purple and black abstract painting

La publicité et l’information dans le crédit immobilier

Table des matières

S’engager dans un crédit immobilier représente souvent le projet d’une vie. L’opacité qui a longtemps caractérisé ce secteur a conduit le législateur, notamment via la réforme du crédit immobilier et vos droits, à imposer des règles strictes pour protéger les emprunteurs. La publicité et l’information précontractuelle sont au cœur de ce dispositif protecteur.

Les règles encadrant la publicité du crédit immobilier

La publicité en matière de crédit immobilier est strictement encadrée par les articles L. 313-3 à L. 313-5 du Code de la consommation. Ces dispositions visent à éviter que les consommateurs ne soient attirés par des offres alléchantes mais incomplètes ou trompeuses.

Toute publicité pour un crédit immobilier, quel que soit son support, doit être claire, exacte et non trompeuse. Elle doit mentionner l’identité du prêteur (ou de l’intermédiaire), la nature et l’objet du prêt. Lorsqu’elle comporte un taux d’intérêt ou des chiffres relatifs au coût du crédit, l’article L. 313-4 impose des informations supplémentaires, présentées de façon claire, concise et visible, souvent à l’aide d’un exemple représentatif :

  • Le taux débiteur (fixe, variable, révisable) et les frais inclus dans le coût total du crédit.
  • Le montant total du crédit.
  • Le Taux Annuel Effectif Global (TAEG), indicateur clé du coût total. Si une assurance est obligatoire et que son coût ne peut être déterminé à l’avance, cette obligation doit être mentionnée avec le TAEG.
  • La durée du contrat de crédit.
  • Le montant total dû par l’emprunteur.
  • Le montant et le nombre des échéances.
  • Un avertissement sur le risque de change si le prêt est en devise étrangère.
  • L’éventuelle nécessité d’une garantie hypothécaire ou comparable.

La jurisprudence sanctionne sévèrement les pratiques trompeuses. Par exemple, assimiler les mensualités de remboursement à des loyers est interdit (Crim. 4 juillet 1990, n° 89-85.766), car cela peut fausser la perception de l’effort financier réel par l’emprunteur.

De même, l’article L. 313-5 2° interdit toute formulation susceptible de créer chez le consommateur de « fausses attentes concernant la disponibilité ou le coût d’un crédit ». Le non-respect de ces règles expose le professionnel à des sanctions, notamment une amende pouvant atteindre 150 000 euros (article L. 341-21).

L’information générale due à l’emprunteur

Avant même toute démarche personnalisée, le prêteur ou l’intermédiaire doit assurer la disponibilité permanente d’informations générales claires et compréhensibles sur les contrats de crédit (article L. 313-6 du Code de la consommation).

Ces informations, détaillées à l’article R. 313-3, doivent être facilement accessibles et gratuites (sur support papier ou durable). Elles couvrent un large spectre :

  • Identité et adresse du professionnel.
  • Nature, destination et durée possibles des crédits.
  • Types de taux proposés (fixe, variable…) et leurs implications.
  • Formes de sûretés possibles (hypothèque, caution…).
  • Avertissement sur le risque de change pour les prêts en devises.
  • Un exemple représentatif incluant TAEG, coût total, etc.
  • Indication des autres coûts éventuels non inclus dans le TAEG.
  • Modalités de remboursement possibles.
  • Conditions de remboursement anticipé.
  • Nécessité éventuelle d’une expertise immobilière et ses coûts.
  • Obligation éventuelle de souscrire des services accessoires (comme une assurance) et la possibilité de les choisir ailleurs.
  • Avertissement général sur les conséquences d’un non-respect des obligations.

Les fiches d’information standardisées (FISE) : une information personnalisée

Au cœur du dispositif d’information précontractuelle se trouve la Fiche d’Information Standardisée Européenne (FISE). L’article L. 313-7 du Code de la consommation impose sa remise gratuite à l’emprunteur, sur support durable, au plus tard lors de l’émission de l’offre de crédit.

La FISE fournit des informations personnalisées, adaptées à la situation de l’emprunteur et aux caractéristiques du crédit envisagé. Son objectif est de permettre une comparaison éclairée des différentes offres disponibles sur le marché et d’évaluer les implications de chaque proposition. Son contenu, strictement défini par l’article R. 313-4 et une annexe réglementaire, reprend et personnalise les informations générales, en y ajoutant des détails spécifiques comme l’échéancier indicatif si pertinent.

Pour les prêts à taux variable ou en devises, la FISE doit inclure des simulations spécifiques illustrant l’impact potentiel des variations de taux ou de change sur les remboursements, la durée et le coût total (articles R. 313-5 et R. 313-6).

La remise de la FISE est une obligation essentielle. Son absence, ou une fiche incomplète ou erronée, expose le prêteur à la déchéance du droit aux intérêts, totale ou partielle, selon la gravité du manquement (article L. 341-26). La simple mention dans l’offre de prêt que la FISE a été remise ne suffit pas à prouver le respect de cette obligation ; le prêteur doit pouvoir le démontrer par d’autres moyens si nécessaire (Civ. 1re, 7 juin 2023, n° 22-15.552). Pour en savoir plus sur la FISE et le devoir d’avertissement du prêteur, consultez notre article dédié.

L’information spécifique sur l’assurance emprunteur

L’assurance emprunteur, bien que non légalement obligatoire, est quasi systématiquement exigée par les prêteurs et représente une part importante du coût total du crédit. L’information à ce sujet est donc primordiale.

L’article L. 313-8 du Code de la consommation impose que tout document précontractuel chiffré mentionnant une assurance de groupe (proposée par le prêteur) précise son coût de trois manières :

  • En Taux Annuel Effectif de l’Assurance (TAEA), pour comparaison avec le TAEG du crédit.
  • En montant total en euros dû sur toute la durée du prêt.
  • En montant en euros par période (ex: par mois), en indiquant si ce coût s’ajoute à l’échéance de crédit.

Par ailleurs, une fiche standardisée d’information spécifique à l’assurance doit être remise dès la première simulation (article L. 313-9). Elle détaille les garanties proposées, celles minimales exigées par le prêteur, et rappelle explicitement le droit pour l’emprunteur de choisir un autre assureur (délégation d’assurance), à condition que le contrat externe présente un niveau de garantie équivalent (article L. 313-30).

Les lois récentes, notamment la loi Lemoine de 2022, ont considérablement renforcé les droits des emprunteurs en matière d’assurance, facilitant la résiliation et la substitution du contrat d’assurance, et améliorant l’accès au crédit pour les personnes ayant des risques de santé aggravés grâce à l’évolution du « droit à l’oubli ».

Le taux annuel effectif global (TAEG) : l’indicateur clé du coût

Le TAEG est l’outil essentiel pour comparer le coût réel des différentes offres de crédit. Sa définition (article L. 311-1 7°) et son mode de calcul (articles L. 314-1 à L. 314-4 et R. 314-1 et suivants) sont précis. Il doit intégrer tous les frais connus du prêteur conditionnant l’octroi du crédit ou son obtention aux conditions annoncées.

L’article R. 314-4 liste les principaux éléments inclus dans le TAEG :

  • Les frais de dossier.
  • Les frais payés ou dus aux intermédiaires (courtiers…).
  • Les coûts d’assurance et de garanties obligatoires.
  • Les frais d’ouverture et de tenue d’un compte spécifique si exigé pour le prêt.
  • Le coût de l’évaluation du bien immobilier (expertise), le cas échéant.

Sont en revanche exclus (article R. 314-5) les frais liés à l’acquisition elle-même (frais de notaire, droits d’enregistrement) et les pénalités pour non-respect des obligations contractuelles.

La jurisprudence interprète largement les frais à inclure. Par exemple, la contribution à un fonds de garantie mutuelle exigée comme condition du prêt doit être intégrée au TAEG (Civ. 1re, 9 décembre 2010, n° 09-67.089).

L’exactitude du TAEG est fondamentale. Une erreur ou une omission dans son calcul ou sa mention dans l’offre de prêt est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur, proportionnellement au préjudice subi par l’emprunteur (article L. 341-4 et jurisprudence constante, ex: Civ. 1re, 22 septembre 2021, n° 19-25.316).

Le devoir de mise en garde du prêteur

Au-delà de la simple information, le prêteur (et l’intermédiaire) a un devoir de mise en garde envers l’emprunteur. Consacré par l’article L. 313-12 du Code de la consommation, ce devoir impose au professionnel d’alerter gratuitement l’emprunteur « lorsque, compte tenu de sa situation financière, un contrat de crédit peut induire des risques spécifiques pour lui ».

Ce devoir va plus loin que le conseil : il s’agit d’attirer l’attention sur les dangers potentiels de l’opération envisagée (risque de surendettement, complexité d’un montage…). Il découle directement de l’évaluation de la solvabilité que le prêteur doit obligatoirement réaliser (article L. 313-16). Si cette évaluation révèle un risque d’endettement excessif ou une inadaptation du prêt à la situation de l’emprunteur, le prêteur doit non seulement le mettre en garde mais potentiellement refuser le crédit.

Le manquement à ce devoir de mise en garde est sanctionné civilement par la déchéance du droit aux intérêts (dans la limite de 30% et plafonnée à 30 000 euros, article L. 341-27) et pénalement (article L. 341-31).

L’ensemble de ces obligations d’information, de transparence et de mise en garde vise à rééquilibrer la relation entre le professionnel et l’emprunteur, souvent moins averti. La complexité des produits de crédit et l’importance de l’engagement financier justifient ce formalisme protecteur. Si vous avez des questions sur une offre de prêt ou si vous pensez que vos droits n’ont pas été respectés, nos avocats vous conseillent en crédit immobilier.

Sources

  • Code de la consommation : articles L. 313-3 à L. 313-12, L. 313-16, L. 313-29, L. 313-30, L. 314-1 à L. 314-5, L. 341-4, L. 341-21 à L. 341-27, L. 341-31, R. 313-3 à R. 313-10, R. 314-1 à R. 314-7
  • Ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation
  • Loi n° 2022-270 du 28 février 2022 pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur
  • Jurisprudence citée (principaux arrêts) :
    • Crim. 4 juillet 1990, n° 89-85.766 (Publicité)
    • Civ. 1re, 9 décembre 2010, n° 09-67.089 (Calcul TAEG)
    • Civ. 1re, 22 septembre 2021, n° 19-25.316 (Sanction TAEG erroné)
    • Civ. 1re, 7 juin 2023, n° 22-15.552 (Preuve remise FISE)

Vous souhaitez échanger ?

Notre équipe est à votre disposition et s’engage à vous répondre sous 24 à 48 heures.

07 45 89 90 90

Vous êtes avocat ?

Consultez notre offre éditoriale dédiée.

Dossiers

> La pratique de la saisie immobilière> Les axes de défense en matière de saisie immobilière

Formations professionnelles

> Catalogue> Programme

Poursuivre la lecture

fr_FRFR