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Crédit-bail mobilier : garanties du bailleur et fin du contrat

Table des matières

Le crédit-bail mobilier, s’il offre de nombreux avantages au locataire, représente un investissement et donc un risque pour l’établissement financier qui achète le bien et le met à disposition. Comment le crédit-bailleur se protège-t-il contre les aléas possibles, comme le non-paiement des loyers ou la dégradation du matériel ? Quelles sont les issues prévues lorsque le contrat arrive à son terme ? Comprendre ces aspects est utile, même pour vous en tant que locataire, car ils structurent la relation contractuelle et déterminent les conséquences de certains événements. Cet article explore les principales garanties qui sécurisent l’opération pour le crédit-bailleur, ainsi que les différentes manières dont un contrat de crédit-bail peut prendre fin, que ce soit à son échéance normale ou de façon anticipée.

Les garanties protégeant le crédit-bailleur

Plusieurs mécanismes juridiques et contractuels visent à sécuriser l’opération pour la société de crédit-bail.

La propriété du bien : la garantie fondamentale

La pierre angulaire de la sécurité du crédit-bailleur est qu’il reste propriétaire du matériel pendant toute la durée de la location. Vous n’êtes que locataire, même si les loyers que vous versez intègrent une part qui correspond à l’amortissement financier du bien. Cette conservation de la propriété (article 544 du Code civil) est la garantie la plus essentielle : en cas de difficultés graves, et notamment de procédure collective vous concernant, le bailleur peut, sous conditions, récupérer « son » bien, qui ne fait pas partie du gage commun de vos autres créanciers.

L’importance de la publicité légale

Pour que ce droit de propriété soit pleinement efficace vis-à-vis des tiers (autres créanciers, acheteur éventuel si vous tentiez de céder le bien illégalement…), la loi impose une publicité des contrats de crédit-bail mobilier. Cette publicité s’effectue par une inscription sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce compétent (généralement celui de votre siège social). Les modalités sont précisées par les articles R. 313-3 et suivants du Code monétaire et financier.

L’enjeu est considérable : si le crédit-bailleur n’effectue pas correctement cette publicité avant l’ouverture d’une éventuelle procédure collective vous concernant, son droit de propriété risque d’être déclaré inopposable à la procédure. Concrètement, cela signifie qu’il pourrait perdre son droit de récupérer le matériel, qui serait alors considéré comme faisant partie de vos actifs saisissables par les créanciers. La publicité est donc une formalité déterminante pour la solidité de la garantie du bailleur.

Les cautions : un engagement à ne pas prendre à la légère

Il est très fréquent que le crédit-bailleur demande des garanties personnelles pour couvrir vos engagements. La plus courante est le cautionnement, souvent demandé au dirigeant de la société locataire ou à la société mère. La caution s’engage à payer à la place du locataire si celui-ci est défaillant.

L’étendue de cet engagement doit être examinée attentivement : la caution garantit-elle seulement les loyers impayés, ou également l’indemnité de résiliation due en cas de rupture anticipée du contrat ? Les contrats prévoient généralement expressément que le cautionnement couvre l’ensemble, mais le principe légal (article 2015 du Code civil) est une interprétation plutôt restrictive de l’engagement de la caution. Il faut distinguer le cautionnement de la « garantie autonome » (ou à première demande), plus rare dans ce contexte, qui est un engagement indépendant de la dette principale.

En cas de procédure collective du locataire, la situation de la caution est particulière : elle reste généralement tenue des dettes antérieures au jugement d’ouverture (loyers impayés) et ne bénéficie pas de l’arrêt du cours des intérêts qui peut s’appliquer au débiteur principal.

La clause pénale en cas de résiliation anticipée

Que se passe-t-il si vous cessez de payer vos loyers et que le crédit-bailleur résilie le contrat avant son terme ? Outre la restitution du matériel et le paiement des loyers échus, les contrats de crédit-bail contiennent presque toujours une clause pénale. Cette clause prévoit le versement d’une indemnité forfaitaire destinée à compenser le préjudice subi par le bailleur du fait de la rupture anticipée.

Le calcul de cette indemnité est souvent basé sur la somme des loyers qui restaient à courir jusqu’à la fin prévue du contrat, parfois augmentée de la valeur résiduelle théorique du bien, et diminuée éventuellement du prix obtenu par le bailleur en revendant le matériel récupéré.

Historiquement, ces clauses pouvaient être très lourdes. C’est pourquoi la loi (articles 1152 et 1231 du Code civil, modifiés en 1975) a donné au juge le pouvoir de réduire le montant de cette indemnité si elle est jugée manifestement excessive. Ce pouvoir du juge est d’ordre public, c’est-à-dire qu’aucune clause du contrat ne peut l’écarter. Le juge appréciera le caractère excessif en comparant la pénalité au préjudice réellement subi par le bailleur, et tiendra compte de l’exécution partielle du contrat déjà réalisée. La clause pénale conserve cependant une double fonction : indemniser le bailleur et vous inciter à respecter vos engagements.

Le dépôt de garantie

Enfin, il est courant qu’un dépôt de garantie soit demandé au début du contrat. Il s’agit d’une somme d’argent que vous versez au crédit-bailleur et qui lui sert de garantie pour la bonne exécution de vos obligations. Ce dépôt ne peut normalement pas être utilisé pour compenser des loyers impayés en cours de contrat. À la fin de la location, si vous avez rempli toutes vos obligations, il vous est restitué. Dans le cas contraire, le bailleur peut l’utiliser pour couvrir les sommes restant dues (loyers, frais de remise en état…).

La fin « normale » du contrat : les options du locataire

Si tout se déroule comme prévu, le contrat de crédit-bail arrive à son terme à la date initialement convenue, après la fin de la période dite « irrévocable ». À ce moment, une caractéristique essentielle du crédit-bail entre en jeu : vous disposez d’une option quant au sort du matériel. Généralement, trois possibilités s’offrent à vous.

Option 1 : Restituer le matériel

Vous pouvez choisir de simplement rendre le matériel au crédit-bailleur. Dans ce cas, vous devez le restituer en bon état d’entretien et de fonctionnement, compte tenu de l’usure normale liée à son utilisation pendant la durée du contrat. Des frais de remise en état pourraient vous être facturés si le matériel présente une usure anormale ou des dégradations importantes. Le contrat précise souvent les modalités de cette restitution (lieu, délais, expertise éventuelle de l’état).

Option 2 : Renouveler le contrat

Si le matériel vous est encore utile et que le contrat le prévoit, vous pouvez opter pour un renouvellement de la location. Il ne s’agit pas d’une simple prolongation, mais bien de la conclusion d’un nouveau contrat de location. Les conditions (durée, montant du loyer, périodicité de résiliation éventuelle) sont alors renégociées. Le loyer de cette seconde période est souvent plus faible, car le coût initial du bien est largement amorti pour le bailleur.

Option 3 : Acheter le bien (la levée d’option)

C’est l’issue la plus fréquente et souvent la plus logique économiquement pour le locataire. Le contrat de crédit-bail comporte dès l’origine une promesse unilatérale de vente du bien par le crédit-bailleur à votre profit. En fin de contrat, vous pouvez « lever cette option », c’est-à-dire décider d’acheter le matériel.

  • Vous devez avoir respecté toutes vos obligations contractuelles, notamment avoir payé l’intégralité des loyers dus pendant la période de location.
  • Vous devez manifester votre volonté d’acheter dans les formes et délais prévus au contrat (souvent par lettre recommandée quelques mois avant l’échéance).
  • Vous devez payer le prix de l’option, appelé aussi valeur résiduelle. Ce prix est fixé dès la signature du contrat initial et tient compte (au moins en partie) des loyers que vous avez déjà versés. Il est généralement bien inférieur à la valeur de marché du bien à ce moment-là.

Le transfert effectif de propriété à votre profit n’intervient souvent qu’après le paiement intégral de cette valeur résiduelle. Il n’est pas rare que les contrats prévoient une sorte de « clause de réserve de propriété » sur ce paiement final : vous ne devenez pleinement propriétaire qu’une fois le prix de l’option totalement acquitté.

La fin anticipée du contrat

Le contrat de crédit-bail peut également prendre fin avant l’échéance prévue initialement, dans différentes circonstances.

La résiliation amiable

Comme tout contrat, le crédit-bail peut être résilié d’un commun accord entre vous et le crédit-bailleur, même pendant la période irrévocable. Les conditions financières de cette rupture amiable (indemnité éventuelle) sont alors négociées entre les parties.

La résiliation pour faute

C’est le cas le plus conflictuel. Si l’une des parties ne respecte pas ses obligations, l’autre peut demander la résiliation du contrat (application de l’article 1184 du Code civil). En pratique, c’est surtout la défaillance du locataire (non-paiement répété des loyers, utilisation non conforme, défaut d’assurance, tentative de cession non autorisée…) qui conduit à cette issue.

Les contrats prévoient quasiment toujours une clause résolutoire expresse : après une mise en demeure restée sans effet dans un délai défini, le contrat est résilié automatiquement, sans qu’il soit nécessaire de passer devant un juge pour le faire constater (même si une action judiciaire est souvent nécessaire pour obtenir l’exécution des conséquences).

  • Restitution immédiate du matériel.
  • Paiement de tous les loyers échus et impayés.
  • Paiement de l’indemnité de résiliation anticipée, calculée selon la clause pénale prévue au contrat (voir ci-dessus).

L’impact de la résolution du contrat de vente initial

Un cas particulier de fin anticipée est lié à l’interdépendance entre le contrat de crédit-bail et le contrat de vente initial entre le fournisseur et le crédit-bailleur. Si ce contrat de vente est ultérieurement résolu (par exemple, suite à une action en garantie pour vice caché majeur que vous auriez exercée avec succès contre le fournisseur, en tant que mandataire du bailleur), la jurisprudence considère que le contrat de crédit-bail, devenu sans objet, est lui aussi automatiquement résilié (il « tombe » en conséquence de la disparition de la vente).

Attention cependant : si le contrat de crédit-bail est bien résilié pour l’avenir dans ce cas, les clauses spécifiques qui ont été prévues pour organiser les conséquences financières de cette situation particulière (par exemple, une clause prévoyant comment le bailleur sera indemnisé de la perte de son investissement) restent généralement applicables.

La fin d’un contrat de crédit-bail, qu’elle soit normale ou anticipée, soulève des questions juridiques et financières importantes. Bien comprendre les mécanismes de garantie et les différentes issues possibles vous permet d’anticiper et de mieux gérer cette étape clé.

Anticiper la fin de votre contrat de crédit-bail, choisir la meilleure option pour votre entreprise ou faire face à une résiliation anticipée nécessite une analyse précise de votre contrat et de votre situation. Notre équipe se tient à votre disposition pour vous conseiller et sécuriser vos intérêts.

Sources

  • Code monétaire et financier : articles R. 313-3 et suivants (Publicité).
  • Code civil : articles 544 (Propriété), 1134 (Force obligatoire des contrats), 1152 (Clause pénale), 1184 (Condition résolutoire), 1231 (Exécution partielle et clause pénale), 1722 (Perte de la chose louée), 2011 et suivants (Cautionnement), 2279 (Possession vaut titre – meubles).
  • Loi n° 80-335 du 12 mai 1980 (Clause de réserve de propriété).
  • Jurisprudence constante (notamment Cass. Ch. mixte, 23 novembre 1990 sur le lien entre résolution de la vente et résiliation du crédit-bail).

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