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Actualités et jurisprudence récente sur les délais

Table des matières

La maîtrise des délais procéduraux constitue un élément stratégique dans tout litige. Ces dernières années, le droit des délais a connu des mutations considérables, tant par les réformes législatives que par l’évolution jurisprudentielle. Ces changements redéfinissent les contraintes temporelles imposées aux plaideurs.

La réforme de la procédure civile de 2019

Création du tribunal judiciaire

La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 et le décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 ont profondément remanié l’organisation judiciaire. La fusion des tribunaux d’instance et de grande instance en un tribunal judiciaire unique a entraîné une réécriture du titre I du code de procédure civile.

Cette réorganisation a modifié les délais de procédure applicables devant ces juridictions. Les délais auparavant distincts selon qu’on agissait devant le TI ou le TGI ont été harmonisés. Par exemple, le délai de comparution de 15 jours prévu à l’article 755 du CPC s’applique désormais uniformément.

Unification des modes de saisine

Le décret du 11 décembre 2019 a simplifié les modes de saisine en ne conservant que l’assignation et la requête. Cette rationalisation s’accompagne d’une généralisation de l’assignation avec « prise de date ».

Ce mécanisme impose à l’huissier ou à l’avocat d’obtenir une date d’audience avant la délivrance de l’assignation. Il modifie la computation des délais puisque l’assignation doit être délivrée au défendeur au moins 15 jours avant la date d’audience fixée.

Extension de la représentation obligatoire

L’extension du champ de la représentation obligatoire par avocat touche plusieurs domaines:

  • Procédures de référé
  • Procédures d’expropriation
  • Révision des baux commerciaux
  • Procédures fiscales devant les juridictions civiles
  • Certaines procédures familiales
  • Procédures devant le tribunal de commerce

Cette extension renforce les exigences procédurales et les conséquences du non-respect des délais. En effet, la caducité de l’appel prévue à l’article 908 du CPC sanctionne désormais plus de situations qu’auparavant.

Principe de l’exécution provisoire

Le décret de 2019 a inversé le principe antérieur en consacrant l’exécution provisoire de droit des décisions de justice. L’article 514 du CPC dispose désormais que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire sauf si la loi ou la décision rendue en dispose autrement. »

Cette réforme modifie la stratégie contentieuse car l’appel n’a plus d’effet suspensif automatique. Les délais pour solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire deviennent donc cruciaux.

Jurisprudence récente marquante

Notifications internationales

Le décret n°2019-402 du 3 mai 2019 a créé l’article 687-2 du CPC qui clarifie la date de notification d’un acte à l’étranger. Pour le destinataire, c’est la date à laquelle l’acte lui est remis ou valablement notifié.

La CJUE a précisé dans un arrêt du 7 juillet 2022 (affaire C-7/21) que le point de départ du délai pour refuser de recevoir un acte ne peut coïncider avec le point de départ du délai pour exercer un recours. Cette jurisprudence européenne protège les droits de la défense du destinataire étranger.

Péremption d’instance

La Cour de cassation a opéré un revirement majeur par quatre arrêts du 7 mars 2024 (n°21-19.475, 21-19.761, 21-20.719 et 21-23.230). Elle considère désormais que:

« Lorsqu’elles ont accompli, conformément notamment aux dispositions des articles 908, 909 et 910-4 du code de procédure civile, l’ensemble des charges leur incombant dans les délais impartis, sans plus rien avoir à ajouter au soutien de leurs prétentions respectives, les parties n’ont plus de diligence utile à effectuer en vue de faire avancer l’affaire. La direction de la procédure leur échappe alors au profit du conseiller de la mise en état. »

Cette solution met fin à l’automaticité de la péremption d’instance après deux ans d’inaction lorsque les parties ont accompli toutes leurs obligations procédurales.

Impact des procédures collectives

Un arrêt de la Chambre commerciale du 14 septembre 2022 (n°21-12.235) précise les effets de l’interruption d’instance par l’ouverture d’une procédure collective:

« Selon l’article 369 du code de procédure civile, l’instance est interrompue par l’effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement judiciaire ou la liquidation judiciaire dans les causes où il emporte assistance ou dessaisissement du débiteur et doit être reprise par les organes de la procédure collective ou à leur encontre. »

La Cour rappelle les sanctions sévères du non-respect de cette interruption: les jugements obtenus après l’interruption sont réputés non avenus.

Calcul des délais dans des situations spécifiques

La troisième chambre civile a jugé le 19 décembre 2024 (n°23-12.652) que les articles L. 271-1 du CCH et 641 du CPC expriment la même règle et ne se cumulent pas dans le calcul du délai de rétractation en matière immobilière.

En matière de délais de forclusion, la chambre commerciale a précisé le 23 octobre 2024 (n°23-17.962) que la notification d’un arrêt confirmatif fait courir un nouveau délai d’un mois pour saisir la juridiction compétente d’une contestation sérieuse.

Adaptations exceptionnelles: l’exemple de la crise sanitaire

L’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 a institué une période juridiquement protégée pendant la crise sanitaire. Du 12 mars jusqu’à un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire, de nombreux délais ont été suspendus.

Cette mesure exceptionnelle illustre la capacité d’adaptation du droit des délais. Elle a évité que la fermeture des juridictions n’entraîne des forclusions massives.

Les juges ont dû ensuite déterminer précisément quels délais étaient concernés par cette suspension. Un travail d’interprétation considérable a été nécessaire.

La crise a démontré que le temps judiciaire peut s’adapter aux situations exceptionnelles, tout en préservant la sécurité juridique.

Le non-respect des délais légaux peut avoir des conséquences irrémédiables sur l’issue d’un litige. Un délai dépassé peut entraîner l’irrecevabilité d’une action ou d’un recours. L’accompagnement par un avocat spécialiste du contentieux permet d’anticiper ces écueils procéduraux et de sécuriser la défense de vos intérêts.

Notre cabinet vous propose un audit de vos dossiers contentieux pour identifier les délais applicables et prévenir tout risque de forclusion.

Sources

  • Loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
  • Décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile
  • Décret n°2019-402 du 3 mai 2019 portant diverses mesures relatives à la communication électronique en matière civile
  • Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais
  • CJUE, 7 juillet 2022, affaire C-7/21
  • Civ. 2e, 7 mars 2024, n°21-19.475, 21-19.761, 21-20.719 et 21-23.230
  • Com. 14 septembre 2022, n°21-12.235
  • Civ. 3e, 19 décembre 2024, n°23-12.652
  • Com. 23 octobre 2024, n°23-17.962

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