Détenir des actions de société peut sembler simple, mais la situation se complexifie lorsque plusieurs personnes possèdent des droits sur les mêmes titres. L’indivision, souvent subie lors d’une succession, et le démembrement de propriété, technique de transmission patrimoniale, sont deux régimes qui transforment la gestion des actions en un véritable enjeu juridique et stratégique. Cet article a pour but de survoler ces concepts, d’éclairer les droits de chacun et de souligner les précautions à prendre. Les aspects plus techniques de chaque situation sont traités en détail dans nos articles dédiés. Pour toute question sur ces problématiques, notre cabinet propose un accompagnement juridique en droit financier et des sociétés.
Qu’est-ce que l’indivision et le démembrement de propriété des actions ?
L’indivision et le démembrement sont deux manières de partager la propriété d’un bien, y compris des actions de société. Bien que les deux situations impliquent des droits partagés, leurs origines et leurs règles de fonctionnement sont très différentes. L’indivision correspond à une copropriété où plusieurs personnes, les indivisaires, détiennent ensemble des droits de même nature sur un bien. Le démembrement, lui, sépare les attributs de la propriété entre un usufruitier, qui a le droit d’utiliser le bien et d’en percevoir les revenus, et un nu-propriétaire, qui a le droit d’en disposer et vocation à en retrouver la pleine propriété à l’extinction de l’usufruit.
Indivision des actions : origine et caractéristiques principales
L’indivision sur des actions naît le plus souvent d’une succession, lorsque plusieurs héritiers reçoivent ensemble un portefeuille de titres. Elle peut aussi résulter d’un achat en commun, d’un apport d’un bien indivis à une société ou de l’ancien régime patrimonial du PACS. Juridiquement, chaque indivisaire est reconnu comme ayant la qualité d’associé. Cependant, l’exercice des droits liés à cette qualité est encadré par les règles strictes de l’indivision, qui imposent souvent une gestion collective. Pour une analyse complète de ces mécanismes, consultez notre article sur la gestion des droits des actions indivises.
Démembrement de propriété des actions : usufruit et nue-propriété
Le démembrement est une technique fréquemment utilisée dans la transmission de patrimoine. Les parents peuvent par exemple donner la nue-propriété des actions à leurs enfants tout en en conservant l’usufruit, ce qui leur permet de continuer à percevoir les dividendes. L’usufruitier jouit des « fruits » des actions (les dividendes), tandis que le nu-propriétaire a vocation à récupérer la pleine propriété des titres au décès de l’usufruitier, sans droits de succession supplémentaires. C’est la distinction entre ces deux rôles qui crée des enjeux de pouvoir et de gestion. Découvrez les implications de cette répartition dans notre guide sur les droits du nu-propriétaire et de l’usufruitier.
Droits attachés aux actions en indivision ou démembrement : qui décide quoi ?
La question centrale est de savoir qui exerce les droits politiques (le vote) et qui perçoit les droits pécuniaires (les revenus). La réponse varie grandement selon que les actions sont en indivision ou démembrées, et peut être aménagée par des statuts ou des conventions, dans les limites fixées par la loi.
Exercice des droits politiques (vote, information, convocation)
Pour les actions en indivision, le principe est celui d’une représentation unique : les indivisaires doivent désigner un mandataire pour voter en leur nom aux assemblées générales. À défaut d’accord, ce mandataire peut être désigné en justice. Chaque indivisaire conserve néanmoins un droit individuel à l’information et à la convocation. Dans le cas du démembrement, la loi prévoit une répartition supplétive : le droit de vote appartient à l’usufruitier pour les décisions ordinaires (comme l’approbation des comptes et l’affectation des bénéfices) et au nu-propriétaire pour les décisions extraordinaires (modification des statuts, fusion, etc.). Les statuts peuvent toutefois prévoir une répartition différente, mais sans jamais priver le nu-propriétaire du droit de participer aux décisions collectives. Ces règles sont explorées plus en détail dans nos articles sur les actions en indivision et le démembrement de propriété.
Droits pécuniaires (dividendes, réserves, boni de liquidation)
La répartition des gains est plus claire. Pour les actions démembrées, l’usufruitier perçoit les dividendes, qui sont considérés comme des fruits. En revanche, tout ce qui relève du capital, comme les réserves mises de côté ou le boni de liquidation (le reliquat après paiement des dettes en cas de dissolution), revient au nu-propriétaire. En indivision, tous les revenus et produits des actions (dividendes, plus-values, etc.) accroissent l’indivision et sont partagés entre les indivisaires au prorata de leurs droits, au moment du partage.
Cession et apport d’actions partagées : les pièges à éviter
Transmettre des actions détenues en indivision ou en démembrement est une opération délicate, soumise à des conditions de forme et de fond très précises. Le non-respect de ces règles peut entraîner des sanctions lourdes, comme l’inopposabilité de l’acte aux autres titulaires de droits, voire sa nullité. La fiscalité de ces opérations est également un point d’attention majeur. Pour comprendre en détail ces procédures, référez-vous à notre article sur la cession et l’apport d’actions démembrées ou indivises.
Les règles d’unanimité et leurs exceptions
Pour les actions en indivision, tout acte de disposition, comme une vente (cession) ou un apport à une autre société, requiert l’unanimité des coindivisaires. C’est une règle protectrice mais qui peut conduire à des situations de blocage. La loi a prévu des mécanismes pour surmonter ces blocages, notamment la possibilité de demander une autorisation judiciaire en cas de refus d’un indivisaire mettant en péril l’intérêt commun. En matière de démembrement, la cession de la pleine propriété des actions exige l’accord conjoint du nu-propriétaire et de l’usufruitier.
Enjeux fiscaux des transmissions
La cession d’actions démembrées ou indivises déclenche l’imposition des plus-values. La répartition de cet impôt et le calcul de la plus-value obéissent à des règles complexes. Pour le démembrement, l’évaluation de l’usufruit et de la nue-propriété selon le barème fiscal de l’article 669 du Code général des impôts ou selon une évaluation économique a un impact direct sur le calcul des droits de mutation en cas de donation et sur la plus-value en cas de cession. Des stratégies existent pour optimiser la fiscalité de ces transmissions, mais elles doivent être mises en œuvre avec précaution pour ne pas tomber dans l’abus de droit. Ces questions fiscales sont un aspect central de notre article sur la transmission d’actions partagées.
Pourquoi l’accompagnement d’un avocat est essentiel ?
La gestion, la cession ou l’apport d’actions en indivision ou en démembrement se situent au carrefour de plusieurs branches du droit : droit des sociétés, droit des biens, droit des successions et droit fiscal. Une simple erreur dans la rédaction d’une clause statutaire, une méconnaissance des droits de vote ou une mauvaise évaluation fiscale peut avoir des conséquences financières et juridiques importantes, générant des conflits entre associés ou héritiers.
L’intervention d’un avocat expert dans ces domaines permet de sécuriser les opérations, d’anticiper les litiges et de structurer la détention des titres de manière optimale. Que ce soit pour préparer une transmission de patrimoine, résoudre une situation de blocage en indivision ou rédiger des statuts adaptés, un conseil juridique est indispensable pour protéger vos intérêts. Pour une analyse approfondie de votre situation et un conseil adapté, prenez contact avec notre équipe d’avocats.
Foire aux questions
Qui a le droit de vote quand des actions sont démembrées ?
Sauf clause contraire dans les statuts, l’usufruitier vote pour les décisions ordinaires (affectation des bénéfices) et le nu-propriétaire pour les décisions extraordinaires (modification des statuts).
Peut-on vendre des actions en indivision sans l’accord de tous ?
Non, la cession d’actions indivises requiert en principe l’accord unanime de tous les indivisaires. Un acte passé sans cet accord est inopposable aux autres.
Qui touche les dividendes en cas de démembrement ?
C’est l’usufruitier qui perçoit l’intégralité des dividendes distribués, car ils sont considérés comme les fruits des actions.
Comment sort-on d’une indivision sur des actions ?
La sortie de l’indivision peut se faire par le partage des actions entre les indivisaires, par la vente de la totalité des actions (avec l’accord de tous) ou par la vente par un indivisaire de sa quote-part à un autre indivisaire ou à un tiers (sous réserve du droit de préemption des autres).
Le nu-propriétaire a-t-il le droit d’assister aux assemblées générales ?
Oui, en sa qualité d’associé, le nu-propriétaire a le droit de participer à toutes les décisions collectives, y compris celles pour lesquelles il n’a pas le droit de vote.
L’indivision et le démembrement sont-ils pertinents pour une PME familiale ?
Oui, ce sont des outils très utilisés. Le démembrement est une technique privilégiée pour préparer la transmission de l’entreprise aux enfants tout en conservant les revenus et un certain contrôle. L’indivision est souvent une conséquence de la succession qu’il faut gérer avec attention pour assurer la pérennité de l’entreprise.