Société de gestion de portefeuille et dépositaire en titrisation : statut, fonctions et responsabilités légales

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Dans le montage d’une opération de titrisation, la robustesse du cadre juridique et la clarté des rôles sont essentielles pour sécuriser l’investissement et garantir la confiance des marchés. Cette mécanique financière, bien que puissante, repose sur l’intervention coordonnée d’acteurs aux fonctions bien définies et strictement encadrées. Parmi eux, la société de gestion de portefeuille et l’établissement dépositaire forment un tandem opérationnel dont la fiabilité conditionne le succès de l’ensemble. Comprendre leur statut, leurs missions respectives et leurs responsabilités est donc fondamental pour toute partie prenante. Notre cabinet, dédié au droit bancaire et financier, observe que la méconnaissance de ces rouages peut conduire à des risques juridiques et financiers importants. Cet article a pour but de détailler les prérogatives et les obligations de ces deux piliers, en s’appuyant sur le cadre juridique qui régit les organismes de titrisation en France. Pour une vision d’ensemble, il est utile de se référer à notre présentation générale sur les acteurs d’une opération de titrisation.

La société de gestion de portefeuille (sgp) : pilier de l’opération de titrisation

La société de gestion de portefeuille (SGP) est bien plus qu’un simple administrateur ; elle est le véritable chef d’orchestre de l’organisme de titrisation. Son rôle a connu une évolution notable, notamment depuis l’ordonnance du 4 octobre 2017 qui a clarifié et renforcé sa position centrale, en particulier dans la constitution des fonds communs de titrisation.

Statut de la sgp : prestataire de service d’investissement agréé par l’amf

Pour exercer ses fonctions, une SGP doit impérativement obtenir le statut de prestataire de service d’investissement (PSI). Ce statut n’est accordé qu’à l’issue d’une procédure d’agrément rigoureuse menée par l’Autorité des marchés financiers (AMF). L’AMF procède à une vérification approfondie de plusieurs critères afin de garantir une gestion saine et prudente. La société doit d’abord justifier de son siège social et de sa direction effective en France. Elle doit également disposer d’un capital initial et de moyens financiers jugés suffisants et adaptés à son programme d’activité.

L’AMF examine également de près l’actionnariat. L’identité des actionnaires, qu’ils soient directs ou indirects, détenant une participation qualifiée doit être communiquée, et leur qualité est appréciée pour s’assurer qu’ils ne feront pas obstacle à une gestion prudente. La gouvernance est un autre point d’attention. La direction effective de la SGP doit être assurée par deux personnes au minimum, dont l’honorabilité et l’expérience doivent être adéquates. Ce n’est qu’à l’issue de ces contrôles que l’agrément est délivré, parfois assorti de conditions particulières visant à préserver l’équilibre financier de la structure.

Fonctions de la sgp : constitution, gestion et représentation de l’organisme

Les missions de la société de gestion de portefeuille sont triples et couvrent l’intégralité du cycle de vie de l’organisme de titrisation. Premièrement, la SGP est à l’initiative de la constitution du fonds commun de titrisation (FCT). C’est une évolution majeure, car le régime antérieur imposait une co-fondation avec l’établissement dépositaire. Le droit positif consacre désormais un principe de « monofondation » : la SGP (ou, dans certains cas, le sponsor de l’opération) est seule responsable de la création du fonds, ce qui clarifie les responsabilités dès l’origine.

Deuxièmement, elle assure la gestion de l’organisme, qu’il s’agisse d’un FCT ou d’une société de titrisation. Cette gestion est complète et s’étend aux aspects juridiques, financiers et comptables. La SGP est responsable de l’émission des titres, du calcul des coupons, du suivi des critères d’éligibilité des créances et de l’établissement des rapports de gestion et des documents comptables. Son rôle inclut également le suivi des actifs sous-jacents, ce qui peut impliquer des actions liées au recouvrement des créances titrisées.

Enfin, la SGP représente l’organisme de titrisation à l’égard des tiers et dans toute action en justice. Elle agit en vertu d’un mandat légal particulier. La nature de cette représentation est singulière, notamment pour les FCT qui sont dénués de personnalité morale. La SGP agit donc pour le compte de la copropriété formée par les porteurs de parts, sans que ces derniers puissent être considérés comme des mandants au sens classique du droit civil.

L’établissement dépositaire : garant de la sécurité et de la régularité

Si la SGP est le moteur de l’opération, l’établissement dépositaire en est le gardien. Son rôle est essentiel pour assurer la protection des actifs de l’organisme et contrôler la régularité des opérations menées par la société de gestion. Son indépendance est la clé de voûte de sa fonction.

Statut de l’établissement dépositaire : établissements autorisés et compatibilité

Ne peut être dépositaire qu’une entité répondant à des critères stricts. Il s’agit principalement des établissements de crédit établis dans un État de l’Espace économique européen. Le ministre chargé de l’Économie peut également autoriser d’autres entités, comme la Banque de France ou la Caisse des dépôts et consignations, à exercer cette fonction. Pour prévenir tout conflit d’intérêts, la loi pose une règle d’incompatibilité fondamentale : une même entité ne peut cumuler les fonctions de société de gestion et de dépositaire pour un même organisme de titrisation. Cette séparation garantit l’impartialité du contrôle exercé par le dépositaire.

Fonctions du dépositaire : garde des actifs et contrôle

Le dépositaire assume une double mission. Sa première fonction est la garde des actifs de l’organisme. Cette garde recouvre plusieurs réalités. Il assure la conservation des instruments financiers, que ce soit par inscription dans ses livres ou par détention physique. Il détient également les actes juridiques matérialisant les créances, comme les bordereaux de cession, et tient le registre de ces créances. Il procède par sondage à la vérification de leur existence. Pour les autres actifs, il tient un registre et contrôle leur réalité. Si la garde des instruments financiers peut être déléguée à un tiers, celle des actes de créance peut être confiée, sous la responsabilité du dépositaire, au cédant ou à l’entité chargée du recouvrement.

Sa seconde fonction est celle du contrôle. Le dépositaire s’assure de la régularité des décisions prises par la société de gestion, un contrôle qui s’effectue a posteriori et porte sur le respect des dispositions légales, réglementaires et statutaires. Il est également chargé du suivi des flux de liquidités de l’organisme. Il veille notamment à ce que tous les paiements effectués par les investisseurs lors de la souscription des titres aient bien été reçus et correctement comptabilisés.

Responsabilité du dépositaire : un régime strict mais des cas d’exonération

La responsabilité du dépositaire est engagée directement à l’égard des porteurs de parts ou d’actions de l’organisme. Le régime est particulièrement strict en ce qui concerne la perte d’instruments financiers confiés à sa garde. En cas de perte par lui-même ou par un tiers auquel il a délégué la conservation, il est tenu de restituer sans délai des instruments financiers de type identique ou la somme correspondante. Il ne peut s’exonérer de cette responsabilité qu’en prouvant que la perte résulte d’un événement extérieur, présentant des caractères imprévisibles et irrésistibles, dont les conséquences n’auraient pu être évitées malgré tous les efforts raisonnables.

Toutefois, en cas de délégation de la garde des actifs, le dépositaire peut être déchargé de sa responsabilité sous trois conditions cumulatives très précises. Il doit premièrement prouver que toutes les obligations légales concernant la délégation ont été remplies. Deuxièmement, un contrat écrit doit exister avec le tiers, transférant expressément la responsabilité à ce dernier et permettant à l’organisme de titrisation d’agir directement contre lui. Troisièmement, un contrat écrit entre le dépositaire et l’organisme (ou sa SGP) doit autoriser expressément cette décharge de responsabilité pour des raisons objectives.

Solent avocats : votre conseil pour le cadre légal des acteurs de la titrisation

La structuration d’une opération de titrisation repose sur un équilibre complexe entre la performance recherchée et la sécurité juridique. Les rôles et responsabilités de la société de gestion de portefeuille et du dépositaire sont définis par un cadre réglementaire dense, dont chaque détail a son importance. Une défaillance dans le respect de ces obligations peut avoir des conséquences significatives pour l’ensemble des parties prenantes. Notre cabinet, fort de sa pratique en droit bancaire et financier, accompagne les acteurs de ces montages pour sécuriser leurs opérations et défendre leurs intérêts. Pour une analyse de votre situation, contactez notre équipe.

Sources

  • Code monétaire et financier
  • Code de commerce

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