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Gages et nantissements: simplification majeure des garanties mobilières

Table des matières

Les garanties mobilières constituent un outil essentiel pour les entreprises qui financent leurs activités. L’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 opère une véritable révolution. Elle unifie le régime du gage, supprime des textes dispersés dans plusieurs codes et clarifie la distinction entre gage et nantissement. Ces changements facilitent l’accès au crédit et renforcent la sécurité juridique.

Un régime unifié du gage de meubles corporels

La réforme met fin à la dualité entre gage civil et gage commercial. Tout gage relève désormais du Code civil, quel que soit son objet. Le gage est défini à l’article 2333 comme « une convention par laquelle le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs ».

La simplification est spectaculaire. L’ordonnance abroge cinq chapitres entiers du Code de commerce, soit 70 articles. Disparaissent notamment:

  • Le gage commercial (art. L.521-1 à L.521-3)
  • Le warrant hôtelier (art. L.523-1 à L.523-15)
  • Le warrant pétrolier (art. L.524-1 à L.524-21)
  • Le nantissement de l’outillage et du matériel (art. L.525-1 à L.525-20)
  • Le gage des stocks (art. L.527-1 à L.527-11)

L’article 2346 alinéa 2 prévoit un mode de réalisation simplifié: « Lorsque le gage est constitué en garantie d’une dette professionnelle, le créancier peut faire procéder à la vente publique des biens gagés par un notaire, un huissier de justice, un commissaire-priseur judiciaire ou un courtier de marchandises assermenté, huit jours après une simple signification ».

Le gage automobile intègre le droit commun. L’article 2338 alinéa 2 prévoit seulement une publicité particulière: « Le gage portant sur un véhicule terrestre à moteur ou une remorque immatriculés est publié par l’inscription sur un registre tenu par l’autorité administrative ». Cette inscription empêche toute nouvelle inscription sur le même véhicule.

Le gage portant sur des immeubles par destination

L’article 2334 consacre la possibilité de constituer un gage sur « des meubles immobilisés par destination ». Cette innovation répond à un besoin pratique: permettre le financement d’équipements coûteux (turbines, transformateurs, panneaux solaires) sans hypothéquer l’immeuble entier.

En cas de conflit entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste, l’article 2419 précise: « L’ordre de préférence entre les créanciers hypothécaires et les créanciers gagistes, dans la mesure où leur gage porte sur des biens réputés immeubles, est déterminé par les dates auxquelles les titres respectifs ont été publiés ». Le droit de rétention est toutefois écarté.

Cette règle protège les créanciers ayant financé spécifiquement ces équipements. L’article L.112-3 du Code des procédures civiles d’exécution permet désormais la saisie des immeubles par destination indépendamment de l’immeuble « pour la réalisation du gage dont ils sont grevés ».

Publicité et opposabilité des gages

L’article 2337 maintient la distinction entre gage avec dépossession et gage sans dépossession. Dans le premier cas, c’est la remise du bien au créancier ou à un tiers convenu qui rend le gage opposable. Dans le second, seule la publicité sur un registre spécial produit cet effet.

L’ordonnance généralise le registre unique des gages sans dépossession, déjà prévu par l’article 2338. Ce registre centralisera toutes les inscriptions, sauf celle des gages automobiles. Cette centralisation renforce la sécurité juridique en évitant la multiplication des registres spéciaux.

Pour les choses fongibles, le régime est adapté. L’article 2341 impose au créancier de « tenir ces choses séparées des choses de même nature qui lui appartiennent », sauf si le contrat l’en dispense. Dans ce cas, il en devient propriétaire à charge de restituer la même quantité de choses équivalentes.

L’article 2342 autorise le constituant d’un gage sans dépossession à aliéner les choses fongibles gagées « à charge de les remplacer par la même quantité de choses équivalentes ». L’ordonnance renverse la règle antérieure: cette faculté devient la règle sauf convention contraire.

L’article 2342-1 précise: « Lorsque le constituant a la faculté d’aliéner les biens gagés, les biens acquis en remplacement sont de plein droit compris dans l’assiette du gage ». Cette subrogation réelle renforce l’efficacité du gage sur stocks.

Le nantissement de meubles incorporels modernisé

Le nantissement, défini à l’article 2355, est « l’affectation en garantie d’une obligation, d’un bien meuble incorporel ou d’un ensemble de biens incorporels, présents ou futurs ». Il est soumis aux règles du gage sans dépossession, à l’exclusion du droit de rétention fictif.

Le nantissement de créance connaît des améliorations significatives:

  • L’article 2361 supprime l’exigence d’une date certaine
  • L’article 2361-1 règle le cas des nantissements successifs d’une même créance
  • L’article 2363 affirme que le créancier nanti dispose d’un « droit de rétention sur la créance »
  • L’article 2363-1 précise l’opposabilité des exceptions au créancier nanti

La principale innovation tient au droit exclusif au paiement reconnu au créancier nanti. L’article 2363 dispose qu’après notification, seul le créancier « peut recevoir le paiement de la créance donnée en nantissement ». Ce droit exclusif rapproche le nantissement de créance d’une cession fiduciaire.

Pour les nantissements de comptes-titres, l’article L.211-20 du Code monétaire et financier est adapté. Un I bis nouveau règle le rang des nantissements successifs d’un même compte: il « est réglé par l’ordre de leur déclaration ».

Des modes de réalisation plus efficaces

L’ordonnance maintient et généralise les différents modes de réalisation des sûretés mobilières. L’article 2346 simplifie la voie judiciaire en supprimant l’exigence d’une autorisation pour « poursuivre la vente du bien gagé ».

L’attribution judiciaire reste possible. L’article 2347 permet au créancier de « demander au juge que le bien lui demeure en paiement ». Si sa valeur excède le montant de la dette, le créancier doit verser la différence au constituant.

Le pacte commissoire est maintenu à l’article 2348. Il permet au créancier de devenir propriétaire du bien gagé en cas de défaillance du débiteur. La valeur du bien doit être déterminée « par expert désigné à l’amiable ou judiciairement », sauf s’il existe une cotation officielle.

L’article 2348 permet désormais au fiduciaire de vendre le bien « au prix qu’il estime, sous sa responsabilité, correspondre à la valeur du bien » si l’expertise ne permet pas de trouver un acquéreur.

La loi maintient par ailleurs le principe d’indivisibilité du gage. L’article 2349 dispose que le gage « est indivisible nonobstant la divisibilité de la dette entre les héritiers du débiteur ou ceux du créancier ».

La réforme du droit des sûretés mobilières permet une approche plus souple et plus efficace du crédit. Pour structurer vos garanties mobilières, notre cabinet peut vous conseiller sur les options les mieux adaptées à votre activité. Une analyse juridique personnalisée vous évitera les pièges de cette réforme complexe.

Sources

  • Ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés
  • Code civil, articles 2333 à 2366 (version en vigueur depuis le 1er janvier 2022)
  • Code de commerce (abrogation des articles L.521-1 à L.527-11)

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