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Dénonciation de saisie-attribution : comment ça marche ?

Table des matières

La saisie-attribution est une procédure de recouvrement forcée redoutable pour le débiteur, qui voit ses créances transférées à son créancier. La dénonciation de cet acte par un commissaire de justice est une étape fondamentale : elle vous informe de la mesure et constitue le point de départ du délai pour la contester. Comprendre son fonctionnement, ses délais et les mentions obligatoires est indispensable pour préserver vos droits et organiser une défense efficace. Une mention manquante ou une dénonciation tardive peut entraîner la nullité ou la caducité de toute la procédure.

Qu’est-ce que la saisie-attribution et son effet attributif immédiat ?

La saisie-attribution est une procédure d’exécution forcée qui permet à un créancier, muni d’un titre exécutoire, de saisir la créance de somme d’argent, liquide et exigible, que son débiteur détient à l’encontre d’une tierce personne. Comme le précise l’article L. 211-1 du Code des procédures civiles d’exécution (CPCE), elle vise les créances de sommes d’argent. Cette procédure met en scène trois acteurs : le créancier saisissant, le débiteur saisi, et le tiers saisi (souvent une banque, mais aussi un locataire, un notaire chargé d’une vente, ou un client du débiteur).

Sa principale caractéristique est son effet attributif immédiat, prévu à l’article L. 211-2 du CPCE. Dès la signification du procès-verbal de saisie au tiers, la propriété de la créance saisie est instantanément transférée au profit du créancier saisissant, à concurrence des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée. Ce mécanisme est crucial : il confère au créancier un droit exclusif sur les fonds, le protégeant du concours d’autres créanciers, même privilégiés, qui se manifesteraient ultérieurement.

L’acte de saisie et sa dénonciation au débiteur : une procédure en deux temps

La procédure de saisie-attribution se déroule en deux temps distincts et successifs, orchestrés par un commissaire de justice (anciennement huissier de justice). Chaque moment de la procédure est soumis à un formalisme strict dont le non-respect peut entraîner des sanctions sévères pour la validité de la mesure.

Les mentions obligatoires de l’acte de saisie (Art. R. 211-1 CPCE)

Dans un premier temps, le commissaire de justice signifie le procès-verbal de saisie directement au tiers saisi. Cet instrument doit contenir, à peine de nullité, plusieurs mentions obligatoires pour informer précisément le tiers de ses obligations. Il s’agit notamment de :

  • L’identification complète du créancier et du débiteur (nom, dénomination sociale, domicile ou siège social).
  • L’énonciation du titre exécutoire qui fonde la poursuite (jugement, ordonnance, acte notarié…).
  • Le décompte détaillé des sommes réclamées pour le recouvrement de la dette (principal, frais, et intérêts échus), ainsi qu’une provision pour les intérêts à échoir.
  • La défense faite au tiers saisi de payer les sommes dues au débiteur, sous peine de devoir payer une seconde fois.
  • L’indication que le tiers saisi est personnellement tenu envers le créancier saisissant.

Pour une analyse détaillée du formalisme de la procédure, consultez notre article sur la procédure de saisie-attribution, ses étapes et son formalisme.

La dénonciation au débiteur : un délai impératif de 8 jours

Dans un second temps, le commissaire de justice doit informer le débiteur de la saisie pratiquée. C’est l’acte de dénonciation. Selon l’article R. 211-3 du CPCE, cette dénonciation doit être signifiée au débiteur dans un délai de 8 jours suivant la signification de la saisie au tiers. Ce délai est impératif et son non-respect est sanctionné par la caducité de la saisie.

C’est cet acte, la dénonciation de saisie-attribution, qui ouvre officiellement les voies de recours pour le débiteur. Il doit lui-même contenir des mentions spécifiques, à peine de nullité, dont :

  • Une copie du procès-verbal de saisie signifié au tiers.
  • L’indication, en caractères très apparents, que le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour contester la saisie.
  • La date précise d’expiration du délai de contestation.
  • La désignation de la juridiction compétente, à savoir le Juge de l’Exécution (JEX) territorialement compétent.

Sanctions des vices de procédure : nullité vs. caducité de la saisie

En droit des procédures civiles d’exécution, la nullité et la caducité sont deux sanctions distinctes aux conséquences différentes, souvent sources de confusion. Une définition claire de leur distinction est pourtant fondamentale pour contester une saisie-attribution.

La nullité sanctionne un vice de forme affectant la validité même d’un acte de procédure. Par exemple, l’omission d’une mention obligatoire dans le procès-verbal de saisie ou dans l’acte de dénonciation peut entraîner la nullité de l’acte concerné. Pour qu’elle soit prononcée, la partie qui l’invoque doit prouver l’existence d’un grief, c’est-à-dire un préjudice causé par l’irrégularité (article 114 du Code de procédure civ. – CPC).

La définition de la caducité, quant à elle, est différente : elle sanctionne l’inaccomplissement d’une diligence requise dans un délai imparti. Elle ne frappe pas un acte en lui-même, mais la procédure tout entière qui est privée d’effet. Le cas typique en matière de saisie-attribution est le non-respect du délai de 8 jours pour dénoncer la saisie au débiteur. Si la saisie est dénoncée au 9ème jour, elle est caduque. La caducité anéantit rétroactivement la procédure, qui est réputée n’avoir jamais existé.

Le rôle crucial du tiers saisi (banque, employeur…) : obligations et sanctions

Le tiers saisi, bien que n’étant ni créancier ni débiteur dans le litige initial, joue un rôle central dans la réussite de la procédure. Ses obligations, dont la définition est stricte, sont lourdement sanctionnées en cas de manquement. Ce travail de déclaration est crucial.

L’obligation de déclaration : que doit dire le tiers saisi et quand ?

Dès la signification de la saisie, le tiers saisi a l’obligation de déclarer au commissaire de justice, sur-le-champ, l’étendue de ses obligations envers le débiteur saisi. L’article L. 211-3 du CPCE précise qu’il doit également mentionner les éventuelles modalités qui pourraient affecter ces obligations (terme, condition) et les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures.

Cette déclaration doit être immédiate et accompagnée de l’intégralité des pièces justificatives. La jurisprudence est particulièrement sévère sur le caractère « sur-le-champ » de cette obligation. Un retard, même de quelques heures, peut être sanctionné si le tiers ne justifie pas d’un empêchement valable.

Le motif légitime de non-déclaration : une échappatoire encadrée par la jurisprudence

La loi prévoit que le tiers saisi peut échapper à la sanction s’il justifie d’un « motif légitime » pour son absence de déclaration, sa déclaration tardive ou inexacte. Cette notion n’est pas définie par les textes et est laissée à l’appréciation souveraine du juge. La jurisprudence de la Cour de cassation, dans plus d’une décision de sa deuxième chambre civile (Civ. 2e), a reconnu comme motifs légitimes, par exemple, la complexité des comptes à analyser qui rendait une réponse immédiate impossible, ou l’absence au moment de la saisie d’une personne qualifiée pour fournir les informations requises.

L’impact de la dématérialisation sur la saisie-attribution bancaire

Pour accélérer et fiabiliser les procédures, une nouvelle version de l’article L. 211-1-1 du CPCE, issue d’une loi de modernisation et précisée par décret, impose depuis le 1er avril 2021 la transmission par voie électronique des actes de saisie-attribution aux établissements bancaires. Cette dématérialisation (transmission de data sécurisées) a des implications pratiques importantes : elle assure une transmission instantanée et sécurisée, réduit les litiges liés à la date de réception du document et centralise les réponses des banques. En contrepartie, elle renforce l’exigence de réactivité du tiers saisi, qui ne peut plus invoquer des délais postaux pour justifier un retard de déclaration. Pour plus d’information, voir la page officielle du texte de loi.

Contester la saisie-attribution : délais, motifs et procédure devant le JEX

La dénonciation de la saisie ouvre au débiteur le droit de la contester. Cette contestation est le principal moyen de défense pour faire valoir ses droits, mais sa mise en œuvre est enfermée dans des conditions de délai et de forme très strictes. La procédure se déroule exclusivement devant le Juge de l’Exécution (JEX), qui est le juge compétent pour tout ce qui a trait à l’exécution forcée.

Le délai d’un mois pour agir et la double dénonciation

Le débiteur dispose d’un délai d’un mois à compter de la signification de l’acte de dénonciation pour contester la saisie. Pour agir, il doit faire délivrer une assignation à l’encontre du créancier saisissant afin de l’appeler à comparaître devant le JEX.

Attention, une formalité supplémentaire est exigée à peine d’irrecevabilité de la contestation : le même jour que la délivrance de l’assignation (ou au plus tard le premier jour ouvrable suivant), le débiteur doit dénoncer cette assignation par lettre recommandée avec demande d’avis de réception au commissaire de justice qui a procédé à la saisie. L’omission de cette « double dénonciation » est fatale à la procédure de contestation. Pour découvrir les stratégies et arguments à développer, consultez notre guide pour contester efficacement une saisie-attribution.

Les principaux motifs de contestation admis par le juge

Plusieurs motifs peuvent fonder une contestation de la saisie-attribution. Ils peuvent porter sur le fond du droit ou sur la régularité de la procédure. Les plus fréquents sont :

  • La contestation du titre exécutoire : le débiteur peut soutenir que le titre sur lequel se fonde la saisie est nul, n’est plus valable, ou que la créance est éteinte ou n’est plus certaine, liquide et exigible (par paiement, prescription, etc.).
  • La contestation du montant de la créance : le décompte des sommes réclamées par le créancier peut être erroné.
  • L’insaisissabilité des sommes : certaines sommes sont insaisissables par nature (minima sociaux comme le RSA ou l’allocation de solidarité spécifique, prestations familiales…). Le débiteur peut contester la saisie si elle porte sur ces fonds.
  • L’irrégularité de la procédure de saisie : un vice de forme dans le procès-verbal de saisie ou de dénonciation, ou le non-respect des délais, peut entraîner la nullité ou la caducité de la mesure, contrairement à une saisie conservatoire qui serait mal convertie ou à une saisie-vente mal signifiée.
  • La saisie abusive : une saisie peut être jugée abusive si elle est menée de manière vexatoire ou si le créancier met en œuvre des mesures disproportionnées à l’encontre du débiteur.

Cas particuliers et situations complexes en saisie-attribution

Au-delà de la procédure classique, la saisie-attribution peut se heurter à des situations juridiques complexes qui nécessitent une analyse approfondie et une expertise particulière, notamment lorsqu’un notaire détient des fonds pour le compte du débiteur.

Saisie sur compte bancaire : quid des sommes insaisissables et des comptes joints ?

La saisie sur un compte bancaire obéit à des règles spécifiques. La banque a l’obligation de laisser à disposition du débiteur une somme équivalente au montant forfaitaire du RSA, appelée Solde Bancaire Insaisissable (SBI). Pour les autres sommes insaisissables versées sur le compte (pensions alimentaires, indemnités de chômage…), le débiteur doit justifier de leur origine auprès de la banque pour en obtenir la restitution. Pour une analyse complète, vous pouvez vous référer à notre article sur les règles de protection des créances insaisissables.

En cas de saisie sur un compte joint, la banque doit bloquer la totalité du solde. Il appartient ensuite au cotitulaire non-débiteur de prouver que les fonds lui sont appartenant en propre pour en obtenir la mainlevée. Cette preuve est libre, mais la solidarité passive entre cotitulaires pour la dette peut compliquer la situation. Les fonds sont réputés appartenant pour moitié à chacun, sauf preuve contraire. Cette présomption de solidarité peut être combattue.

Articulation avec une procédure collective (sauvegarde, redressement, liquidation)

L’ouverture d’une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire) au nom du débiteur paralyse en principe les poursuites individuelles des créanciers. Toutefois, l’effet attributif immédiat de la saisie-attribution joue un rôle décisif. Si la saisie a été pratiquée avant le jugement d’ouverture, l’attribution de la créance au profit du créancier saisissant est définitive. Celui-ci échappe ainsi au concours des autres créanciers et peut être payé par le tiers saisi, sous réserve des contestations. Cette question complexe met en lumière l’impact des procédures collectives sur les saisies.

Le cas rare de la saisie-attribution sur soi-même

Une situation juridique singulière est celle où le créancier est également le débiteur de son propre débiteur. Dans ce cas, peut-il pratiquer une saisie-attribution sur lui-même ? Sous l’empire de l’ancienne saisie-arrêt, cette possibilité était admise. Cependant, la jurisprudence moderne, se fondant sur le mécanisme de l’effet attributif immédiat, l’interdit. On ne peut être à la fois celui qui reçoit la créance et celui qui la doit, car la créance s’éteindrait immédiatement par confusion, ce qui viderait la procédure de son sens. Ce cas d’école illustre les subtilités techniques de la saisie-attribution.

La procédure de dénonciation et de contestation d’une saisie-attribution est technique et soumise à des délais stricts. Une erreur ou un retard peut avoir des conséquences irrémédiables sur vos droits. Face à la complexité de ces règles, l’assistance d’un avocat expert en saisie-attribution, inscrit à un barreau de l’Ordre des avocats, est déterminante pour sécuriser votre position, que vous soyez débiteur, créancier ou tiers saisi.

Sources

  • Code des procédures civiles d’exécution (Civ. exécution)
  • Code de commerce
  • Code civil
  • Loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civ. d’exécution

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