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Déclaration au RCS : le cœur des obligations des entreprises sur les bénéficiaires effectifs

Table des matières

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Vous avez identifié le ou les bénéficiaires effectifs de votre société ? C’est une étape nécessaire, mais le travail ne s’arrête pas là. L’obligation centrale qui découle de cette identification est la déclaration officielle de ces informations auprès du Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). Cette formalité n’est pas anodine : elle est au cœur du dispositif de transparence et son non-respect peut entraîner des conséquences sérieuses. Cet article détaille ce que vous devez savoir sur cette déclaration : quand, comment et quoi déclarer, comment la maintenir à jour, et quels sont les risques en cas de manquement. Pour un aperçu global des principales obligations, consultez notre article de synthèse sur le registre des bénéficiaires effectifs.

Déclarer au greffe : une formalité obligatoire

Avant de procéder à la déclaration, il est essentiel de bien comprendre qui est considéré comme bénéficiaire effectif et comment l’identifier.

Pour la plupart des sociétés et entités immatriculées en France (hors sociétés cotées, comme vu dans notre précédent article), la déclaration des informations sur les bénéficiaires effectifs est une obligation légale incontournable, prévue par l’article L. 561-46 du Code monétaire et financier.

Quand et qui doit déclarer ?

Le moment clé pour la première déclaration est lors de la demande d’immatriculation de votre société au RCS. Cette démarche doit donc être anticipée dès la création de l’entreprise. C’est le représentant légal de la société (gérant, président…) ou un mandataire désigné qui effectue cette déclaration.

Au-delà de cette déclaration initiale, n’oubliez pas l’obligation générale, inscrite à l’article L. 561-45-1 du Code monétaire et financier, d’obtenir et de conserver des informations exactes et actualisées sur vos bénéficiaires effectifs tout au long de la vie de votre société. Cette obligation de mise à jour est le corollaire indispensable de la déclaration initiale.

Quelles sont les informations à communiquer au greffe ?

Il ne suffit pas de déclarer qu’un bénéficiaire effectif existe. Le décret n° 2020-118 du 12 février 2020 est venu confirmer et préciser les exigences de détail, mettant fin à certaines interprétations passées. L’article R. 561-56 du Code monétaire et financier liste précisément les informations attendues :

  • Concernant votre société ou entité : sa dénomination ou raison sociale, sa forme juridique, l’adresse de son siège social et son numéro unique d’identification (SIREN) suivi de la mention RCS et de la ville du greffe.  
  • Concernant chaque bénéficiaire effectif personne physique :
    • Ses nom, nom d’usage, pseudonyme, prénoms.
    • Sa date et son lieu de naissance.
    • Sa nationalité.
    • L’adresse de son domicile personnel.
    • La nature, les modalités et l’étendue du contrôle exercé sur la société. C’est un point essentiel qui exige de la précision. Il ne suffit pas d’indiquer détenir « plus de 25% ». Il faut spécifier le pourcentage exact de capital ou de droits de vote détenus, directement et/ou indirectement. Si le contrôle s’exerce par un autre moyen (pacte d’actionnaires, pouvoir de nomination…), il faut décrire clairement ces modalités. La jurisprudence (confirmée par le décret de 2020) a été très claire sur ce besoin de précision (voir par exemple T. com. Bobigny, 18 mai 2018 ; CA Lyon, 12 sept. 2019). L’objectif de transparence impose de savoir comment et à quel degré la personne contrôle l’entité.  
    • La date à laquelle cette personne est devenue bénéficiaire effectif.

Fournir des informations complètes et précises est donc primordial. Une déclaration vague ou incomplète pourrait être considérée comme non conforme.

Les modalités pratiques de la déclaration

Comment faire parvenir ces informations au greffe ? Plusieurs options s’offrent à vous, comme le détaille l’article R. 561-55 du Code monétaire et financier :

  • Directement au greffe du tribunal de commerce compétent, par le représentant légal ou un mandataire muni d’un pouvoir.
  • Par l’intermédiaire du Centre de Formalités des Entreprises (CFE) compétent lors de l’immatriculation ou de modifications.
  • Via le guichet unique électronique des formalités d’entreprises (guichet-entreprises.fr), qui centralise les démarches. La déclaration par voie électronique est possible, à condition d’utiliser une signature électronique sécurisée (conformément à l’article R. 123-77 du Code de commerce).

Les greffes proposent généralement des formulaires types (comme les formulaires DBE-S-1, DBE-S-Bis et leurs annexes) pour faciliter la déclaration. Bien que leur usage ne soit pas strictement obligatoire – la jurisprudence a admis qu’une déclaration sur papier libre est valable si elle contient toutes les informations requises (CA Lyon, 12 sept. 2019) –, ces formulaires sont très utiles pour s’assurer de ne rien oublier.

Enfin, cette formalité a un coût. Un arrêté du 1er août 2017 fixe les émoluments perçus par le greffe pour le dépôt de ces informations (environ 20 euros lors de l’immatriculation, et un peu plus pour les modifications ultérieures ou les déclarations des sociétés existantes avant août 2017).

Garder sa déclaration à jour : une nécessité permanente

La déclaration initiale n’est pas une formalité unique. Le registre doit refléter la réalité du contrôle de votre entreprise à tout moment.

Les événements déclencheurs d’une mise à jour

Vous devez déposer une déclaration modificative dès que survient tout fait ou acte rendant nécessaire la rectification ou le complément des informations qui ont été déclarées (article R. 561-55 C. mon. fin.). Cela peut être :

  • L’arrivée d’un nouveau bénéficiaire effectif (par exemple, suite à une augmentation de capital, une cession de parts, ou la signature d’un pacte).
  • La perte de la qualité de bénéficiaire effectif par une personne précédemment déclarée.
  • Un changement dans les informations personnelles d’un bénéficiaire effectif déclaré (changement d’adresse personnelle, de nom d’usage…).
  • Une modification dans les modalités ou l’étendue du contrôle exercé (par exemple, un actionnaire passe de 20% à 30% du capital, ou inversement de 30% à 20%).

En revanche, si aucune de ces informations ne change, il n’est pas nécessaire de refaire une déclaration chaque année (confirmé par une réponse ministérielle n° 27006, JOAN 19 mai 2020). L’obligation est liée au changement effectif.

Le délai impératif : 30 jours

La réactivité est de mise. La demande d’inscription modificative doit être déposée au greffe dans un délai de trente jours suivant l’événement qui la rend nécessaire (article R. 561-55 C. mon. fin.). Ce délai est court et impose une vigilance constante sur l’évolution de la structure de contrôle de votre société.

Absence ou erreur de déclaration : quelles conséquences ?

Ne pas déclarer, déclarer en retard, ou fournir des informations inexactes ou incomplètes n’est pas sans risque. Le législateur a prévu plusieurs mécanismes pour assurer le respect de ces obligations.

La procédure d’injonction pour forcer la main

Si une société ne dépose pas sa déclaration ou si les informations fournies sont jugées incorrectes ou incomplètes, le président du tribunal de commerce peut intervenir. Sur requête du procureur, de toute personne y ayant intérêt, ou même d’office, il peut enjoindre à la société de procéder à la déclaration ou à sa rectification, le cas échéant sous astreinte (article L. 561-48 C. mon. fin.). L’astreinte est une pénalité financière calculée par jour de retard, qui peut vite devenir très coûteuse.

Le président peut même désigner un mandataire (par exemple, un administrateur judiciaire) chargé d’accomplir ces formalités aux frais de la société. C’est une procédure contraignante qui signale un manquement sérieux. La procédure est détaillée aux articles R. 561-60 et suivants du Code monétaire et financier.

La procédure de régularisation si une divergence est signalée

Depuis l’ordonnance du 12 février 2020, un autre mécanisme existe. Les professionnels soumis aux obligations LCB-FT (votre banque, votre expert-comptable…) ainsi que certaines autorités (ACPR, AMF…) ont désormais l’obligation de signaler au greffier toute divergence qu’ils constatent entre les informations inscrites au RCS et celles dont ils disposent sur les bénéficiaires effectifs (article L. 561-47-1 C. mon. fin.).

Lorsque le greffier reçoit un tel signalement, il doit inviter la société concernée à régulariser son dossier dans un délai d’un mois. Si la société ne s’exécute pas, le greffier saisit le président du tribunal, qui pourra alors lancer la procédure d’injonction décrite ci-dessus. Point important : pendant tout le temps où la divergence persiste et n’est pas corrigée, le greffier doit faire mention de cette divergence sur l’extrait RCS de la société, en précisant sur quelles informations elle porte (article R. 561-64 C. mon. fin.). Imaginez l’impact potentiel sur la crédibilité de votre entreprise vis-à-vis de ses partenaires.

Les sanctions pénales : un risque réel

Le non-respect de l’obligation de déclaration est également constitutif d’une infraction pénale. L’article L. 574-5 du Code monétaire et financier est très clair : le fait de ne pas déclarer les informations requises, ou de déclarer des informations inexactes ou incomplètes, est puni de :

  • Pour le dirigeant personne physique responsable : six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende. S’y ajoutent des peines complémentaires possibles comme l’interdiction de gérer ou la privation partielle de droits civiques.
  • Pour la personne morale (la société elle-même) : une amende pouvant atteindre 37 500 euros (quintuple de l’amende pour les personnes physiques), et d’autres peines comme l’affichage de la condamnation, voire, dans les cas les plus graves, la dissolution.

Ces sanctions pénales s’appliquent aussi au fait, pour la société, de ne pas fournir les informations sur ses bénéficiaires effectifs lorsqu’elles lui sont demandées par un professionnel assujetti LCB-FT dans le cadre de ses obligations de vigilance (renvoi de l’article L. 561-45-1 à l’article L. 574-5). La volonté du législateur est donc d’assurer par des moyens forts que ces informations soient non seulement déclarées, mais aussi exactes et accessibles.

Au-delà des sanctions pour la société, le bénéficiaire effectif peut lui aussi être directement impacté, et il est important de connaître les règles d’accès à ces informations sensibles.

Le rôle de contrôle du greffier

Le greffier du tribunal de commerce n’est pas un simple réceptionniste des déclarations. Il a un rôle de contrôle formel important. Il doit vérifier si les informations déclarées sont complètes, conformes aux textes, correspondent aux pièces justificatives éventuelles et sont compatibles avec le dossier de la société (article L. 561-47 C. mon. fin.).

S’il constate des manques ou des incohérences flagrantes (par exemple, des pourcentages de détention non précisés, une discordance avec les associés connus pour une société à responsabilité illimitée, une adresse manifestement erronée…), il peut et doit refuser l’inscription de la déclaration ou demander une régularisation (jurisprudence TC Bobigny, 18 mai 2018). Une fois la déclaration validée, le greffier l’inscrit au RCS et la transmet par voie électronique à l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) qui centralise les données au niveau national.

La déclaration des bénéficiaires effectifs est une formalité administrative avec des enjeux juridiques et pénaux importants. Assurez-vous que vos déclarations sont complètes, exactes et à jour. Pour bénéficier d’un accompagnement juridique expert et sur mesure en droit commercial, y compris pour vos obligations de conformité réglementaire, contactez notre cabinet.

Sources

  • Code monétaire et financier : notamment articles L. 561-45-1, L. 561-46, L. 561-47, L. 561-47-1, L. 561-48, L. 574-5, R. 561-55, R. 561-56, R. 561-60 à R. 561-64.
  • Code de commerce : notamment article R. 123-77.
  • Code pénal : notamment articles 121-2, 131-26, 131-27, 131-38, 131-39.
  • Décret n° 2020-118 du 12 février 2020.
  • Arrêté du 1er août 2017 relatif aux tarifs réglementés des greffiers des tribunaux de commerce.
  • Jurisprudence : T. com. Bobigny, 18 mai 2018, n° 2018S07031 ; CA Lyon, 12 sept. 2019, RG n° 19/02040.
  • Réponse Ministérielle n° 27006, JOAN Q 19 mai 2020, p. 3545.

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