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La caducité des actes introductifs d’instance : pièges et conséquences

Table des matières

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Déposer un acte introductif d’instance comporte des risques procéduraux parfois ignorés. Parmi eux, la caducité représente une sanction redoutable pour le plaideur négligent. Cette « mort » d’un acte juridique, initialement valable, peut survenir par l’effet de règles précises que tout justiciable doit connaître.

Qu’est-ce que la caducité ?

La caducité sanctionne un acte qui, bien que valablement formé, perd un élément essentiel à sa validité après sa formation. En procédure, elle apparaît souvent comme une sanction de l’inactivité d’une partie ou des deux.

Selon Pierre CALLÉ, professeur à l’Université de Paris-Saclay, la caducité constitue « l’un des nombreux instruments de lutte contre les effets néfastes de la négligence des parties, voire de leur mauvaise volonté à se soumettre aux obligations imposées par le législateur » (Répertoire de procédure civile, juillet 2024).

La caducité de l’assignation devant le tribunal judiciaire

Un premier piège guette le demandeur devant le tribunal judiciaire : le défaut de remise au greffe d’une copie de l’assignation.

L’article 754 du Code de procédure civile impose cette remise au moins quinze jours avant la date d’audience. À défaut, l’assignation devient caduque. Cette règle vise à mettre fin aux « assignations à toutes fins », pratique consistant à délivrer des assignations sans réellement saisir le tribunal.

Le délai peut être réduit en cas d’urgence, sur autorisation du juge (article 755, alinéa 1). Pour la procédure à jour fixe, la remise doit intervenir avant la date fixée pour l’audience (article 843).

Ce piège touche également les assignations en matière fiscale. La Cour de cassation l’a confirmé à plusieurs reprises (Com. 21 octobre 1980, n° 79-13.081).

Caducité et tribunaux spécialisés

Devant le tribunal de commerce

L’article 857 du Code de procédure civile impose une règle similaire : une copie de l’assignation doit être remise au greffe au plus tard huit jours avant l’audience.

Particularité : la caducité est constatée par ordonnance du président, du juge chargé d’instruire l’affaire ou, à défaut, à la requête d’une partie.

Aux prud’hommes : attention aux défauts de comparution

La caducité guette également le demandeur qui ne comparaît pas devant le bureau de conciliation et d’orientation (article R. 1454-12 du Code du travail).

Si le demandeur ne comparaît pas sans motif légitime, le bureau de conciliation peut déclarer la requête et la citation caduques si le défendeur ne sollicite pas un jugement sur le fond.

Le défaut de comparution personnelle n’est plus nécessairement fatal depuis l’assouplissement des règles de représentation. Une partie est considérée comme comparante si elle est représentée par un avocat ou par tout mandataire mentionné à l’article L. 1453-1-A du Code du travail.

Plus sévère encore : l’absence devant le bureau de jugement entraîne également la caducité, en vertu de l’article 468 du Code de procédure civile (Soc. 19 février 1992, n° 89-44.145).

Caducité des actes introductifs d’appel

En appel, plusieurs causes de caducité menacent l’appelant :

  1. Lorsque la lettre de notification de la déclaration d’appel revient au greffe ou que l’intimé n’a pas constitué avocat dans le mois, l’appelant doit signifier sa déclaration d’appel. À défaut de signification dans le mois suivant l’avis du greffe, la déclaration d’appel est caduque (article 902 CPC).
  2. L’appelant doit remettre ses conclusions au greffe dans les trois mois de la déclaration d’appel et les notifier aux avocats des parties (articles 908 et 911 CPC). Le non-respect entraîne la caducité relevée d’office.
  3. Dans la procédure à bref délai, ces délais sont réduits. L’article 906-1 (ancien 905-1) impose la signification de la déclaration d’appel dans les vingt jours de la réception de l’avis de fixation.

La chambre sociale de la Cour de cassation a jugé en 2021 que cette caducité « ne constitue pas une sanction disproportionnée au but poursuivi » (Soc. 8 décembre 2021, n° 19-22.810).

Des conséquences dramatiques

La sanction la plus redoutable de la caducité est son effet rétroactif. Un acte caduc est « réduit à néant dans son principe même » selon Roger Perrot.

L’Assemblée plénière de la Cour de cassation a jugé en 1987 qu’une assignation caduque n’a jamais interrompu la prescription (Cass., ass. plén., 3 avril 1987, n° 86-11.536). Cette solution est logique : admettre l’inverse permettrait à un demandeur de prolonger indéfiniment les délais de prescription en délivrant des assignations à intervalles réguliers.

Une caducité peut ainsi rendre définitivement irrecevable une action prescrite. Lorsque la prescription s’est écoulée pendant l’instance devenue caduque, aucune nouvelle action n’est possible.

De plus, l’article 385 du Code de procédure civile précise que la caducité de la citation entraîne l’extinction de l’instance, et bien que l’introduction d’une nouvelle instance reste théoriquement possible, elle n’est envisageable qu’à condition que l’action ne soit pas prescrite.

Seul un relevé de caducité peut parfois sauver la situation. L’article 468 du Code de procédure civile permet au demandeur défaillant de faire connaître au greffe, dans un délai de quinze jours, le motif légitime qu’il n’a pas pu invoquer à temps.

Mais attention : la Cour de cassation interprète strictement cette notion. Ni l’éloignement géographique du conseil (Civ. 2e, 8 février 2024, n° 21-25.928), ni l’absence de réception des écritures adverses (Civ. 2e, 28 juin 2012, n° 11-21.051) ne constituent des motifs légitimes.

La gestion minutieuse des délais et des formalités procédurales s’avère donc déterminante. Une défaillance, même minime, peut anéantir des années de procédure.

Notre cabinet d’avocats assure un suivi rigoureux de ces délais critiques pour protéger vos droits. N’hésitez pas à nous consulter avant l’engagement d’une procédure ou pour sécuriser une instance en cours.

Sources

  • Code de procédure civile, articles 385, 406, 407, 468, 478, 754, 755, 843, 857, 902, 908, 911, 913-5 (ancien 914)
  • Code du travail, articles L. 1453-1-A, R. 1454-12, R. 1454-21
  • P. CALLÉ, « Caducité », Répertoire de procédure civile, Dalloz, juillet 2024
  • Cass. ass. plén., 3 avril 1987, n° 86-11.536, Bull. civ., n° 2
  • Com. 21 octobre 1980, n° 79-13.081, Bull. civ. IV, n° 345
  • Soc. 19 février 1992, n° 89-44.145, Bull. civ. V, n° 102
  • Soc. 8 décembre 2021, n° 19-22.810
  • Civ. 2e, 8 février 2024, n° 21-25.928
  • Civ. 2e, 28 juin 2012, n° 11-21.051, Bull. civ. II, n° 125

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