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Vérification des créances, arrêt des intérêts et des inscriptions : les suites de la déclaration

Table des matières

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Avoir déclaré votre créance dans les délais, comme expliqué dans notre précédent article, est une étape cruciale lorsque votre débiteur fait l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire). Cependant, le processus ne s’arrête pas là. Votre créance va maintenant être examinée, et d’autres conséquences importantes de l’ouverture de la procédure vont affecter vos droits.

Il est essentiel de comprendre comment votre créance va être vérifiée et potentiellement admise, mais aussi de connaître d’autres règles clés qui viennent « geler » certains aspects de votre relation avec le débiteur : l’arrêt du cours des intérêts et l’interdiction de prendre de nouvelles garanties sur ses biens. Maîtriser ces points vous permettra de mieux suivre le déroulement de la procédure et d’anticiper le sort de votre créance.

Comment votre créance est-elle vérifiée et admise ?

La déclaration que vous avez envoyée n’est pas une simple formalité administrative. Elle initie un processus contradictoire de vérification, orchestré par le mandataire judiciaire (ou le liquidateur), sous le contrôle du juge-commissaire. L’objectif est d’établir de manière fiable le passif de l’entreprise, c’est-à-dire l’ensemble de ses dettes.

Le rôle central du mandataire judiciaire (ou liquidateur)

C’est lui qui reçoit toutes les déclarations de créances. Sa mission, définie notamment par l’article L. 624-1 du Code de commerce, est d’examiner chacune d’elles. Il vérifie la régularité de la déclaration (délais, forme, pouvoir du déclarant), l’existence de la créance, son montant, et la validité des éventuelles garanties (privilèges, hypothèques…) invoquées.

Pour ce faire, il s’appuie sur les documents que vous avez fournis mais aussi sur la comptabilité et les informations transmises par le débiteur. Il peut vous demander des justificatifs complémentaires si nécessaire.

La procédure de vérification

Le mandataire ou le liquidateur travaille en collaboration avec le débiteur. Celui-ci est consulté sur chaque créance déclarée et doit donner son avis : reconnaît-il la dette ? La conteste-t-il en partie ou en totalité ? Ses observations sont importantes.

Le mandataire établit ensuite une liste des créances déclarées, en indiquant pour chacune sa proposition : admission (et pour quel montant/nature), rejet, ou éventuellement renvoi si une contestation sérieuse existe ou si une instance judiciaire était déjà en cours avant l’ouverture de la procédure.

Il faut savoir qu’en cas de liquidation judiciaire, surtout si elle est « simplifiée » (pour les petites entreprises sans immobilier et avec peu de salariés), la vérification peut être allégée. Le liquidateur peut ne vérifier que les créances susceptibles d’être payées compte tenu des actifs disponibles (essentiellement les créances privilégiées et les créances salariales), comme le prévoient les articles L. 641-4 et L. 644-3 du Code de commerce. Les créances chirographaires (sans garantie) risquent alors de ne pas être vérifiées si les fonds s’annoncent insuffisants.

Si votre créance est contestée par le mandataire

Si le mandataire judiciaire (ou le liquidateur) a un doute sur votre créance ou si le débiteur la conteste, il doit vous en informer par lettre recommandée avec accusé de réception. Cette lettre doit expliquer précisément les raisons de la contestation (montant, existence même de la dette, validité de la garantie…).

Vous disposez alors d’un délai strict de trente jours à compter de la réception de ce courrier pour répondre, argumenter et fournir d’éventuels éléments complémentaires. Attention : l’article L. 622-27 du Code de commerce est formel. Si vous ne répondez pas dans ce délai, vous serez présumé avoir accepté la proposition du mandataire (par exemple, un rejet ou une admission pour un montant inférieur). Vous ne pourrez plus contester la décision du juge-commissaire si elle entérine cette proposition. Il est donc impératif de réagir à toute contestation.

La décision finale du juge-commissaire

C’est le juge-commissaire, magistrat spécialement désigné pour superviser la procédure, qui tranche en dernier ressort sur le sort des créances, au vu des propositions du mandataire et des éventuelles réponses et contestations. Selon l’article L. 624-2 du Code de commerce, il peut prendre plusieurs types de décisions :

  1. Admission : Votre créance est reconnue. La décision précise le montant admis et si elle est chirographaire (sans garantie) ou privilégiée (avec une sûreté). L’admission peut être partielle.
  2. Rejet : Votre créance n’est pas reconnue dans la procédure.
  3. Constat d’une instance en cours : Si un procès concernant cette créance était déjà engagé avant l’ouverture de la procédure, le juge-commissaire sursoit à statuer. Il faudra attendre l’issue de ce procès pour que la créance soit fixée.
  4. Incompétence : Si la contestation soulève une question complexe qui ne relève pas de sa compétence (par exemple, une question relevant du Conseil de Prud’hommes ou d’une juridiction administrative), il invite les parties à saisir le juge compétent.

Contester la décision du juge-commissaire

Si vous n’êtes pas d’accord avec la décision du juge-commissaire (rejet, admission partielle, contestation de votre privilège…), des voies de recours existent, mais les délais sont très courts.

  • Pour les parties (vous, le débiteur, le mandataire judiciaire) : Le recours est porté devant la Cour d’appel si le montant de la créance en principal dépasse le taux de compétence en dernier ressort du tribunal (actuellement 5 000 euros). Sinon, il s’agit d’une « opposition » portée devant le tribunal de la procédure collective lui-même. Dans les deux cas, le délai pour agir est de dix jours à compter de la notification de la décision du juge-commissaire (articles L. 624-3, R. 621-21, R. 661-3 du Code de commerce).
  • Pour les tiers intéressés : D’autres personnes concernées par la procédure (un autre créancier qui conteste l’admission de votre créance, une caution qui s’est engagée pour le débiteur…) peuvent former une « réclamation » contre l’état des créances une fois celui-ci déposé au greffe. Ils disposent d’un délai d’un mois après la publication au BODACC de l’avis de dépôt (articles L. 624-3-1 et R. 624-8 du Code de commerce).

L’importance de l’admission définitive : l’autorité de la chose jugée

Une fois que la décision d’admission (ou de rejet) est devenue définitive (c’est-à-dire qu’elle n’est plus susceptible de recours), elle acquiert l’autorité de la chose jugée. Cela signifie que l’existence, le montant et la nature (privilégiée ou chirographaire) de votre créance sont fixés de manière irrévocable pour la suite de la procédure collective. Il ne sera plus possible de revenir dessus, sauf cas très exceptionnels (fraude, erreur matérielle…).

L’arrêt automatique du cours des intérêts

Une autre conséquence majeure du jugement d’ouverture est le gel des intérêts. L’article L. 622-28 du Code de commerce dispose que le jugement « arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard ou majorations ».

Quel est le principe ?

Dès le jour du jugement d’ouverture, les intérêts cessent de courir sur les dettes nées avant cette date. Cela concerne tous types d’intérêts : ceux prévus dans vos contrats (prêts, délais de paiement…), les intérêts légaux dus en cas de retard, les pénalités contractuelles calculées sous forme d’intérêts…

Quelles créances sont concernées ?

Cette règle s’applique à toutes les créances antérieures, qu’elles soient chirographaires ou garanties par une sûreté, et quelle que soit leur nature (commerciale, civile…).

Quelle est la portée de cet arrêt ?

L’arrêt des intérêts est définitif. Ils ne recommenceront pas à courir, même si un plan de sauvegarde ou de redressement est adopté par la suite. C’est une mesure destinée à ne pas aggraver la situation financière du débiteur et à fixer le montant des dettes.

Cet arrêt bénéficie principalement au débiteur. Attention : il ne profite pas toujours aux cautions ou coobligés qui se sont engagés à ses côtés. Leur situation dépend de la nature de la procédure (sauvegarde, redressement, liquidation) et de leur qualité (personne physique ou morale), un point qui sera abordé plus en détail dans un prochain article.

L’exception importante pour les financements à long terme

Il existe une exception notable à ce principe : les intérêts continuent de courir pour les créances résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an, ainsi que pour les contrats prévoyant un paiement différé d’un an ou plus. Cette mesure vise à ne pas pénaliser les financements à moyen et long terme essentiels à l’économie.

Si vous êtes dans ce cas (par exemple, une banque ayant consenti un prêt sur plusieurs années), vous devez calculer les intérêts qui continuent à courir après le jugement d’ouverture et les inclure dans votre déclaration de créance (en précisant bien le mode de calcul).

L’interdiction de prendre de nouvelles garanties (inscriptions)

Le jugement d’ouverture a également pour effet de figer la situation des garanties existantes. L’article L. 622-30 du Code de commerce est clair : « Les hypothèques, gages, nantissements et privilèges ne peuvent plus être inscrits postérieurement au jugement d’ouverture. »

Quel est le principe ?

Après la date du jugement d’ouverture, il est interdit de prendre une nouvelle inscription pour garantir une créance antérieure sur les biens du débiteur. Si vous aviez une créance non garantie, vous ne pouvez plus obtenir une hypothèque ou un nantissement après l’ouverture de la procédure. Si vous aviez une garantie mais que vous aviez omis de l’inscrire (par exemple, un privilège de vendeur d’immeuble), il est trop tard.

L’objectif est d’éviter qu’un créancier n’améliore sa position au détriment des autres après l’ouverture de la procédure, et de fixer le classement entre créanciers privilégiés.

Ce qui reste possible ou exceptionnel

Cette interdiction ne vise que les nouvelles inscriptions. Elle n’empêche pas :

  • Le renouvellement d’une inscription existante : Si vous aviez une hypothèque ou un nantissement qui arrive à expiration, vous devez impérativement la renouveler avant sa péremption, même après le jugement d’ouverture, pour conserver votre garantie.
  • L’inscription définitive après une inscription provisoire : Si vous aviez obtenu et inscrit une hypothèque judiciaire conservatoire avant le début de la période suspecte, vous pourrez prendre l’inscription définitive une fois votre créance admise.

Il existe aussi deux exceptions légales très limitées :

  • Le Trésor Public peut parfois inscrire son privilège après le jugement si les délais légaux pour le faire n’étaient pas encore expirés.
  • Le vendeur d’un fonds de commerce dispose également d’un court délai après la vente pour inscrire son privilège, et peut le faire même si l’acheteur est mis en procédure collective entre-temps.

En dehors de ces cas, la règle est l’impossibilité de créer de nouvelles sûretés publiées après le jugement d’ouverture pour garantir des dettes antérieures.

La vérification du passif, l’arrêt des intérêts et l’interdiction des inscriptions sont des mécanismes complexes mais essentiels du droit des entreprises en difficulté. Ils visent à organiser la procédure de manière ordonnée et équitable, tout en tentant de préserver les chances de redressement de l’entreprise. Pour vous, créancier, comprendre ces règles est indispensable pour suivre efficacement le traitement de votre créance. Naviguer dans les méandres de la vérification du passif et comprendre l’impact précis de ces règles sur votre situation demande souvent une expertise juridique pointue. Notre cabinet peut vous assister dans ces démarches pour optimiser la reconnaissance de vos droits. Prenez contact avec nous pour une analyse personnalisée.

Sources

  • Code de commerce, notamment articles L. 622-27, L. 622-28, L. 622-30, L. 624-1, L. 624-2, L. 624-3, L. 624-3-1, L. 641-4, L. 644-3, R. 621-21, R. 624-1 et suivants, R. 624-8, R. 661-3.

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