Avant d’aborder les modalités de leur saisie, il est essentiel d’approfondir votre connaissance des droits incorporels, leur définition et leur domaine. La saisie des droits incorporels présente deux visages distincts : exécutoire ou conservatoire. Ces deux procédures répondent à des besoins différents et s’utilisent dans des contextes spécifiques.
Deux approches, deux objectifs
La saisie exécutoire vise à vendre les droits incorporels du débiteur pour payer le créancier. La saisie conservatoire cherche seulement à les rendre indisponibles temporairement. L’une est définitive, l’autre provisoire. Ces principes s’appliquent notamment aux droits d’associé et aux valeurs mobilières, dont la saisie présente des enjeux spécifiques.
La saisie exécutoire : puissante mais exigeante
Conditions strictes
- Titre exécutoire obligatoire (jugement, acte notarié)
- Créance liquide et exigible
- Respect des délais légaux
Procédure formelle
- Signification au tiers détenteur
- Dénonciation au débiteur sous 8 jours
- Indisponibilité immédiate des droits
- Vente possible après un mois
Pour une vue d’ensemble plus détaillée des étapes concrètes de mise en œuvre et des pièges à éviter, consultez notre guide pratique sur la saisie des droits incorporels.
Cette procédure permet d’aller jusqu’au bout : la vente des droits et le paiement du créancier. Pour comprendre les mécanismes et particularités de cette vente forcée qui succède à la saisie, il est essentiel d’approfondir ce processus.
La saisie conservatoire : souple et préventive
Conditions allégées
- Pas de titre exécutoire nécessaire
- Créance paraissant fondée en son principe
- Circonstances menaçant le recouvrement
- Autorisation du juge (sauf exceptions)
Mise en œuvre simplifiée
- Signification au tiers détenteur
- Dénonciation au débiteur
- Indisponibilité des droits pour une durée limitée
Elle fige la situation sans aller jusqu’à la vente.
Effets juridiques : des différences essentielles
La saisie exécutoire rend les droits indisponibles jusqu’à leur vente. La saisie conservatoire les bloque temporairement, dans l’attente d’un titre exécutoire.
La conservatoire doit être convertie en saisie exécutoire dans un délai d’un mois après l’obtention du titre exécutoire.
Les dividendes et fruits des droits sont également bloqués dans les deux cas.
Forces et faiblesses de chaque approche
Saisie exécutoire
✓ Solution définitive
✓ Paiement effectif possible
✓ Force juridique supérieure
✗ Exige un titre exécutoire
✗ Procédure longue
✗ Coûts plus élevés
Saisie conservatoire
✓ Rapidité d’action
✓ Effet de pression sur le débiteur
✓ Pas besoin de titre exécutoire initial
✗ Mesure temporaire
✗ Nécessité de conversion ultérieure
✗ Frais supplémentaires en cas de conversion
Stratégies pour les créanciers
La saisie conservatoire sert souvent d’arme psychologique. Elle montre au débiteur votre détermination à recouvrer la créance.
L’effet de surprise joue pour la conservatoire : le débiteur ne peut pas anticiper et organiser son insolvabilité.
Pour la saisie exécutoire, identifiez précisément les droits incorporels du débiteur avant d’agir. Ciblez ceux qui ont une valeur marchande réelle.
Quand choisir l’une ou l’autre ?
Optez pour la saisie conservatoire quand :
- Vous n’avez pas encore de titre exécutoire
- Le débiteur risque d’organiser son insolvabilité
- Vous souhaitez exercer une pression immédiate
- Vous disposez d’informations sur un patrimoine menacé
Préférez la saisie exécutoire quand :
- Vous possédez un titre exécutoire définitif
- Les négociations ont échoué
- Le débiteur ne répond plus
- Le droit incorporel a une valeur marchande évidente
Les deux procédures peuvent se compléter. Commencez par une conservatoire, puis convertissez-la en exécutoire après obtention du titre. Pour toute question ou besoin d’assistance concernant la mise en œuvre ou la contestation d’une saisie conservatoire ou exécutoire de parts sociales, il est fortement recommandé de consulter un avocat expert en la matière.
Sources
- Code des procédures civiles d’exécution, articles L. 511-1 à L. 511-2 et L. 521-1
- Articles R. 524-1 à R. 524-6 du code des procédures civiles d’exécution
- Répertoire de procédure civile, « Saisie des droits incorporels » (Dalloz, 2023)