Le commissaire de justice exerce bien plus de missions que celles pour lesquelles on le connaît habituellement. Pour mieux appréhender la richesse de ses attributions, il convient de se pencher sur la création de cette profession, née de la fusion des huissiers de justice et des commissaires-priseurs. Derrière l’image du professionnel qui signifie des actes et exécute des décisions, se cache un expert qui peut intervenir dans divers domaines sans bénéficier d’un monopole. Ces compétences élargies, souvent ignorées, méritent d’être explorées.
Le recouvrement amiable et judiciaire
Le commissaire de justice peut procéder au recouvrement amiable ou judiciaire de toutes créances (article 1er, II, 1° de l’ordonnance n°2016-728 du 2 juin 2016). Cette activité n’est pas monopolistique et peut être exercée sur tout le territoire national.
Contrairement aux sociétés de recouvrement, le commissaire de justice n’a pas besoin d’un mandat spécial pour encaisser. L’article 28 du décret n°2021-1625 du 10 décembre 2021 précise que la remise des pièces vaut mandat d’encaisser.
Sa rémunération s’effectue par honoraires, définis dans une convention écrite précisant leur montant ou mode de détermination (article L.444-1, alinéa 3 du Code de commerce).
Un avantage considérable pour le créancier: le commissaire de justice peut rapidement passer du recouvrement amiable au recouvrement judiciaire si nécessaire. Et maintenant, il dispose même d’une procédure simplifiée pour les petites créances.
La procédure simplifiée de recouvrement des petites créances
Cette procédure, monopole du commissaire de justice (article 1er, 7° de l’ordonnance n°2016-728), permet d’obtenir un titre exécutoire sans passer par un juge.
Elle s’applique aux créances:
- Inférieures ou égales à 5 000 € en principal et intérêts
- À cause contractuelle ou résultant d’une obligation statutaire
Le débiteur reste actif dans cette procédure. S’il accepte de participer et qu’un accord est trouvé dans le délai d’un mois, le commissaire de justice délivre un titre exécutoire immédiatement opposable.
Un moyen rapide et économique d’obtenir un titre exécutoire – mais uniquement si le débiteur coopère.
Les constatations et expertises
Le commissaire de justice peut effectuer des constatations purement matérielles à la demande de particuliers ou sur commission du juge (article 1er, II, 2° de l’ordonnance n°2016-728).
Les constats à la requête de particuliers
Ces constats constituent des preuves de choix. Ils sont établis par un officier public qui doit rester neutre dans ses observations.
Le constat bénéficie d’une présomption simple de vérité: « Sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, ces constatations font foi jusqu’à preuve contraire » (article 1er de l’ordonnance n°2016-728).
Le commissaire de justice peut dresser ces constats:
- Dans un lieu public sans restriction
- Dans un lieu privé avec l’autorisation de l’occupant
- Dans un lieu privé sans autorisation mais avec commission du juge
L’activité peut être déléguée à un clerc habilité aux constats, qui doit signer l’acte contresigné par le commissaire de justice.
Le commissaire de justice comme technicien du juge
Il peut être commis par un juge pour éclairer ce dernier sur une question de fait (article 1er, II, 5° de l’ordonnance n°2016-728). Cette mission peut s’exercer:
- Pendant un procès (articles 232 et suivants du Code de procédure civile)
- Avant tout procès pour préconstituer une preuve (article 145 du Code de procédure civile)
Le commissaire de justice n’est alors pas soumis aux règles de son statut mais agit comme un technicien.
Les autres activités non-monopolistiques
Le commissaire de justice dispose d’un éventail d’activités complémentaires qui peuvent s’avérer précieuses.
Le séquestre conventionnel
Le commissaire de justice peut être désigné séquestre conventionnel (article 1er, II, 4° de l’ordonnance n°2016-728). Il devient alors dépositaire d’une chose contentieuse, chargé de la conserver jusqu’à résolution du litige.
Cette mission, régie par les articles 1956 et suivants du Code civil, peut concerner des meubles ou des immeubles. Le séquestre est établi par convention précisant ses conditions essentielles.
Liquidateur judiciaire pour petites entreprises
Le commissaire de justice peut intervenir comme liquidateur dans les procédures de liquidation judiciaire concernant:
- Des débiteurs n’employant aucun salarié
- Réalisant un chiffre d’affaires annuel hors taxes inférieur ou égal à 100 000 €
Il peut également être désigné assistant du juge dans les procédures de rétablissement professionnel (article 1er, II, 3° de l’ordonnance n°2016-728).
Les activités accessoires
L’article 29 du décret n°2021-1625 du 10 décembre 2021 autorise le commissaire de justice à exercer certaines activités accessoires:
- Administrateur d’immeubles
- Agent d’assurances
- Médiateur judiciaire ou conventionnel
Pour exercer ces activités, il doit informer la chambre régionale dont il relève et le procureur général. Il ne peut faire état de sa qualité professionnelle dans l’exercice de ces activités accessoires, sauf pour la médiation.
Une précision importante: le commissaire de justice ne peut accomplir de médiation mettant en cause des actes d’autres commissaires de justice ou ayant pour objet une procédure d’exécution.
Une stratégie adaptée à chaque situation
Le choix de recourir au commissaire de justice pour ses activités non-monopolistiques dépend de votre situation. Un constat dressé par ce professionnel peut parfois s’avérer déterminant dans un litige. Pour le recouvrement d’une créance, l’éventail de ses compétences peut constituer un atout précieux.
Ne sous-estimez pas l’expertise juridique nécessaire pour déterminer la stratégie optimale. Notre cabinet d’avocats peut évaluer votre dossier et vous orienter vers les professionnels les plus adaptés, en optimisant votre stratégie en fonction des activités non-monopolistiques du commissaire de justice. Prenez rendez-vous pour une consultation et bénéficiez de conseils personnalisés.
Sources
- Ordonnance n°2016-728 du 2 juin 2016 relative au statut de commissaire de justice, article 1er
- Décret n°2021-1625 du 10 décembre 2021 relatif aux compétences des commissaires de justice, articles 28 et 29
- Code de commerce, article L.444-1
- Code de procédure civile, articles 145 et 232 et suivants
- Code civil, articles 1956 et suivants
- Décret n°2019-1185 du 15 novembre 2019 relatif à la formation professionnelle des commissaires de justice, article 37