La saisie immobilière n’est pas une procédure comme les autres. Depuis la réforme de 2006, le juge de l’exécution (JEX) occupe une place prépondérante dans cette procédure complexe qui aboutit à la vente forcée d’un bien immobilier.
Le rôle central du JEX dans la procédure
La compétence du JEX en matière immobilière est prévue par l’article L.213-6 du Code de l’organisation judiciaire. Il connaît « de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s’élèvent à l’occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s’y rapportant directement ».
La procédure débute par un commandement de payer valant saisie immobilière qui doit être publié au service de la publicité foncière. Le créancier doit ensuite assigner le débiteur à comparaître devant le JEX à l’audience d’orientation.
L’audience d’orientation constitue un moment clé. Le JEX y vérifie que les conditions de la saisie sont réunies, notamment l’existence d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible.
Lors de cette audience, le JEX peut:
- Autoriser la vente amiable à la demande du débiteur
- Ordonner la vente forcée
- Statuer sur les contestations et demandes incidentes
Les contestations et demandes incidentes
La procédure de saisie immobilière impose une concentration des moyens. L’article R.311-5 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’à peine d’irrecevabilité, aucune contestation ni demande incidente ne peut être formée après l’audience d’orientation, sauf si elle porte sur des actes postérieurs.
Cette règle stricte a été confirmée par la jurisprudence. La Cour de cassation a jugé irrecevable une demande de délai de grâce formée pour la première fois en appel (Civ. 2e, 26 juin 2014, n°13-20.560).
Les délais pour contester sont également très encadrés:
- Les contestations doivent être formées avant l’audience d’orientation
- Elles doivent être présentées par écrit via le dépôt de conclusions signées d’un avocat (Article R.311-6 du Code des procédures civiles d’exécution)
Les décisions particulières du JEX
Le jugement d’orientation constitue une étape déterminante. Il constate la créance du poursuivant et détermine les modalités de poursuite de la procédure.
Si le JEX autorise la vente amiable, il fixe:
- Le montant minimum de la vente
- La date de l’audience de retour
- Les conditions de visite du bien
Si la vente amiable échoue ou n’est pas demandée, le JEX ordonne la vente forcée et fixe la date d’adjudication.
Le jugement d’adjudication, quant à lui, présente une nature hybride. S’il statue sur une contestation, il constitue un véritable jugement susceptible d’appel (Art. R.322-60 du Code des procédures civiles d’exécution). Dans le cas contraire, il s’agit d’un simple procès-verbal non susceptible de recours.
La Cour de cassation a précisé que le jugement d’adjudication qui ne statue sur aucune contestation est dépourvu de l’autorité de chose jugée (Civ. 2e, 11 juillet 2013, n°12-13.737).
Les recours en matière immobilière
L’appel en matière de saisie immobilière présente des particularités:
- Il doit être interjeté dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement
- Pour le jugement d’orientation, la procédure est à jour fixe sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un péril (Art. R.322-19 du Code des procédures civiles d’exécution)
Certains jugements ne sont pas susceptibles d’appel, notamment:
- Le jugement constatant la vente amiable (Art. R.322-25)
- Le jugement d’adjudication qui ne statue pas sur une contestation
- La décision rejetant une demande de subrogation d’un créancier inscrit (Art. R.311-9)
L’effet dévolutif de l’appel est également limité par l’article R.311-5. La Cour de cassation applique avec rigueur cette disposition, rendant irrecevables les moyens nouveaux soulevés en appel.
Comment sécuriser votre procédure de saisie immobilière
La procédure de saisie immobilière est semée d’embuches. Les points critiques à surveiller:
- Le respect du formalisme du commandement valant saisie
- La préparation minutieuse des contestations avant l’audience d’orientation
- La connaissance des pouvoirs du JEX à chaque étape
Une contestation tardive sera irrecevable. Un appel mal formé sera rejeté. La préparation en amont avec un avocat spécialisé est indispensable.
Notre cabinet intervient régulièrement dans ces procédures, tant pour les créanciers poursuivants que pour les débiteurs saisis. Contactez-nous pour une analyse personnalisée de votre situation.
Sources
- Code de l’organisation judiciaire, article L.213-6
- Code des procédures civiles d’exécution, articles R.311-5, R.311-6, R.311-7, R.322-19, R.322-25, R.322-60
- Cour de cassation, 2e chambre civile, 26 juin 2014, n°13-20.560
- Cour de cassation, 2e chambre civile, 11 juillet 2013, n°12-13.737
- Cour de cassation, 2e chambre civile, 24 juin 2010, n°08-19.974
- Ordonnance n°2006-461 du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière