Naviguer dans les eaux tumultueuses du commerce international sans protection adéquate expose votre entreprise à des risques conséquents. Pour une compréhension approfondie de l’assurance-crédit, de sa définition à sa nature juridique et son évolution, il convient de se pencher sur ses spécificités. L’assurance-crédit à l’exportation constitue un bouclier indispensable pour les sociétés françaises qui se lancent à la conquête des marchés étrangers.
La Coface, pilier du commerce extérieur français
La Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface) occupe une position stratégique dans le dispositif français de soutien aux exportations. Cet organisme couvre les risques commerciaux et politiques auxquels s’exposent les entreprises françaises à l’international.
Genèse et métamorphoses de la Coface
L’échec initial des initiatives privées
Au XIXe siècle, les premières entreprises privées d’assurance-crédit ont rapidement périclité. Leur trésorerie insuffisante ne leur permettait pas d’absorber les risques inhérents aux transactions internationales.
Vers le milieu du XIXe siècle, le secteur bancaire a tenté de combler ce vide en créant des structures dédiées. En 1927, plusieurs assureurs se sont regroupés pour fonder la Société française d’assurance pour favoriser le crédit (SFAC), aujourd’hui intégrée au groupe Euler Allianz. Mais ces tentatives privées se heurtaient toujours à l’ampleur des risques politiques et économiques internationaux.
La naissance de la Coface sous l’égide de l’État
C’est la loi n° 45-015 du 2 décembre 1945, dite loi de nationalisation du crédit, qui a donné naissance à la Coface. Comme le précise le document cité, cette création s’inscrivait dans un contexte où « le gouvernement pouvait, par décret, prendre toutes mesures ayant pour objet l’amélioration des conditions de crédit et d’assurance-crédit, nécessaires au développement du commerce extérieur de la France ».
La Coface a alors reçu le monopole de l’assurance-crédit à l’étranger, remplaçant le service d’assurance-crédit du ministère de l’Économie. Cette naissance coïncidait avec la nationalisation de la Banque de France et la création de la Banque française du commerce extérieur (BFCE).
La structure actuelle de la Coface
La réforme de 1994
Le décret n° 94-376 du 14 mai 1994 a profondément modifié le statut de la Coface. L’article R. 442-1 du Code des assurances prévoit désormais que la Coface, avec un capital majoritairement privé, peut gérer des garanties accordées pour le compte de l’État.
Cette évolution répondait à plusieurs impératifs :
- Conformité aux règles européennes de libre concurrence
- Adaptation à la directive sur la libre prestation de services
- Ouverture du capital aux investisseurs privés
Une double casquette
La Coface intervient aujourd’hui sous deux formes distinctes :
- Pour son propre compte : elle assume les risques d’assurance-crédit au sens large et la bonne fin des opérations commerciales à l’exportation. Dans ce cadre, elle respecte la réglementation applicable aux sociétés privées d’assurance.
- Pour le compte de l’État : selon l’article L. 432-2 du Code des assurances, la garantie de l’État peut être accordée à la Coface pour diverses opérations liées à l’exportation. Dans ce rôle, la Coface agit comme prestataire de services sous le contrôle étatique.
Les garanties proposées par la Coface
La palette des risques couverts par la Coface est vaste :
- Risques commerciaux : défaillance financière des acheteurs privés
- Risques politiques : guerre, révolution, troubles sociaux, nationalisations
- Risques monétaires : variations de change défavorables
- Risques catastrophiques : événements naturels majeurs
- Risques extraordinaires : circonstances exceptionnelles affectant les transactions
La Coface peut également garantir les exportateurs contre les pertes résultant des dépenses engagées pour prospecter des marchés étrangers ou constituer des stocks.
Comment obtenir une garantie Coface ?
Procédure d’octroi
Selon l’article L. 432-3 du Code des assurances, la garantie de l’État est accordée après avis de la Commission des garanties et du crédit au commerce extérieur, instituée par l’article 15 de la loi n° 49-874 du 5 juillet 1949.
La loi de finances rectificative n° 97-1239 du 29 décembre 1997 a précisé le déroulement pratique :
- La Coface prévoit un enregistrement comptable distinct pour les opérations effectuées avec la garantie de l’État
- Une convention entre l’État et la Coface définit les modalités de cet enregistrement
- Un contrôle est assuré par des commissaires aux comptes
Modalités pratiques
Pour l’exportateur souhaitant bénéficier d’une garantie Coface, plusieurs étapes sont nécessaires :
- Présentation du projet d’exportation
- Évaluation des risques par la Coface
- Détermination du type de garantie adapté
- Fixation des conditions tarifaires
- Signature du contrat d’assurance
Contentieux et compétence juridictionnelle
En cas de litige entre la Coface et l’un de ses clients, seul le juge judiciaire est compétent, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans son arrêt du 11 novembre 1992 (Cass. 1re civ., 11 nov. 1992 : Bull. civ. 1992, I, n° 279).
Ce point mérite toute l’attention des entreprises assurées. En effet, malgré la dimension publique de certaines activités de la Coface, les différends relèvent du droit privé et non du contentieux administratif.
Souvent, les exportateurs supposent à tort que le tribunal administratif serait compétent lorsque la Coface agit pour le compte de l’État. Cette confusion peut entraîner des erreurs procédurales préjudiciables.
Stratégies pour optimiser votre couverture
Trois types de polices d’assurance sont généralement proposés :
- Police spécifique pour une opération ponctuelle (équipements lourds, marchés d’études importantes)
- Abonnement pour les opérations régulières (contrat-cadre avec actualisations périodiques)
- Police globale pour les opérations mixtes (longue durée avec opérations ponctuelles et régulières)
Le choix entre ces formules dépend de la nature de vos exportations et de votre stratégie commerciale internationale.
Disposer d’un accompagnement juridique adapté lors de la négociation de ces contrats d’assurance peut faire toute la différence en cas de sinistre. Les subtilités contractuelles déterminent l’étendue réelle de votre protection.
Notre cabinet d’avocats spécialisé en droit des affaires internationales peut vous aider à sécuriser vos exportations en optimisant votre couverture Coface. Nous accompagnons régulièrement des entreprises dans leurs démarches auprès de cet organisme et veillons à la défense de leurs intérêts en cas de survenance d’un risque.
Sources
- Code des assurances, articles L. 432-1 à L. 432-3, R. 442-1 et R. 442-2
- Loi n° 45-015 du 2 décembre 1945 (loi de nationalisation du crédit)
- Décret n° 94-376 du 14 mai 1994 modifiant le statut de la Coface
- Loi de finances rectificative n° 97-1239 du 29 décembre 1997
- Cass. 1re civ., 11 novembre 1992, Bull. civ. 1992, I, n° 279
- Loi n° 49-874 du 5 juillet 1949, article 15 (Commission des garanties)
- Fasc. 800 : Assurance-crédit interne et à l’exportation, JurisClasseur Droit bancaire et financier