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Micro-PAC : une procédure simplifiée pour les pratiques anticoncurrentielles de faible ampleur

Table des matières

Lorsqu’on évoque le droit de la concurrence, on pense souvent aux grandes affaires traitées par l’Autorité de la concurrence, impliquant des entreprises nationales ou internationales et des sanctions potentiellement très élevées. Pourtant, le tissu économique est aussi composé de nombreuses petites et moyennes entreprises (PME) dont les activités, bien que plus locales ou modestes, ne sont pas à l’abri des règles de concurrence. Une entente sur les prix entre artisans locaux ou un abus de position dominante sur un marché très spécifique peuvent aussi fausser le jeu concurrentiel.

Conscient que la procédure classique devant l’Autorité peut s’avérer lourde et disproportionnée pour ces cas de figure, le législateur a mis en place une procédure alternative et allégée pour les pratiques dites de « faible importance » ou « micro-pratiques anticoncurrentielles » (Micro-PAC). Cette procédure spécifique, gérée directement par le ministre chargé de l’économie (via les services de la DGCCRF), offre une voie de résolution potentiellement plus rapide et moins coûteuse, avec des sanctions plafonnées. Cet article vous explique quand et comment elle s’applique.

Qu’est-ce qu’une « micro-pratique anticoncurrentielle » (Micro-PAC) ?

Pour qu’une affaire puisse être traitée via cette procédure dérogatoire prévue à l’article L. 464-9 du code de commerce, deux conditions cumulatives doivent être remplies :

  1. Une dimension purement nationale (voire locale) : La pratique en cause ne doit pas être susceptible d’affecter le commerce entre les États membres de l’Union européenne. Elle ne doit donc pas relever du champ d’application des articles 101 ou 102 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE). Concrètement, cela vise les pratiques dont les effets sont confinés au territoire français, et souvent à une échelle géographique limitée (régionale, départementale, locale).
  2. Des acteurs économiques de taille limitée : Des seuils de chiffre d’affaires stricts doivent être respectés. En prenant en compte le dernier exercice clos :
    • Le chiffre d’affaires réalisé en France par chacune des entreprises ou organismes impliqués dans la pratique ne doit pas dépasser 50 millions d’euros.
    • Le chiffre d’affaires cumulé réalisé en France par l’ensemble des entreprises ou organismes concernés ne doit pas dépasser 200 millions d’euros.

Si l’une de ces conditions n’est pas remplie (par exemple, si la pratique a un impact transfrontalier potentiel, même faible, ou si une seule des entreprises dépasse le seuil de 50 M€), l’affaire relève de la compétence de l’Autorité de la concurrence et ne peut pas être traitée via la procédure ministérielle des Micro-PAC. Ces critères rendent ce dispositif particulièrement adapté aux situations impliquant des PME, des artisans, des commerçants indépendants ou des professions libérales dont l’activité est principalement locale ou régionale.

Comment fonctionne la procédure ministérielle ?

La procédure pour les Micro-PAC est distincte de celle devant l’Autorité. Elle est menée par l’administration, sous l’autorité du ministre chargé de l’économie, représenté en pratique par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).

  • L’enquête initiale : Tout commence généralement par une enquête menée par les services de la DGCCRF (souvent les directions départementales ou régionales), qui peuvent agir suite à une plainte locale, à des signalements ou sur leur propre initiative s’ils détectent des indices de pratiques anticoncurrentielles (entente locale sur les prix, répartition de clientèle entre artisans, etc.).
  • La communication ministérielle : Si l’enquête de la DGCCRF établit des faits susceptibles de constituer une Micro-PAC (remplissant les conditions de seuils et de non-affectation du commerce intra-UE), le ministre (ou ses services délégués) adresse une communication formelle aux entreprises concernées. Ce document s’apparente à une sorte de « notification de griefs simplifiée ». Il contient typiquement :
    • Le rapport d’enquête de la DGCCRF détaillant les faits constatés.
    • La qualification juridique envisagée (par exemple, entente illicite au sens de l’article L. 420-1 du code de commerce).
    • Les mesures que l’administration propose : il peut s’agir d’une injonction de cesser la pratique et/ou d’une proposition de transaction financière.
  • Les droits de l’entreprise : À réception de cette communication, l’entreprise dispose de garanties procédurales :
    • Elle peut consulter le dossier d’enquête détenu par l’administration (dans le respect du secret des affaires des autres entreprises éventuellement impliquées).
    • Elle dispose d’un délai de deux mois pour présenter ses observations écrites en réponse. Ce délai peut être prolongé par l’administration pour une durée maximale de deux mois supplémentaires si les circonstances le justifient.
    • Elle a le droit de se faire assister par un avocat tout au long de cette phase.
  • La décision du ministre : Après avoir examiné les observations éventuelles de l’entreprise, l’administration (agissant au nom du ministre) prend une décision finale. Elle peut :
    • Classer l’affaire si elle estime que les faits ne sont pas établis ou ne constituent pas une infraction.
    • Confirmer son intention de poursuivre et notifier à l’entreprise une décision lui enjoignant de mettre fin à la pratique dans un délai donné et/ou lui proposant une transaction financière (dont le montant est fixé).
  • L’acceptation ou le refus par l’entreprise : L’entreprise dispose alors d’un délai d’un mois à compter de la notification de cette décision pour accepter formellement l’injonction et/ou la transaction. Attention : l’absence de réponse dans ce délai est considérée comme un refus. L’acceptation doit être explicite.

Quels sont les avantages et les conséquences de cette procédure ?

Opter pour l’acceptation de la proposition ministérielle dans le cadre d’une Micro-PAC présente un avantage majeur, mais le refus ou l’inexécution a des conséquences importantes.

  • En cas d’acceptation :
    • Plafonnement de la sanction : C’est l’attrait principal. Si l’entreprise accepte la transaction proposée, le montant qu’elle devra payer est obligatoirement plafonné. Il ne peut excéder 150 000 euros OU 5% du dernier chiffre d’affaires connu réalisé en France, la valeur la plus faible étant retenue. Ce plafond est considérablement inférieur aux sanctions que peut prononcer l’Autorité de la concurrence (jusqu’à 10% du chiffre d’affaires mondial).
    • Clôture définitive de l’affaire : Si l’entreprise respecte l’injonction dans le délai imparti et paie le montant de la transaction convenue, l’action publique est éteinte pour ces faits. L’Autorité de la concurrence ne pourra plus être saisie ou se saisir d’office pour la même pratique. L’affaire est définitivement close sur le plan administratif.
    • Rapidité et simplicité : La procédure est généralement plus rapide et moins formaliste qu’une instruction complète devant l’Autorité.
  • En cas de refus ou d’inexécution :
    • Saisine obligatoire de l’Autorité : Si l’entreprise refuse la proposition du ministre (explicitement ou par son silence) ou si, après avoir accepté, elle ne respecte pas l’injonction ou ne paie pas la transaction dans les délais, le ministre a l’obligation de saisir l’Autorité de la concurrence.
    • Retour à la procédure classique : L’affaire est alors instruite par l’Autorité selon les règles habituelles. L’entreprise perd le bénéfice du plafond de sanction réduit. Elle s’expose alors aux sanctions potentiellement beaucoup plus lourdes que peut infliger l’Autorité, sans préjudice des injonctions que celle-ci pourrait également prononcer. Le « pari » du refus peut donc s’avérer coûteux si l’infraction est finalement confirmée par l’Autorité.

Articulation avec les procédures de l’Autorité

Il est utile de comprendre comment cette procédure ministérielle s’insère dans le paysage global de la régulation de la concurrence. L’Autorité de la concurrence et les services du ministre (DGCCRF) collaborent.

L’Autorité est informée des enquêtes menées par la DGCCRF susceptibles de relever de cette procédure. Inversement, l’Autorité de la concurrence, lorsqu’elle est saisie directement d’une plainte, peut décider de ne pas l’instruire elle-même si elle constate que les faits relèvent potentiellement de la procédure des Micro-PAC. Dans ce cas, elle peut rejeter la saisine en invitant le plaignant à s’adresser aux services du ministre (DGCCRF), comme le prévoit l’article L. 462-8 du code de commerce. Il y a donc une forme de « guichet unique » initial, mais avec une orientation possible vers la procédure la plus adaptée à la dimension de l’affaire.

Quand la procédure Micro-PAC est-elle pertinente ?

Cette procédure trouve tout son sens dans des situations précises :

  • Des ententes ou pratiques mises en œuvre par des entreprises de petite ou moyenne taille.
  • Des pratiques ayant un impact géographique limité (marché local, régional).
  • Des situations où les chiffres d’affaires des entreprises concernées sont clairement en dessous des seuils légaux (50 M€ individuels / 200 M€ cumulés en France).
  • Des cas où l’affectation du commerce entre États membres de l’UE peut être raisonnablement écartée.

Pour une entreprise remplissant ces critères, accepter la procédure ministérielle peut être une stratégie avantageuse pour obtenir une résolution rapide, moins coûteuse en frais de procédure, et surtout avec une sanction financière plafonnée et prévisible, évitant ainsi l’aléa d’une procédure plus lourde devant l’Autorité. La publication de ces décisions sur le site de la DGCCRF assure une certaine transparence sur l’application de ce dispositif.


Votre entreprise est une PME et vous suspectez être impliqué dans une pratique qui pourrait relever de ce dispositif Micro-PAC, ou vous êtes visé par une enquête de la DGCCRF sur ce fondement ? Il est important de bien comprendre les enjeux et les options. Notre cabinet peut vous apporter son expertise pour analyser votre situation au regard des critères des Micro-PAC et vous conseiller sur la meilleure stratégie à adopter face à la proposition éventuelle du ministre.

Sources

  • Code de commerce : article L. 464-9 (procédure Micro-PAC), article L. 462-8 alinéa 3 (possibilité de rejet par l’Autorité), article L. 450-5 (information de l’Autorité sur les enquêtes ministérielles), articles R. 464-9-1 à R. 464-9-3 (détails réglementaires de la procédure).
  • Site de la DGCCRF (pour la publication des décisions de transaction/injonction Micro-PAC).

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