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Ventes hors établissement, foires, soldes : comprendre les règles spécifiques

Table des matières

Le monde du commerce est régi par de nombreuses règles qui encadrent les différentes modalités de vente. Loin d’être arbitraires, ces réglementations visent à protéger les consommateurs et à assurer une concurrence loyale entre les professionnels. Les ventes qui se déroulent en dehors du cadre habituel des commerces, ainsi que certaines périodes promotionnelles comme les soldes, sont particulièrement encadrées par le législateur. Comprendre ces règles est essentiel pour tout commerçant souhaitant développer son activité en toute légalité.

Les ventes en dehors des magasins : quelles précautions ?

Les ventes réalisées en dehors des établissements commerciaux traditionnels sont soumises à un régime juridique spécifique qui vient réguler ces pratiques commerciales.

Ventes sur le domaine public : autorisations et limites

La vente sur le domaine public ne s’improvise pas. L’article L. 442-11 du code de commerce interdit formellement d’offrir à la vente des produits ou services en utilisant le domaine public de manière irrégulière. Tout commerçant désirant exercer sur le domaine public doit obligatoirement obtenir une autorisation préalable du maire de la commune concernée.

Le non-respect de cette obligation constitue une contravention de cinquième classe. Les agents de la Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) disposent de pouvoirs étendus pour sanctionner ces infractions, pouvant aller jusqu’à la consignation des marchandises et des biens ayant permis l’offre de vente.

Une jurisprudence constante confirme cette exigence d’autorisation, même pour la vente du traditionnel muguet du 1er mai, qui constitue une simple tolérance de l’autorité publique et non un droit acquis (Civ. 2e, 25 mai 2000).

Participer à une foire ou un salon : les obligations d’information

Les foires et salons constituaient autrefois des espaces nécessitant une autorisation préfectorale, mais cette obligation a été supprimée par l’ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004. Néanmoins, les organisateurs de salons professionnels doivent effectuer une déclaration préalable auprès de l’autorité administrative compétente.

Un point crucial à retenir concerne l’absence de droit de rétractation pour le consommateur qui conclut un contrat dans une foire ou un salon. L’article L. 224-59 du code de la consommation prévoit que le professionnel doit obligatoirement informer le consommateur de cette absence de droit de rétractation. Un défaut d’information sur ce point peut engager la responsabilité du professionnel et entacher la validité du contrat conclu.

La Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion de préciser l’interprétation de ces dispositions dans plusieurs arrêts récents, notamment l’arrêt du 7 août 2018 (aff. C-485/17) et celui du 17 décembre 2019 (aff. C-465/19).

La vente au déballage : une pratique encadrée

La vente au déballage est définie par l’article L. 310-2 du code de commerce comme les « ventes et rachats de marchandises effectués dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public ou au rachat de ces marchandises, ainsi qu’à partir de véhicules spécialement aménagés à cet effet ».

Ces ventes sont strictement limitées dans le temps : elles ne peuvent excéder deux mois par année civile dans un même local, un même emplacement ou un même arrondissement. Cette limite temporelle a été précisée par la loi Sapin 2 du 9 décembre 2016.

Une déclaration préalable auprès du maire de la commune est obligatoire. Elle doit être adressée quinze jours au moins avant la date prévue pour la vente. La jurisprudence a précisé le critère déterminant de la vente au déballage : le lieu non destiné habituellement à la commercialisation. Ainsi, un hangar, un bar, le parking d’un grand magasin ou même l’allée centrale d’une galerie marchande peuvent être considérés comme des lieux de vente au déballage (Crim. 10 mars 2015, n° 14-83.350).

Depuis la loi du 4 août 2008, les particuliers non-professionnels peuvent participer aux ventes au déballage pour vendre des objets personnels et usagés, mais uniquement deux fois par an au maximum.

La violation des règles encadrant les ventes au déballage est passible d’une amende de 15 000 euros, pouvant être portée à 75 000 euros pour les personnes morales.

Les ventes en magasins d’usine : conditions et restrictions

Les magasins d’usine représentent une forme particulière de commerce où le fabricant vend directement sa production, souvent à des prix attractifs. Cette pratique est encadrée par des règles spécifiques.

Définition légale du magasin d’usine

Selon l’article L. 310-4 du code de commerce, la dénomination « vente en magasin ou en dépôt d’usine » est réservée aux seuls producteurs qui vendent directement leur marchandise. Cette restriction vise à protéger les consommateurs contre les pratiques trompeuses de certains commerçants qui utiliseraient abusivement cette appellation pour suggérer des prix plus avantageux.

L’usage indu de cette dénomination est sanctionné par une amende de 15 000 euros. De plus, le code de la consommation prévoit une amende administrative pouvant aller jusqu’à 75 000 euros pour les personnes morales en cas de publicité illicite concernant cette pratique.

Quelles marchandises peuvent y être vendues ?

Les marchandises pouvant être vendues en magasin d’usine sont strictement définies par la loi. Trois conditions cumulatives doivent être remplies :

  1. Il doit s’agir de marchandises « non écoulées dans les circuits de distribution ou faisant l’objet d’un retour »
  2. Ce sont des « productions de la saison antérieure de commercialisation »
  3. Les produits doivent justifier « une vente à prix minoré »

Ces trois conditions sont cumulatives selon la jurisprudence, ce qui limite considérablement le type de produits pouvant être vendus sous cette dénomination.

Information du consommateur sur l’origine des produits

Le professionnel qui exploite un magasin d’usine a l’obligation d’informer clairement le consommateur sur l’origine et la nature des produits vendus. Cette obligation découle du principe général de transparence qui sous-tend le droit de la consommation.

La jurisprudence a développé une interprétation stricte de ces conditions, considérant notamment que l’information du consommateur doit être complète et non équivoque. Toute ambiguïté sur l’origine des produits ou sur leur caractère de fin de série peut être qualifiée de pratique commerciale trompeuse.

Les soldes : une période de vente très réglementée

Les soldes constituent une période particulière dans la vie commerciale, permettant aux professionnels d’écouler leurs stocks invendus tout en offrant aux consommateurs des prix avantageux.

Définition des soldes et distinction avec les promotions

L’article L. 310-3 du code de commerce définit les soldes comme « les ventes qui sont accompagnées ou précédées de publicité et sont annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l’écoulement accéléré de marchandises en stock ».

Quatre critères caractérisent donc les ventes en soldes :

  • La publicité de la vente
  • Une réduction de prix
  • Des produits en stock
  • Des périodes définies par la loi

La Cour de cassation précise que le critère essentiel des soldes est le déstockage portant sur un lot de marchandises préexistantes et non renouvelable (Crim. 19 févr. 2003, n° 02-80.085).

Il est important de distinguer les soldes des simples promotions. Ces dernières peuvent être organisées librement tout au long de l’année, mais ne peuvent pas être qualifiées de « soldes ». La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a d’ailleurs renforcé cette distinction en réprimant les pratiques commerciales qui donneraient l’impression, par des opérations promotionnelles coordonnées à l’échelle nationale, que le consommateur bénéficie d’une réduction de prix comparable à celle des soldes en dehors des périodes légales.

Les périodes légales de soldes

Les périodes de soldes sont strictement encadrées par la loi. Actuellement, l’article L. 310-3 du code de commerce prévoit deux périodes par an, d’une durée minimale de trois semaines et maximale de six semaines chacune.

Les dates précises sont fixées par arrêté ministériel, avec la possibilité de dates différentes dans certains départements pour tenir compte d’une forte saisonnalité des ventes ou d’opérations commerciales menées dans des régions frontalières.

La loi PACTE du 22 mai 2019 a modifié le dispositif en prévoyant des périodes plus courtes mais potentiellement plus efficaces. L’arrêté du 27 mai 2019 a fixé la durée de chaque période de soldes à quatre semaines.

Marchandises concernées et interdiction de réapprovisionnement spécifique

Un point crucial de la réglementation des soldes concerne l’interdiction de réapprovisionnement spécifique. Les produits annoncés comme soldés doivent avoir été proposés à la vente et payés depuis au moins un mois à la date de début de la période de soldes.

La jurisprudence a précisé cette notion : il y a solde lorsqu’il y a écoulement accéléré d’un stock prédéterminé et non renouvelable (Com. 28 janv. 2004, n° 01-16.381). Le réapprovisionnement pendant la période des soldes fait l’objet d’une attention particulière des juges, qui distinguent selon l’autonomie du vendeur par rapport au fournisseur.

La Cour de cassation a récemment réaffirmé ces principes en jugeant qu’une société qui ne s’est pas bornée à écouler le stock qu’elle détenait, mais a effectué un réassortiment auprès d’un fournisseur constituant une entité juridique distincte, commet une infraction à la législation sur les soldes (Crim. 22 févr. 2022, n° 21-83.226).

Obligations d’affichage des prix

Durant les soldes, l’affichage des prix obéit à des règles strictes. Le commerçant doit obligatoirement indiquer le prix de référence (ancien prix) et le nouveau prix réduit. Le prix de référence doit être réel et avoir été effectivement pratiqué avant l’opération de soldes.

L’ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 a défini les conditions dans lesquelles les professionnels peuvent avoir recours à des annonces de réduction de prix. Elle prévoit notamment que toute annonce d’une réduction de prix doit indiquer le prix antérieur pratiqué par le professionnel, ce prix étant le prix le plus bas appliqué au cours des trente derniers jours.

Sanctions en cas de non-respect

Le non-respect des règles relatives aux soldes est sévèrement sanctionné. L’article L. 310-5 du code de commerce punit d’une amende de 15 000 euros le fait de réaliser des soldes portant sur des marchandises détenues depuis moins d’un mois ou d’utiliser abusivement le mot « soldes ».

Cette amende peut être portée au quintuple pour les personnes morales. Par ailleurs, une publicité mensongère sur les soldes peut être sanctionnée par le code de la consommation (amende administrative jusqu’à 75 000 euros pour une personne morale).

Vente le dimanche : principes et dérogations

La question du travail dominical et de l’ouverture des commerces le dimanche cristallise souvent les débats entre liberté d’entreprendre et protection des salariés.

Le principe du repos dominical et ses exceptions sectorielles/géographiques

Le code du travail pose un principe clair : le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche (article L. 3132-3). Cependant, ce principe connaît de nombreuses exceptions.

Certains établissements peuvent déroger à cette règle en raison de la nature de leur activité : hôtels, restaurants, débits de boissons, commerces de détail alimentaire, fleuristes, musées, pharmacies, établissements de soins, entreprises de transport, etc.

Des dérogations géographiques existent également pour les zones touristiques caractérisées par une affluence particulièrement importante de touristes. Le préfet peut, dans ces zones, accorder le repos hebdomadaire par roulement.

La jurisprudence encadre strictement l’application de ces exceptions. Ainsi, le Conseil d’État a jugé que les activités du magasin Louis Vuitton des Champs-Élysées ne correspondent pas à des biens et services destinés à faciliter l’accueil, la détente ou les loisirs du public, et ne peuvent donc justifier une ouverture dominicale (CE 11 mars 2009, req. n° 308874).

Les conditions de travail et de rémunération spécifiques

L’ouverture dominicale implique des contreparties pour les salariés. L’article L. 3132-26 du code du travail prévoit que le maire peut autoriser l’ouverture des commerces de détail jusqu’à douze dimanches par an.

Dans ce cas, les salariés bénéficient légalement :

  • D’un repos compensateur
  • D’une majoration de salaire pour ce travail exceptionnel

Le non-respect de ces règles est sanctionné par une contravention de cinquième classe, appliquée autant de fois qu’il y a de personnes illégalement employées.

Un point important à noter est la compatibilité de cette législation avec le droit de l’Union européenne. La Cour de Justice de l’Union Européenne a confirmé que la réglementation française interdisant aux commerces d’ouvrir le dimanche n’était pas contraire au principe de libre circulation des marchandises, dans la mesure où les effets restrictifs sur les échanges communautaires ne dépassent pas le cadre des effets propres à une réglementation de ce genre.

L’importance de se faire accompagner pour ces ventes spécifiques

La complexité et l’évolution constante de la réglementation des ventes spécifiques rendent l’accompagnement juridique particulièrement pertinent.

Évaluation des risques juridiques

Les risques juridiques liés au non-respect des règles encadrant les ventes spécifiques sont multiples :

  • Sanctions administratives (amendes pouvant atteindre plusieurs dizaines de milliers d’euros)
  • Sanctions pénales (jusqu’à des peines d’emprisonnement pour certaines infractions)
  • Actions en responsabilité civile intentées par les concurrents ou les consommateurs
  • Atteinte à la réputation commerciale

Une évaluation préalable des pratiques commerciales par un professionnel du droit permet d’identifier ces risques et de les prévenir efficacement. Cette démarche est d’autant plus importante que la jurisprudence en la matière évolue constamment, comme en témoignent les nombreuses décisions récentes citées dans cet article.

Mise en conformité des pratiques

Au-delà de l’évaluation des risques, un accompagnement juridique permet une mise en conformité globale des pratiques commerciales. Cela concerne notamment :

  • La rédaction des documents commerciaux (publicités, conditions de vente)
  • L’information des consommateurs (notamment sur l’absence de droit de rétractation dans les foires et salons)
  • Les procédures de déclaration préalable (ventes au déballage, liquidations)
  • L’organisation des périodes de soldes dans le respect de la réglementation
  • La gestion du travail dominical et des contreparties pour les salariés

Une mise en conformité bien menée constitue un véritable avantage concurrentiel, en évitant les sanctions mais aussi en renforçant la confiance des consommateurs.

Naviguer dans ce labyrinthe réglementaire peut s’avérer complexe pour les commerçants. Si vous envisagez d’organiser une vente au déballage, de participer à une foire ou un salon, ou simplement de vous assurer que vos pratiques de soldes sont conformes à la législation en vigueur, notre cabinet peut vous apporter l’éclairage juridique nécessaire pour sécuriser vos activités commerciales.

Sources

  • Code de commerce, notamment articles L. 310-1 à L. 310-7 et R. 310-1 à R. 310-19 (ventes réglementées)
  • Code de la consommation, articles L. 121-1 et suivants, L. 221-1 et suivants (pratiques commerciales et contrats)
  • Code du travail, articles L. 3132-1 et suivants (repos dominical)
  • Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie
  • Loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises
  • Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 (loi PACTE)
  • Loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire
  • Ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 relative aux annonces de réduction de prix

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