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La saisie des récoltes sur pieds : mécanisme, conditions et particularités juridiques

Table des matières

Le monde des voies d’exécution recèle des procédures méconnues. Parmi elles, la saisie des récoltes sur pieds. Cette procédure rare mérite pourtant notre attention. Elle témoigne d’un système juridique adapté aux spécificités agricoles. Après la saisie, la question de la vente des récoltes saisies soulève également des modalités spécifiques.

Définition et cadre légal

La saisie des récoltes sur pieds est une forme particulière de saisie-vente. Elle cible les produits agricoles cultivés (récoltes) encore attachés au sol (sur pieds).

Une fiction juridique nécessaire

Cette procédure repose sur une fiction juridique. Le Code civil classe les végétaux attachés au sol comme des immeubles par nature (article 520, alinéa 1er). Mais le législateur les considère comme des meubles par anticipation. Cette fiction permet d’écarter les complications de la saisie immobilière au profit d’une saisie mobilière simplifiée.

Son régime est défini aux articles R. 221-57 à R. 221-61 du Code des procédures civiles d’exécution. Elle suit principalement les règles de la saisie-vente, mais avec des aménagements. Pour une compréhension détaillée des formalités essentielles de cette procédure, consultez notre article dédié.

Les conditions de fond indispensables

Un titre exécutoire obligatoire

Comme toute saisie exécutoire, le créancier doit détenir un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible contre le propriétaire des récoltes. La certitude de la créance est présumée par l’existence du titre exécutoire.

Un commandement préalable

Un commandement de payer doit être signifié au débiteur conformément à l’article L. 221-1 du Code des procédures civiles d’exécution. Ce document formel contient toutes les mentions exigées par l’article 648 du Code de procédure civile pour les actes d’huissier, plus les mentions spécifiques prévues à l’article R. 221-1 du Code des procédures civiles d’exécution.

Un délai de 8 jours

La saisie ne peut être pratiquée qu’après un délai de 8 jours suivant la signification du commandement (article R. 221-1, 2° du Code des procédures civiles d’exécution). Ce délai se calcule selon les règles habituelles : le jour de la signification n’est pas compté, et si le délai expire un jour non ouvrable, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

Une contrainte temporelle supplémentaire

Particularité de cette saisie : elle doit intervenir dans les 6 semaines précédant l’époque habituelle de la maturité (article R. 221-57 du Code des procédures civiles d’exécution). Cette limite s’explique par la nécessité d’apprécier la valeur des fruits à vendre. Une saisie trop précoce serait nulle.

Le propriétaire des récoltes : qui peut être saisi ?

Distinction entre propriétaire du sol et des récoltes

Le débiteur doit être propriétaire de la récolte. Ce n’est pas nécessairement le propriétaire du sol. L’exploitant (fermier, usufruitier, indivisaire) est généralement le propriétaire de la récolte. L’huissier doit vérifier cette qualité, ce qui n’est pas toujours simple.

Pour les ventes de récoltes sur pied avant maturité, le transfert de propriété n’est pas instantané. Il ne s’opère qu’à la remise effective de la chose, donc au moment de la récolte. Avant cela, l’acheteur n’a qu’un droit personnel contre le vendeur, sans droit réel opposable.

Cas particuliers

Indivision et régimes matrimoniaux

En cas d’indivision, seul un créancier de l’indivision peut saisir la récolte. Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent que provoquer le partage (article 815-17 du Code civil).

Pour les régimes matrimoniaux, la jurisprudence protège les biens propres. Une saisie pratiquée contre un époux ne peut atteindre les récoltes provenant de terres propres à l’autre époux.

L’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL)

L’EIRL complique le tableau. L’exploitant agricole sous ce statut peut créer un patrimoine professionnel distinct de son patrimoine personnel (article L. 526-6 du Code de commerce).

Les créanciers professionnels n’ont de droit que sur le patrimoine affecté, tandis que les créanciers personnels n’ont de droit que sur le patrimoine non affecté (article L. 526-12 du Code de commerce).

Une protection existe : l’exploitant agricole peut choisir de ne pas affecter ses terres à son activité professionnelle (article L. 526-6, alinéa 3 du Code de commerce).

Sources

  • Code des procédures civiles d’exécution, articles L. 221-1, L. 221-2, R. 221-1, R. 221-16, R. 221-57 à R. 221-61
  • Code civil, articles 520, 524, 583, 815-17
  • Code de commerce, articles L. 526-6 et suivants, L. 526-12
  • Cass. 2e civ., 10 janvier 1979, n° 77-12.083
  • Cass. civ., 29 août 1853, DP 1853, I, p. 258
  • CA Rennes, ch. 6, 7 juillet 1981, JurisData n° 1981-040721

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