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Conclusion et validité du contrat de location financière : points de vigilance

Table des matières

La conclusion d’un contrat de location financière requiert une attention particulière. Cette technique, prisée par de nombreuses entreprises pour son impact positif sur la trésorerie, implique des engagements juridiques significatifs. Le contrat formalise une relation triangulaire entre locataire, bailleur et fournisseur. Sa validité repose sur des conditions spécifiques que les parties doivent maîtriser pour sécuriser leur engagement.

Le contentieux abondant en la matière témoigne des difficultés pratiques rencontrées. Les tribunaux sont régulièrement saisis de questions relatives aux vices du consentement, à l’application du droit de la consommation ou encore aux garanties exigées. Chaque étape de la formation du contrat mérite donc une vigilance accrue.

Les conditions de validité spécifiques

Le contrat de location financière obéit en premier lieu aux règles classiques du droit commun. L’article 1128 du code civil exige le consentement des parties, leur capacité à contracter et un contenu licite et certain. Ces conditions fondamentales s’appliquent pleinement à la location financière, comme l’a rappelé la cour d’appel de Paris dans son arrêt du 21 avril 2023.

Le consentement constitue un enjeu majeur. Il doit être libre et éclairé, exempt de tout vice. Dans la pratique, les locataires tentent parfois d’invoquer l’erreur pour échapper à leurs obligations. Cette stratégie s’avère souvent infructueuse lorsque le contrat expose clairement les engagements pris. La cour d’appel de Douai a ainsi jugé, le 26 janvier 2023, qu’un locataire ne pouvait prétendre avoir commis une erreur quand ses obligations étaient explicitement détaillées.

Le dol, en revanche, offre parfois une issue. Il est généralement allégué contre le fournisseur plutôt que contre la société de financement. Si la manœuvre dolosive est établie, la nullité du contrat de fourniture peut entraîner la caducité du contrat de location. Un arrêt récent de la Cour de cassation du 19 avril 2023 a précisé que « l’erreur provoquée par le dol d’un tiers entraîne la nullité du contrat lorsqu’elle porte sur la substance de l’engagement ».

L’objet du contrat doit également respecter certaines conditions. Il doit être licite et dans le commerce. Un arrêt de la cour d’appel de Paris du 2 mai 2017 a prononcé l’annulation d’un contrat portant sur un appareil médical dépourvu de certification CE. Dans cette affaire, c’est bien l’illicéité de l’objet qui a fondé l’invalidation du contrat.

Protection du locataire professionnel

Contrairement aux idées reçues, le droit de la consommation peut parfois s’appliquer à la location financière professionnelle. Cette protection résiduelle offre des garanties précieuses au locataire dans certaines circonstances.

L’application du code de la consommation s’observe principalement dans le cadre des contrats conclus « hors établissement ». L’article L. 221-3 étend certaines protections aux contrats entre professionnels lorsque trois conditions cumulatives sont réunies : contrat conclu hors établissement, nombre de salariés du professionnel sollicité inférieur ou égal à cinq, et objet du contrat hors champ de l’activité principale du professionnel.

Les tribunaux adoptent une approche favorable au locataire concernant cette dernière condition. La jurisprudence récente considère qu’un contrat n’entre pas dans le champ de l’activité principale s’il ne correspond pas exactement à celle-ci. Par exemple, la cour d’appel d’Amiens a jugé le 24 janvier 2023 qu’un standard téléphonique, bien qu’utile à une pharmacie, ne relevait pas de son activité principale. De même, un site internet loué par un artisan couvreur a été considéré comme hors champ de son activité principale par la cour d’appel d’Agen le 13 avril 2022.

Une question controversée concerne la qualification de la location financière comme service financier. Certaines sociétés de financement tentent d’échapper au formalisme protecteur en invoquant l’article L. 221-2, 4° du code de la consommation, qui exclut les contrats portant sur les services financiers. La jurisprudence majoritaire rejette cet argument. La cour d’appel de Lyon a clairement affirmé, dans son arrêt du 11 mai 2023, que « la location simple d’un bien mobilier ne peut être considérée comme un service ayant trait à la banque, au crédit, à l’assurance ».

Ces protections offrent des garanties essentielles au locataire, comme un délai de rétractation ou une information précontractuelle renforcée, dont les modalités sont expliquées dans notre article sur l’exécution du contrat de location financière.

Déséquilibre significatif dans les droits et obligations

La question du déséquilibre contractuel mérite attention. Elle peut être abordée sous deux angles : celui du code de commerce et celui du code civil.

L’article L. 442-1, I, 2° du code de commerce sanctionne le fait de « soumettre ou de tenter de soumettre l’autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ». Toutefois, la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 15 janvier 2020, que ce texte ne s’applique pas aux établissements de crédit et sociétés de financement agréés. Cette exclusion limite considérablement la portée de cette protection pour les contrats de location financière conclus avec des sociétés agréées.

Le code civil offre une alternative depuis la réforme du droit des obligations. L’article 1171 répute non écrite, dans un contrat d’adhésion, « toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ». La Cour de cassation a confirmé, dans son arrêt du 26 janvier 2022, que ce texte s’applique aux contrats de location financière, même conclus par des établissements de crédit.

Cependant, tous les déséquilibres ne sont pas sanctionnés. Dans ce même arrêt, la Cour a jugé que l’absence de réciprocité d’une clause résolutoire « se justifie par la nature des obligations auxquelles sont respectivement tenues les parties ». De même, les clauses prévoyant le paiement des loyers à échoir en cas de résiliation anticipée sont généralement validées, comme l’a récemment confirmé la cour d’appel de Colmar le 4 avril 2022.

Pour approfondir les implications pratiques de ces clauses lors de la fin du contrat, notre article sur le dénouement du contrat et les procédures collectives propose une analyse détaillée.

La problématique de la cession de contrat

La location financière connaît deux variantes économiques qui influencent directement la conclusion du contrat.

Dans le premier schéma, la société de financement intervient immédiatement. L’entreprise choisit un bien chez un fournisseur, mais la société de financement l’achète directement et le met à disposition via un contrat de bail.

Le second schéma implique une cession de contrat. L’entreprise conclut initialement le contrat de bail avec le fournisseur. Ce dernier cède ensuite le contrat à une société de financement. Cette configuration, fréquente en pratique, nécessite une attention particulière aux conditions de la cession.

L’article 1216 du code civil, issu de la réforme de 2016, prévoit qu’un contractant peut céder sa qualité de partie au contrat avec l’accord de son cocontractant. Cet accord peut être donné par avance, notamment dans le contrat initial. La cession produit alors effet lors de la notification au cédé ou lorsqu’il en prend acte.

La notification revêt une importance capitale. Selon la Cour de cassation, dans un arrêt du 9 juin 2022, le paiement d’un loyer entre les mains du cessionnaire peut valoir prise d’acte de la cession. En revanche, la cour d’appel de Douai a jugé, le 4 novembre 2021, qu’une simple formule de mandat SEPA signée en blanc ne suffisait pas à établir la notification.

Des clauses spécifiques doivent être prévues pour faciliter cette cession. Elles doivent anticiper l’accord du locataire et définir précisément les modalités de notification, comme expliqué dans notre présentation générale de la location financière.

La mise en garde et les garanties

Le devoir de mise en garde constitue un point de vigilance particulier dans la location financière.

La question se pose de savoir si le bailleur doit alerter le locataire sur les risques de l’opération, notamment sur l’adéquation des loyers à sa capacité financière. La jurisprudence n’est pas unanime sur ce point. Certaines décisions reconnaissent l’existence d’un tel devoir. La cour d’appel de Grenoble, dans un arrêt du 2 décembre 2021, a admis que « le bailleur financier, en sa qualité de professionnel de ce mode de financement, est débiteur à l’égard d’une locataire non avertie d’une obligation de mise en garde ».

D’autres juridictions sont plus réservées. La cour d’appel de Riom a refusé, le 15 mars 2023, d’admettre un tel devoir, considérant que « le mécanisme de la location financière est une opération simple à appréhender dans son ensemble ». Cette divergence jurisprudentielle incite à la prudence.

Les garanties requises par le bailleur méritent également attention. Le cautionnement est souvent exigé pour sécuriser le paiement des loyers. Son régime juridique soulève des questions spécifiques. Le nouvel article 2297 du code civil impose une mention manuscrite spécifique. De même, les articles 2299 et 2300 concernant la mise en garde de la caution et la proportionnalité de l’engagement devraient s’appliquer, bien que la jurisprudence reste à confirmer sur ce point.

Pour sécuriser vos contrats de location financière et bénéficier d’un conseil adapté, nos avocats en contrats commerciaux vous accompagnent dans l’analyse précontractuelle et la négociation des clauses essentielles.

Conclusion

La conclusion d’un contrat de location financière exige une vigilance particulière. Les conditions de validité, l’application éventuelle du droit de la consommation, le risque de déséquilibre contractuel, les modalités de cession et les obligations de mise en garde constituent autant de points d’attention.

Une analyse juridique approfondie s’avère indispensable avant tout engagement. Notre cabinet vous propose un accompagnement personnalisé pour sécuriser vos contrats de location financière et optimiser leur rédaction selon vos besoins spécifiques.

Sources

Code civil, articles 1128 et suivants, 1171, 1216 à 1216-3, 2297 à 2302 Code de la consommation, articles L. 221-2, L. 221-3 et suivants Code de commerce, article L. 442-1 Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2020, n° 18-10.512 Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2022, n° 20-16.782 Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 avril 2023, n° 22-11.097

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