a close up of a yellow and black sign with numbers

L’opposition en justice : qui peut la former et comment ?

Table des matières

Lors d’un procès, il arrive qu’une décision soit rendue alors qu’une partie n’a pu faire entendre sa voix. En droit, cette situation ouvre la possibilité de former « opposition » – une voie de recours spécifique et strictement encadrée. Qui peut l’exercer et sous quelles conditions ? Décryptage.

1. Qui peut former opposition ?

Une action réservée à la partie défaillante

L’article 571 du Code de procédure civile définit clairement : seule la partie défaillante à l’instance peut former opposition. Cette voie est exclusive, on parle d’une « action attitrée ».

« L’opposition n’est ouverte qu’au défaillant » (article 571, alinéa 2 du Code de procédure civile)

Cette restriction logique s’explique : l’opposition vise à restaurer le contradictoire pour celui qui n’a pu s’exprimer lors du premier jugement.

Transmission possible du droit d’opposition

Bien que strictement personnelle, cette action peut être transmise dans certains cas :

  • Aux représentants légaux
  • Aux ayants cause à titre universel
  • Aux créanciers agissant par action oblique (article 1166 du Code civil)

Un point souvent méconnu : l’article 534 du Code de procédure civile permet aux représentants légaux d’une partie de former opposition en leur nom propre après cessation de leurs fonctions, s’ils y ont un intérêt personnel.

Ce que ne peut pas faire le demandeur initial

Le demandeur débouté partiellement de sa demande ne peut utiliser l’opposition pour soumettre à nouveau sa demande. La jurisprudence est claire : cette restriction ne joue que si les chefs de demande sont nettement dissociés (Civ. 2e, 17 novembre 1993, n°91-20.186).

2. L’intérêt et la capacité à agir

Un intérêt né et actuel

Pas d’action sans intérêt – cette maxime s’applique pleinement à l’opposition. Le défaillant doit prouver un grief né de la décision rendue par défaut.

Point important : le simple fait qu’une décision ait été rendue par défaut ne constitue pas automatiquement un grief. Une condamnation, même partielle, doit exister.

La capacité juridique

Comme pour toute action en justice, l’opposant doit avoir capacité juridique pour agir. Les règles de droit commun s’appliquent ici sans particularité notable.

Détail pratique : les représentants (ayants cause universels ou à titre universel) peuvent former opposition pour le défaillant dans les mêmes conditions que lui.

3. Les délais pour former opposition

Le principe : un mois à compter de la notification

L’article 538 du Code de procédure civile fixe un délai d’un mois en matière contentieuse. Ce délai court à partir de la notification du jugement par défaut (article 528 CPC).

Le calcul s’effectue selon les règles classiques des articles 640 et suivants du Code de procédure civile, incluant les adaptations pour les délais de distance.

Un piège à éviter : ne pas confondre avec le délai de pourvoi. La jurisprudence précise que le pourvoi contre un jugement par défaut n’est recevable qu’une fois le délai d’opposition expiré (Com. 25 juin 1991, n°89-18.560).

L’incidence critique de l’article 478 CPC

Une règle souvent négligée : les jugements rendus par défaut doivent être notifiés dans les six mois sous peine d’être considérés comme non avenus.

Cette règle offre une échappatoire au défaillant qui n’a pas besoin de former opposition si la notification n’a pas été faite dans ce délai. Il peut simplement saisir le juge de l’exécution si l’exécution du jugement est entreprise.

La demande « tendant à faire déclarer un jugement non avenu a pour objet de lui faire perdre son caractère de titre exécutoire » (Civ. 2e, 16 mai 2013, n°12-15.101)

4. Les exceptions au délai de droit commun

Des délais spécifiques selon les matières

Certaines procédures dérogent au délai d’un mois :

  • En matière de référé : quinze jours (article 490, alinéa 3 CPC)
  • En matière de procédures collectives : dix jours (article R. 661-2 du Code de commerce)

Ces délais spécifiques s’expliquent par la nature urgente de ces procédures.

Le relevé de forclusion

La partie défaillante qui n’a pas eu connaissance du jugement sans faute de sa part peut demander un relevé de forclusion dans l’année suivant la notification (article 540 CPC).

Attention : en cas de notification irrégulière, les juges ne peuvent reprocher à la partie défaillante de ne pas avoir sollicité un relevé de forclusion (Civ. 2e, 3 mai 2007, n°06-10.949).

Cas de changement dans l’état d’une partie

Les articles 531 et 532 du Code de procédure civile prévoient l’interruption du délai d’opposition en cas de :

  • Changement dans la capacité d’une partie à laquelle le jugement avait été notifié
  • Décès de la partie à laquelle le jugement avait été notifié

Dans ces situations, le délai ne recommence à courir qu’après nouvelle notification aux parties ayant qualité pour la recevoir.

Au-delà de ces considérations techniques, l’opposition reste une voie de recours exceptionnelle, désormais limitée par la réduction du nombre de jugements rendus par défaut. La maîtrise de ses conditions d’exercice s’avère essentielle pour tout justiciable souhaitant contester une décision rendue en son absence.

Besoin d’assistance pour contester une décision de justice rendue en votre absence ? Notre cabinet d’avocats vous accompagne dans l’analyse de votre situation et la mise en œuvre des recours appropriés. Un simple appel peut faire la différence entre l’acceptation d’une décision défavorable et la possibilité de faire valoir vos droits.

Sources

  • Code de procédure civile, articles 571 à 578 (opposition), 538 (délai), 528 (point de départ), 534 (représentants légaux), 540 (relevé de forclusion)
  • Code civil, article 1166 (action oblique)
  • Civ. 2e, 17 novembre 1993, n°91-20.186, Bull. civ. II, n°326
  • Com. 25 juin 1991, n°89-18.560, Bull. civ. IV, n°230
  • Civ. 2e, 16 mai 2013, n°12-15.101, Bull. civ. II
  • Civ. 2e, 3 mai 2007, n°06-10.949, Bull. civ. II, n°119
  • Marie-Emma BOURSIER, Élisabeth BOTREL, « Opposition », Répertoire de procédure civile, Dalloz, mars 2014

Vous souhaitez échanger ?

Notre équipe est à votre disposition et s’engage à vous répondre sous 24 à 48 heures.

07 45 89 90 90

Vous êtes avocat ?

Consultez notre offre éditoriale dédiée.

Dossiers

> La pratique de la saisie immobilière> Les axes de défense en matière de saisie immobilière

Formations professionnelles

> Catalogue> Programme

Poursuivre la lecture

fr_FRFR