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Gestion des comptes bancaires : entrée des créances, frais, saisies et pluralité de comptes

Table des matières

La relation entre client et banque repose sur le compte bancaire, instrument central de notre vie économique. Derrière sa simplicité apparente se cache un mécanisme juridiquement sophistiqué. Comprendre ses rouages permet de mieux protéger ses droits.

L’entrée des créances en compte

Un mécanisme juridique méconnu

L’entrée d’une créance en compte constitue un paiement. Cette notion fondamentale reste souvent ignorée des clients. L’article L.133-3 du Code monétaire et financier précise les modalités d’initiation des opérations de paiement, notamment via « le bénéficiaire qui donne un ordre de paiement au prestataire de services de paiement du payeur ».

L’inscription comptable ne suffit pas à définir l’entrée en compte. La jurisprudence distingue nettement ces deux notions. Dans un arrêt du 10 mai 1989, la Cour de cassation a clairement établi que « l’entrée en compte précède nécessairement l’inscription ».

L’effet de règlement

Lorsqu’une créance entre en compte, elle s’éteint par fusion immédiate dans le solde. La Cour de cassation, dans un arrêt du 13 novembre 2014, a confirmé que l’effet de règlement s’applique tant aux comptes courants qu’aux comptes de dépôt.

Cette règle connaît toutefois des limites importantes. Pour les consommateurs, la Cour de cassation a jugé en 2017 que « il ne peut être fait échec aux règles d’ordre public relatives à la détermination du point de départ du délai biennal de forclusion, propre au crédit à la consommation, par l’inscription de l’échéance d’un prêt au débit d’un compte courant dont le solde est insuffisant pour en couvrir le montant ».

Intérêts et commissions bancaires

La convention d’intérêts

Le taux d’intérêt doit être stipulé par écrit selon l’article 1907 du Code civil. Cette exigence a été renforcée par la jurisprudence. Dans deux arrêts de principe du 9 février et du 12 avril 1988, la Cour de cassation a mis fin à la coutume qui dispensait les découverts en compte courant de cette exigence.

Le taux effectif global (TEG) doit être mentionné conformément à l’article L.313-2 du Code de la consommation. Sa mention peut intervenir postérieurement aux opérations, notamment sur les relevés périodiques, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation (arrêt du 23 octobre 1990).

Les dates de valeur

Ce mécanisme bancaire a été largement encadré. La Cour de cassation, dans un arrêt du 6 avril 1993, a limité les pratiques bancaires en distinguant opérations légitimes et abusives. L’article L.133-14 du Code monétaire et financier interdit désormais les dates de valeur sauf exception pour les versements d’espèces par des professionnels.

Les dates de valeur peuvent être qualifiées de clauses abusives pour les consommateurs, créant « un déséquilibre significatif » selon les termes de l’article L.132-1 du Code de la consommation.

Plafonnement des frais

La loi a plafonné les commissions d’intervention pour favoriser l’inclusion bancaire. L’article L.312-1-3 du Code monétaire et financier établit deux catégories de plafonds :

La mobilité bancaire est encouragée par l’interdiction de perception de frais lors de la clôture d’un compte (article L.312-1-7 du Code monétaire et financier).

La pluralité de comptes

Indépendance et compensation

Chaque compte ouvert par un client est juridiquement autonome. Cette indépendance produit des effets concrets :

  • Les soldes respectifs ne se compensent pas automatiquement
  • La provision d’un chèque s’apprécie uniquement sur le compte concerné
  • Les intérêts se calculent par compte

Cette règle peut être écartée par une convention de compensation ou une lettre de fusion. Ces contrats, validés par la jurisprudence, permettent à la banque de compenser les soldes créditeurs et débiteurs.

Ces conventions ont leurs limites. Pour un syndic de copropriété, la Chambre commerciale a jugé le 14 mai 1991 que « la convention de compensation est inopposable aux mandants quand la banque connaît l’origine des fonds ».

En cas de procédure collective, ces conventions restent valables si elles ont été conclues avant la cessation des paiements. La Cour de cassation l’a confirmé dans un arrêt du 16 octobre 2007.

La saisie du compte bancaire

Une procédure encadrée

La saisie d’un compte bancaire obéit à des règles spécifiques du Code des procédures civiles d’exécution (articles L.161-1, L.161-2 et suivants). Elle affecte « l’ensemble des comptes du débiteur qui représentent des sommes d’argent » selon l’article R.211-19.

L’acte de saisie-attribution transfère immédiatement la propriété du solde au créancier saisissant (article L.211-2). Le compte devient indisponible pour permettre la liquidation des opérations en cours.

Liquidation et protection

Le solde saisi peut être modifié pendant quinze jours ouvrables, notamment par :

  • Les chèques remis à l’encaissement avant la saisie
  • La contre-passation d’effets impayés
  • Les paiements par carte si le bénéficiaire a été crédité avant la saisie

Les sommes insaisissables conservent ce caractère après leur entrée en compte. L’article L.162-2 du Code des procédures civiles d’exécution impose au banquier de laisser à disposition du client une somme à caractère alimentaire égale au RSA.

Les comptes joints posent des problèmes spécifiques. Selon la jurisprudence, seule la part du débiteur saisi est affectée, mais le compte est souvent bloqué en totalité, charge aux autres titulaires de demander le cantonnement.

La compréhension de ces mécanismes peut vous éviter bien des désagréments. Quand des frais semblent abusifs ou qu’une saisie paraît irrégulière, n’attendez pas. Un conseil juridique personnalisé peut faire économiser bien plus que son coût. Notre cabinet est à votre disposition pour analyser votre situation bancaire et défendre vos intérêts.

Sources

  • Code monétaire et financier : articles L.133-3, L.133-14, L.312-1-3, L.312-1-7
  • Code civil : article 1907
  • Code de la consommation : articles L.132-1, L.313-2
  • Code des procédures civiles d’exécution : articles L.161-1, L.161-2, L.211-2, L.162-2, R.211-19
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 mai 1989, n°87-16.236
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 novembre 2014, n°13-24.606
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 janvier 2017, n°15-21.453
  • Cour de cassation, 9 février 1988 et 12 avril 1988 (arrêts de principe sur les intérêts)
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 octobre 1990, n°88-19.244
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 6 avril 1993 (arrêt sur les dates de valeur)
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 mai 1991, n°89-14.287
  • Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 octobre 2007, n°06-14.574
  • Dépôt et compte en banque, Régine Bonhomme, Répertoire de droit commercial, 2017

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