »

Toutefois, cette liberté s’exerce dans un cadre défini par plusieurs critères :

  • La situation de fortune du client
  • La difficulté de l’affaire
  • Les frais exposés par l’avocat
  • Sa notoriété
  • Ses diligences

La convention d’honoraires doit être formalisée par écrit, sauf urgence, force majeure ou intervention sous le bénéfice de l’aide juridictionnelle.

La convention d’honoraires : formalisme et contenu

Depuis la loi du 6 août 2015, la convention d’honoraires doit être écrite. Elle précise :

  • Le mode de détermination des honoraires
  • Les diligences prévisibles
  • Les frais et débours envisagés

Son absence expose l’avocat et son client à voir le montant de la rémunération fixé judiciairement selon les critères de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971.

Quand elle existe, la convention fait loi des parties, sous réserve des causes de nullité de droit commun. Elle doit être exécutée de bonne foi, ce qui exclut la possibilité de solliciter par anticipation les honoraires convenus (Civ. 2e, 12 mai 2005, n°02-16.425).

Pour un majeur protégé, la convention d’honoraires peut constituer un acte de disposition du patrimoine nécessitant l’accord du juge des tutelles (Civ. 2e, 6 mai 2021, n°19-22.141).

L’honoraire de résultat : un complément encadré

L’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 interdit la fixation d’honoraires uniquement en fonction du résultat judiciaire. En revanche, il autorise « la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d’un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu. »

Cet honoraire de résultat n’est dû que lorsque l’instance a pris fin par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable. L’avocat dessaisi avant le résultat définitif ne peut y prétendre, sauf clause spécifique prévoyant cette hypothèse (Civ. 2e, 10 mars 2004, n°01-16.910 ; Civ. 2e, 4 juillet 2019, n°18-17.411).

Le montant de l’honoraire de résultat est librement fixé, sans proportion obligatoire avec l’honoraire principal (Civ. 1re, 10 juillet 1995, n°93-20.290). Toutefois, le juge conserve la possibilité de vérifier s’il n’est pas exagéré au regard du service rendu (Civ. 2e, 17 février 2011, n°09-72.492).

La procédure de contestation devant le bâtonnier

En cas de désaccord sur les honoraires, une procédure spécifique est prévue par les articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991. Cette procédure est exclusive : toute autre voie (référé-provision, arbitrage) est irrecevable.

La contestation doit être soumise au bâtonnier de l’Ordre auquel appartient l’avocat. Elle est présentée par écrit, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé.

Le bâtonnier instruit l’affaire contradictoirement et rend sa décision dans un délai de quatre mois, prorogeable une fois. Sa décision est notifiée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dans les quinze jours.

Après notification, en l’absence de recours, la décision devient définitive et peut être rendue exécutoire par le président du tribunal judiciaire.

Je précise que cette procédure ne peut concerner que les contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires. Elle ne peut servir à déterminer le débiteur des honoraires (Civ. 2e, 2 mars 2017, n°16-11.434) ni à mettre en cause la responsabilité de l’avocat (Civ. 2e, 14 janvier 2016, n°15-10.038).

Le recours devant le premier président de la cour d’appel

La décision du bâtonnier peut faire l’objet d’un recours devant le premier président de la cour d’appel dans le délai d’un mois à compter de sa notification.

Ce recours est formé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par remise au greffe de la cour d’appel. Un recours incident est possible en tout état de cause (Civ. 2e, 17 février 2011, n°09-13.209).

La procédure est orale, sans représentation obligatoire. Le premier président entend contradictoirement les parties convoquées par le greffier au moins huit jours à l’avance. Il peut à tout moment renvoyer l’affaire à la cour d’appel.

S’il annule la décision du bâtonnier, le premier président doit statuer sur le fond en vertu de l’effet dévolutif du recours (Civ. 2e, 28 juin 2012, n°11-23.624).

Le pourvoi en cassation : ultime recours

La décision du premier président peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation. Contrairement à la procédure devant le bâtonnier et le premier président, ce pourvoi nécessite la constitution d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation (Civ. 1re, 10 mai 2000, n°99-15.696).

Aucune disposition ne dispense de ce ministère obligatoire, et cette exigence ne porte pas atteinte aux droits définis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.

La contestation des honoraires peut donc traverser trois échelons juridictionnels, témoignant de l’importance accordée par le législateur à cette question.

Pour éviter ces contestations, une convention d’honoraires claire, précise et conforme aux dispositions légales reste la meilleure solution. N’hésitez pas à interroger votre avocat sur ses modalités de facturation avant d’engager toute procédure. Notre cabinet se tient à votre disposition pour toute question relative à ce sujet.

Sources

  • Loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, article 10
  • Loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, article 51
  • Décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, articles 174 à 179
  • Code de commerce, articles A.444-187 à A.444-202
  • Civ. 2e, 12 octobre 2023, n°21-23.693
  • Civ. 2e, 12 mai 2005, n°02-16.425
  • Civ. 2e, 6 mai 2021, n°19-22.141
  • Civ. 1re, 10 juillet 1995, n°93-20.290
  • Civ. 2e, 10 mars 2004, n°01-16.910
  • Civ. 2e, 4 juillet 2019, n°18-17.411
  • Civ. 2e, 17 février 2011, n°09-13.209
  • Civ. 2e, 2 mars 2017, n°16-11.434
  • Civ. 2e, 14 janvier 2016, n°15-10.038
  • Civ. 2e, 28 juin 2012, n°11-23.624
  • Civ. 1re, 10 mai 2000, n°99-15.696
  • Répertoire de procédure civile, « Taxe », Michel REDON, février 2024

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