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La vie du contrat de franchise : les obligations du franchiseur

Table des matières

Signer un contrat de franchise marque le début d’une collaboration qui, idéalement, doit être bénéfique pour les deux parties. Si le franchisé s’engage à respecter un concept et à payer des redevances, le franchiseur, lui, n’est pas un simple percepteur. Il est le garant du modèle proposé et assume un ensemble d’obligations déterminantes pour la réussite de ses partenaires. Comprendre précisément ce que vous êtes en droit d’attendre de votre franchiseur est essentiel pour naviguer sereinement dans l’exécution du contrat et défendre vos intérêts. Pour une compréhension plus large du contrat de franchise, de sa définition et de son fonctionnement, consultez notre article dédié. Cet article détaille les devoirs fondamentaux du franchiseur, ceux qui constituent le cœur même de la relation de franchise, ainsi que certains engagements complémentaires fréquemment rencontrés.

Les obligations essentielles du franchiseur : le cœur du contrat

Certaines obligations pèsent sur le franchiseur du fait même de la nature du contrat de franchise. Elles en constituent l’essence et leur manquement peut remettre en cause l’équilibre, voire la validité, de l’accord.

Transmettre et actualiser le savoir-faire

C’est sans doute l’obligation la plus emblématique. Le franchiseur s’engage à communiquer au franchisé un savoir-faire spécifique. Rappelons ce qu’implique cette notion : il s’agit d’un ensemble d’informations pratiques, résultant de l’expérience du franchiseur, qui doit être secret (non généralement connu ou facilement accessible), substantiel (utile et apportant un avantage concurrentiel) et identifié (décrit précisément, souvent dans un manuel opératoire). Ce savoir-faire doit avoir été préalablement expérimenté avec succès par le franchiseur. Cette expérience est un pilier de la formation du contrat de franchise et de l’information précontractuelle due au franchisé. Un concept non éprouvé, dont les franchisés seraient les premiers testeurs, ne correspond pas à la définition d’une franchise, même si la jurisprudence se montre parfois souple sur l’exigence d’une « unité pilote » avant le lancement du réseau.

L’obligation ne s’arrête pas à la transmission initiale. Le savoir-faire n’est pas figé. Le franchiseur doit l’actualiser et le développer constamment pour maintenir l’avantage concurrentiel du réseau face aux évolutions du marché, des techniques ou des attentes des consommateurs. Cette adaptation continue est une composante essentielle de l’engagement du franchiseur. Il doit également prendre les mesures nécessaires pour protéger ce savoir-faire contre une utilisation illicite par des tiers ou d’anciens franchisés, notamment via des actions en concurrence déloyale ou en invoquant la protection du secret des affaires lorsque les conditions sont réunies.

Mettre à disposition les signes distinctifs (marque, enseigne)

Rejoindre une franchise, c’est bénéficier de la notoriété d’une marque et d’une enseigne reconnues. Le franchiseur a donc l’obligation fondamentale de concéder au franchisé le droit d’utiliser ses signes distinctifs (marque, enseigne, logo…). Cette concession prend généralement la forme d’une licence de marque intégrée au contrat de franchise.

Au-delà de l’octroi de la licence, le franchiseur doit s’assurer qu’il détient bien les droits sur ces signes et qu’ils sont valablement protégés (dépôt de marque valide, renouvellement effectué…). Si le franchiseur perd ses droits sur la marque, ou s’il s’avère qu’il n’en était pas titulaire, cela peut entraîner la nullité du contrat. Il doit aussi défendre la marque contre les contrefaçons ou les usages abusifs par des tiers qui pourraient nuire à l’image du réseau.

Fournir une assistance continue (commerciale, technique)

La franchise n’est pas une simple vente de concept « clé en main ». Le franchiseur est tenu d’une obligation d’assistance envers son franchisé, et ce, tout au long de la durée du contrat. Cette assistance revêt plusieurs facettes :

  • Assistance initiale : Aide au démarrage de l’activité (recherche de local dans certains cas, formation initiale du franchisé et de son personnel, aide à l’agencement…).
  • Assistance continue : Elle peut être commerciale (conseils en gestion, actions marketing nationales, animation du réseau, formation continue…) et technique (support pour l’utilisation d’outils spécifiques, mise à jour des process, assistance informatique si des logiciels sont imposés…).

Il est important de noter que l’obligation d’assistance est généralement considérée par les tribunaux comme une obligation de moyens, et non de résultat. Cela signifie que le franchiseur doit mettre en œuvre les efforts raisonnables pour assister ses franchisés, mais il n’est pas garant de leur succès individuel. En cas de litige, c’est au franchisé de prouver que le franchiseur a manqué à ses devoirs d’assistance (absence de visites, de formations, de réponses aux sollicitations…). Un manquement avéré peut justifier une demande de dommages-intérêts, voire la résiliation du contrat aux torts du franchiseur. Pour mieux comprendre les enjeux liés à la cessation du contrat de franchise, consultez notre article dédié.

Maintenir et promouvoir l’image du réseau

La force d’un réseau repose sur sa cohérence et sa réputation. Le franchiseur, en tant que chef d’orchestre, a l’obligation de veiller au maintien de l’identité commune et de l’image de marque du réseau. Cela implique d’une part de faire respecter les normes du concept par l’ensemble des franchisés (pouvoir de contrôle et de sanction des manquements), car le comportement d’un seul membre peut rejaillir négativement sur tous les autres.

D’autre part, le franchiseur doit activement promouvoir l’enseigne au niveau national ou régional. C’est souvent en contrepartie de cette obligation que les franchisés versent une redevance publicitaire spécifique. Le franchiseur doit donc engager des actions de communication et de marketing pertinentes pour soutenir la notoriété et l’attractivité du réseau.

Assurer transparence et loyauté

La relation de franchise est un partenariat qui doit reposer sur la confiance et la loyauté, principe général gouvernant l’exécution des contrats (article 1104 du Code civil). Le franchiseur, qui détient une position dominante dans la relation, est tenu à une obligation particulière de transparence.

Cette transparence est attendue notamment concernant l’utilisation des fonds collectés au titre des redevances publicitaires. Les franchisés sont en droit de savoir comment cet argent est dépensé et si les actions menées profitent réellement à l’ensemble du réseau. De même, si le franchiseur agit comme centrale d’achat ou de référencement, il doit pouvoir justifier des conditions négociées auprès des fournisseurs et de la répercussion équitable des éventuels avantages obtenus (remises, ristournes…). Une certaine opacité sur ces points peut masquer des conflits d’intérêts ou des manquements à l’obligation de chercher les meilleures conditions pour les franchisés.

Au-delà de la transparence, le franchiseur doit faire preuve de sérieux et de compétence dans la gestion de son concept et de son réseau. Le franchisé paie un droit d’entrée et des redevances, ce n’est pas pour rien. Il est en droit d’attendre un partenaire professionnel, organisé, capable d’anticiper les évolutions et de répondre efficacement aux besoins du réseau.

Garantir une identité de traitement entre les membres du réseau

La cohérence du réseau impose également que le franchiseur assure une égalité de traitement entre ses différents partenaires. Il ne peut favoriser certains franchisés au détriment d’autres sans justification objective et pertinente.

Cette exigence s’étend aussi aux relations entre les franchisés et les éventuelles succursales exploitées directement par le franchiseur. Ce dernier ne saurait utiliser ses propres points de vente pour concurrencer déloyalement ses franchisés, par exemple en leur imposant des conditions d’approvisionnement moins favorables ou en concentrant ses efforts publicitaires sur ses seules succursales. La jurisprudence dite « Huard » (concernant initialement les contrats pétroliers mais transposable) a sanctionné le fournisseur qui ne met pas ses distributeurs en mesure de pratiquer des prix concurrentiels. La loyauté impose au franchiseur de veiller à l’équilibre global du réseau.

Les engagements complémentaires fréquents

Au-delà de ce socle essentiel, le contrat de franchise peut prévoir d’autres obligations à la charge du franchiseur, en fonction de la nature de l’activité et des négociations entre les parties.

L’obligation de fourniture (franchise de distribution)

Dans les franchises de distribution de produits, le contrat prévoit logiquement une obligation pour le franchiseur (ou une centrale désignée) de fournir les marchandises au franchisé, conformément aux commandes et aux conditions générales de vente. Le franchisé doit pouvoir compter sur un approvisionnement régulier et conforme pour exploiter son activité.

L’obligation d’exclusivité territoriale (si prévue)

Même si elle n’est pas un élément essentiel de toute franchise, l’exclusivité territoriale est très fréquente. Le contrat peut ainsi interdire au franchiseur d’implanter un autre franchisé, voire une succursale, dans un territoire géographique défini concédé au franchisé. Il existe différents degrés d’exclusivité (simple exclusivité de franchise, exclusivité d’implantation, exclusivité d’approvisionnement) dont la portée doit être clairement définie au contrat.

Un point particulièrement sensible aujourd’hui concerne l’articulation de cette exclusivité avec les ventes réalisées par le franchiseur sur internet. La jurisprudence considère majoritairement que la création d’un site marchand par le franchiseur ne constitue pas une violation de l’exclusivité territoriale concédée pour un point de vente physique (Com. 14 mars 2006). Cette position est critiquable car elle peut vider l’exclusivité de sa substance et transformer le franchisé en simple « showroom » supportant les coûts d’une boutique physique sans bénéficier des ventes en ligne générées sur sa zone. Il est donc fortement recommandé aux candidats franchisés de négocier des clauses spécifiques pour encadrer les ventes en ligne : commissionnement sur les ventes livrées dans la zone, système de « click and collect » avantageux, interdiction de promotions en ligne plus agressives que dans les magasins… Faute de quoi, l’équilibre économique peut être rompu.

L’obligation de priorité (si prévue)

Le contrat peut octroyer au franchisé un droit de priorité pour l’ouverture d’un nouveau point de vente dans une zone limitrophe ou sur un nouveau concept développé par le franchiseur. Il s’agit d’un pacte de préférence dont les conditions de mise en œuvre doivent être précisées.

L’obligation de reprise des stocks en fin de contrat (si prévue)

Pour un franchisé de distribution, la question du sort des stocks restants à la fin du contrat est cruciale. À défaut de clause spécifique, le franchiseur n’est généralement pas tenu de les reprendre. Il est donc judicieux pour le franchisé de négocier une clause obligeant le franchiseur à racheter les stocks invendus (souvent à certaines conditions : état neuf, prix d’achat décoté…). Cela limite les pertes financières en fin de partenariat.

En conclusion, le franchiseur n’est pas seulement un concédant de droits, il est un partenaire débiteur d’obligations substantielles et continues. La bonne exécution de ces obligations est la condition de la réussite du réseau et de la pérennité des entreprises franchisées.

Si vous estimez que votre franchiseur ne respecte pas ses engagements contractuels ou légaux, n’hésitez pas à contacter notre cabinet pour discuter de vos options et des actions envisageables. Forts de notre expertise en droit commercial, nous sommes à votre disposition pour vous conseiller.

Sources

  • Code civil, notamment article 1104 (Bonne foi), 1194 (Suites du contrat).
  • Code de commerce.
  • Jurisprudence de la Cour de cassation et des cours d’appel relative aux obligations du franchiseur (savoir-faire, assistance, marque, exclusivité, ventes en ligne, égalité de traitement…).

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