Saisie malgré un dossier de surendettement

La saisie malgré un dossier de surendettement est-elle possible ?

Table des matières

Une situation de surendettement fragilise considérablement votre situation financière et personnelle. Le dépôt d’un dossier auprès de la Banque de France est une démarche essentielle pour trouver des solutions et obtenir une protection contre vos créanciers.

La question se pose alors : une saisie malgré un dossier de surendettement peut-elle encore être pratiquée ?

Si le principe est une suspension des poursuites, de nombreuses exceptions existent et rendent la situation complexe.

Cet article a pour but de vous offrir une vue d’ensemble claire de ce principe et de ses limites, en vous orientant vers des ressources plus détaillées, comme un point conseil budget ou un avocat expérimenté, pour chaque point abordé.

Le principe : la suspension automatique des saisies après la recevabilité du dossier

Lorsqu’une personne ne parvient plus à faire face à l’ensemble de ses dettes non professionnelles, elle peut déposer un dossier de surendettement auprès de la commission de surendettement des particuliers, une instance administrative gérée par la Banque de France. La première étape cruciale est la décision de recevabilité de ce dossier. Conformément à l’article L. 722-2 du Code de la consommation, si votre dossier est déclaré recevable, une protection importante se met en place : la suspension et l’interdiction automatiques des procédures d’exécution et des cessions de créances.

Concrètement, à compter de la notification de cette décision, un créancier ne peut plus engager une nouvelle procédure de saisie (saisie-attribution sur un compte bancaire, saisie des rémunérations, cession sur salaire, etc.) et les procédures déjà en cours sont automatiquement suspendues. Cette protection est temporaire, la durée de la suspension ne pouvant excéder deux ans.

Elle prend fin lorsque des mesures de traitement du surendettement sont en mise en place (approbation du plan conventionnel de redressement, mesures imposées, ou ouverture d’une procédure de rétablissement personnel).

Il est important de noter que cette suspension n’est pas immédiate au jour du dépôt de votre dossier. Elle ne prend effet qu’à compter de la décision de recevabilité, ce qui peut prendre plusieurs semaines. Pendant ce délai, une saisie reste techniquement possible.

Pour éviter cela, le débiteur peut demander à la commission, dès le dépôt de son dossier, de saisir le juge des contentieux de la protection afin d’obtenir une suspension anticipée des poursuites (une faculté souvent exercée par le président de la commission en cas d’urgence). Pour une compréhension globale des différentes phases, vous pouvez consulter notre article sur les étapes de la procédure de surendettement.

Les exceptions : quand la saisie reste possible malgré le surendettement

Le principe de la suspension des saisies connaît plusieurs exceptions notables. Dans ces cas précis, un créancier peut légalement poursuivre ou engager une mesure de saisie, même si votre dossier de surendettement a été jugé recevable par la décision de la commission.

Les dettes exclues du principe de suspension

Certaines dettes, en raison de leur nature particulière (on parle de la nature de la dette), ne sont pas concernées par la suspension des poursuites. Une procédure de saisie peut donc être engagée pour obtenir le paiement :

  • Des dettes liées à une obligation alimentaire : il s’agit principalement des pensions alimentaires. Le créancier d’aliments peut continuer les mesures d’exécution, y compris par une cession sur salaire, pour obtenir le paiement de sa créance.
  • Des amendes pénales : les dettes dues à l’État suite à une condamnation pénale ne sont pas affectées par la procédure de surendettement.
  • Des indemnisations allouées aux victimes d’infractions pénales : les sommes dues à une victime à titre de dommages et intérêts dans le cadre d’un jugement pénal sont également exclues.

Le cas particulier de la saisie immobilière déjà engagée

La situation est différente lorsqu’une procédure de saisie immobilière est déjà en cours. La suspension n’est pas automatique si la date de la vente forcée de la résidence principale (l’audience d’adjudication) a déjà été fixée par un juge avant la décision de recevabilité du dossier de surendettement. Dans ce cas, la vente peut avoir lieu.

La commission de surendettement a toutefois la possibilité de demander au juge de l’exécution un report de la date de la vente, mais le juge n’est pas tenu d’accepter. Cette situation est particulièrement délicate et fait l’objet d’un traitement juridique spécifique, comme nous l’expliquons dans notre article sur le débiteur saisi et surendetté en matière de saisie immobilière.

L’importance de la liste des créanciers

Lorsque vous constituez votre dossier de surendettement, vous devez déclarer la totalité de vos créanciers. La protection offre par la procédure ne s’applique qu’aux créanciers qui ont été informés de la recevabilité de votre dossier par la commission.

Un créancier que vous auriez omis de déclarer n’est pas lié par la suspension des saisies. Il conserve donc toute sa liberté d’action et peut engager une mesure d’exécution pour recouvrer sa créance, y compris une saisie sur votre compte bancaire ou une cession de votre salaire.

La durée limitée de la protection

La suspension des procédures d’exécution n’est pas illimitée. La loi fixe une durée maximale de deux à cette protection, à compter de la décision de recevabilité. Ce délai vise à garantir que la situation du débiteur soit traitée de manière efficace sans prolonger indéfiniment la suspension au détriment des créanciers.

Si aucune solution n’est trouvée dans ce délai (plan conventionnel, effacement partiel des dettes, rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou avec liquidation), les créanciers recouvrent leur droit de poursuivre le débiteur.

La nuance essentielle : interdiction des poursuites ne signifie pas interdiction d’agir en justice

Il est fondamental de distinguer une mesure d’exécution (la saisie) d’une action en justice. La suspension liée au surendettement interdit au créancier de procéder au recouvrement forcé de sa créance pour vous faire payer vos dettes.

En revanche, elle ne lui interdit pas d’agir en justice pour faire reconnaître son droit et obtenir un titre exécutoire judiciaire.

Par exemple, un créancier qui ne dispose pas encore d’un jugement peut tout à fait vous assigner devant un tribunal pendant la procédure de surendettement. Son but sera d’obtenir une décision de justice qui constate sa créance et vous condamne à la payer.

Il ne pourra pas utiliser ce jugement pour pratiquer une saisie tant que la protection du surendettement est active, mais il aura sécurisé sa créance avec un titre exécutoire, qui constitue une garantie bien plus forte qu’un simple acte sous seing privé et une sûreté pour l’avenir.

Cette démarche est parfaitement légale, comme l’a confirmé la Cour de cassation dans un arrêt de principe (Cass. 1re civ., 1er mars 2017, n° 15-28.012).

La question de la durée de validité des titres est complexe, et notre article sur le temps durant lequel un huissier peut réclamer une dette apporte des éclaircissements sur ce point.

Chaque situation de surendettement est unique et les interactions avec les procédures de saisie sont complexes. Pour une analyse précise de votre cas et la défense de vos droits, l’assistance d’un avocat compétent en voies d’exécution est une démarche protectrice.

Foire aux questions

Un huissier de justice peut-il saisir mon compte bancaire si mon dossier de surendettement est recevable ?

En principe, non. La décision de recevabilité de votre dossier de surendettement entraîne la suspension de toute procédure de saisie, y compris la saisie-attribution sur votre compte bancaire, pour les dettes incluses dans le dossier. Une saisie est une mesure grave, mais elle ne remet pas en cause votre droit au compte et l’accès à vos moyens de paiement essentiels.

La suspension des saisies est-elle immédiate après le dépôt du dossier à la Banque de France ?

Non, la suspension n’est pas immédiate. Elle ne prend effet qu’à compter de la décision de recevabilité du dossier par la commission, ce qui peut prendre plusieurs semaines. Pendant cet intervalle, une saisie reste possible, car un commissaire de justice (anciennement huissier de justice) n’a pas encore reçu de notification officielle pour suspendre ses actions.

Quelles dettes ne sont pas concernées par la procédure de surendettement ?

En raison de leur nature spécifique, les dettes alimentaires, les amendes pénales et les indemnités dues aux victimes d’infractions sont exclues de la suspension des poursuites. Une saisie reste possible pour le recouvrement de ces dettes spécifiques. Les dettes de loyer, en revanche, sont bien concernées par la suspension, même si elles peuvent être payées en priorité dans le plan de redressement.

Que se passe-t-il si j’oublie un créancier dans mon dossier de surendettement ?

Un créancier non déclaré dans le dossier n’est pas informé de la procédure et n’est donc pas lié par la suspension des saisies. Il conserve le droit de vous poursuivre individuellement pour obtenir le paiement de sa créance. C’est pourquoi une information complète est cruciale lors du dépôt.

La saisie de ma voiture est-elle possible pendant la procédure ?

Non, si votre dossier est recevable. La saisie de véhicule est une procédure d’exécution qui est suspendue par la décision de recevabilité. Une exception existe si le véhicule est indispensable à votre activité professionnelle, car il est alors considéré comme un bien insaisissable. La loi définit une liste de biens comme étant insaisissables, et un véhicule de travail en fait souvent partie.

Mon salaire peut-il encore être saisi après la recevabilité de mon dossier ?

La cession des rémunérations (ou saisie sur salaire) est une procédure d’exécution qui est suspendue par la décision de recevabilité, sauf si elle vise au paiement d’une dette alimentaire. Dans ce cas, le tiers saisi (votre employeur) devra continuer la cession.

Que se passe-t-il à la fin de la suspension des saisies ?

La fin de la suspension ne signifie pas un retour à la situation antérieure. La commission décide de l’orientation de votre dossier. Selon votre capacité de remboursement, un plan conventionnel peut être négocié pour rembourser vos dettes de manière échelonnée. Un moratoire (suspension des paiements jusqu’à 2 ans) peut aussi être imposé. Si votre situation est jugée irrémédiablement compromise, une procédure de rétablissement personnel avec liquidation ou sans liquidation peut être ouverte, menant à un effacement de vos dettes.

Que signifie l’inscription au FICP ?

Le dépôt d’un dossier de surendettement entraîne une inscription au FICP (Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers). C’est une information centralisée par la Banque de France signalant une difficulté de paiement. Cette inscription, qui dure le temps de la procédure (avec un maximum de 7 ans pour un plan), peut compliquer l’obtention d’un nouveau crédit. C’est un arrêt porté à la capacité d’endettement pour garantir le traitement du dossier existant.

Quelle est la différence entre un bien saisissable et un bien insaisissable ?

Le Code des procédures civiles d’exécution fixe une liste de biens jugés indispensables à la vie courante et à l’activité professionnelle du débiteur et de sa famille. Ces biens sont dits insaisissables (exemple : vêtements, literie, instruments de travail). Tout ce qui n’est pas sur cette liste est en principe saisissable et peut faire partie du patrimoine qui servira à rembourser les créanciers, notamment dans le cadre d’un rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.

Une cession de revenu consentie volontairement est-elle aussi suspendue ?

Oui. La décision de recevabilité suspend et interdit non seulement les saisies forcées mais aussi les cessions de rémunérations que vous auriez pu consentir directement à un créancier. Toute cession consentie avant la procédure doit être stoppée, sauf pour une dette alimentaire. Une lettre recommandée de la commission informe généralement l’employeur de cet arrêt.

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