Sanctions de l’usure : un décryptage des conséquences pénales et civiles

Table des matières

La réglementation sur l’usure vise à protéger l’emprunteur contre les taux d’intérêt manifestement excessifs. Lorsqu’un crédit est qualifié d’usuraire, les conséquences pour le prêteur ne se limitent pas à une simple rectification contractuelle. Le droit français a mis en place un arsenal de sanctions, à la fois pénales et civiles, pour réprimer ces pratiques. Comprendre ces mécanismes est essentiel pour tout emprunteur, qu’il soit un particulier ou un professionnel, afin de faire valoir ses droits. Comme nous l’expliquons dans notre guide sur la réglementation de l’usure en droit français, la détermination du caractère usuraire d’un prêt obéit à des règles techniques qui commandent ensuite l’application de sanctions rigoureuses.

La diversité des sanctions en cas de taux usuraire

La qualification d’un prêt usuraire ouvre la voie à une double répression. Sur le plan pénal, l’usure est constitutive d’un délit dont les sanctions peuvent être lourdes. Sur le plan civil, le contrat de prêt est corrigé afin de rétablir un équilibre financier et de restituer à l’emprunteur les sommes indûment perçues par le prêteur. Cette dualité de sanctions souligne la volonté du législateur de protéger l’ordre public économique tout en assurant la défense des intérêts privés de l’emprunteur lésé.

Les sanctions pénales de l’usure

La branche pénale du droit vient sanctionner les atteintes les plus graves en matière de crédit. Le délit d’usure est constitué par le simple dépassement du taux légal, avec des conséquences qui peuvent affecter lourdement le prêteur et ses intermédiaires.

La constitution du délit d’usure : éléments matériel et intentionnel

Pour qu’un délit d’usure soit reconnu, deux éléments doivent être réunis. L’élément matériel est simple à établir : il s’agit du fait de consentir un prêt à un taux effectif global (TEG) qui excède le seuil de l’usure applicable au moment de la conclusion du contrat. Ce seuil est publié périodiquement et varie selon la nature et le montant du crédit.

L’élément intentionnel, c’est-à-dire la volonté de commettre l’infraction, est quant à lui souvent présumé par les tribunaux. Les juges considèrent que les prêteurs, en particulier les professionnels du crédit, ne peuvent ignorer les taux de l’usure qui font l’objet d’une publication officielle. Cette approche qualifiée parfois de « délit mathématique » signifie que la bonne foi du prêteur ou son ignorance du seuil légal sont rarement des arguments suffisants pour échapper à une condamnation.

Les peines encourues : emprisonnement, amende, publications, fermeture d’entreprise

Les sanctions prévues par le Code de la consommation sont sévères. L’auteur d’un délit d’usure encourt une peine pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et une amende de 300 000 euros. Le tribunal peut prononcer l’une ou l’autre de ces peines, ou les cumuler.

Au-delà de ces sanctions principales, des peines complémentaires peuvent être ordonnées. Le juge peut exiger la publication du jugement de condamnation dans des journaux, aux frais du condamné, assurant ainsi une publicité négative à la pratique. Il peut également prononcer la fermeture, temporaire ou définitive, de l’entreprise au sein de laquelle l’infraction a été commise. En cas de fermeture, l’entreprise peut être contrainte de continuer à verser les salaires à son personnel pendant une durée fixée par le tribunal, qui ne peut excéder trois ans.

Les personnes visées : prêteur et complices

La loi ne vise pas uniquement le prêteur lui-même. L’article L. 341-50 du Code de la consommation étend la responsabilité pénale à toute personne qui « apporte à quelque titre et de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement son concours à l’obtention ou à l’octroi d’un prêt usuraire ». Cette formulation large permet d’inclure les intermédiaires, les courtiers ou tout conseil financier qui aurait sciemment participé au montage d’un crédit usuraire. Ces personnes sont alors considérées comme des auteurs principaux de l’infraction et encourent les mêmes peines que le prêteur.

La prescription de l’action publique : point de départ et particularités

Le point de départ de la prescription du délit d’usure présente une particularité destinée à protéger l’emprunteur. Selon l’article L. 341-51 du Code de la consommation, la prescription de l’action publique ne commence à courir qu’à compter du jour de la dernière perception d’intérêts ou de capital par le prêteur. Autrement dit, tant que le prêt est en cours de remboursement, le délit continue de se commettre et la prescription ne court pas. Chaque versement usuraire constitue une nouvelle matérialisation de l’infraction, ce qui permet à l’emprunteur d’agir en justice même plusieurs années après la conclusion du contrat.

Le déplafonnement des taux et l’absence de sanction pénale pour les découverts professionnels

La législation a évolué pour s’adapter aux besoins de financement des entreprises. La réglementation de l’usure ne s’applique plus aux crédits accordés aux personnes morales pour leur activité professionnelle, ni aux personnes physiques agissant pour leurs besoins professionnels. Une exception majeure subsiste cependant : les découverts en compte consentis à ces professionnels restent soumis à un taux plafond. Toutefois, le dépassement de ce taux ne déclenche pas de sanction pénale. La loi a prévu un régime spécifique où seules des sanctions civiles, comme la restitution du trop-perçu, sont applicables. Cette absence de sanction pénale, qui avait pourtant un effet dissuasif, reste un point débattu.

Les sanctions civiles de l’usure

Au-delà de la répression pénale, le droit civil organise la réparation du préjudice subi par l’emprunteur. L’objectif est de purger le contrat de sa clause illicite et de rétablir l’équilibre financier en restituant les sommes perçues en excès.

La suppression de l’excès et la nullité partielle de la stipulation d’intérêts

La sanction civile principale de l’usure n’est pas la nullité totale du contrat de prêt, ce qui obligerait l’emprunteur à rembourser immédiatement le capital. La loi a opté pour une solution plus protectrice : la seule stipulation d’intérêt est affectée. La sanction consiste en une réduction forcée du taux d’intérêt au niveau du seuil de l’usure en vigueur au moment du prêt. On parle de nullité partielle de la clause d’intérêts : seule la part excessive des intérêts est annulée. Cette sanction met en jeu les fondements de la responsabilité du banquier, qui doit garantir la conformité de ses contrats à l’ordre public économique. Les conséquences d’un TEG/TAEG usuraire sont donc directes et financières pour l’emprunteur, qui voit le coût de son crédit ramené à un niveau légal.

La juridiction compétente et les règles de procédure

L’action visant à faire constater le caractère usuraire d’un prêt et à obtenir la restitution des sommes trop-perçues relève de la compétence des juridictions civiles ou commerciales, selon la nature de l’emprunt et des parties. Si une procédure pénale est engagée pour le délit d’usure, la juridiction répressive est également compétente pour statuer sur l’action civile en réparation. Il est important de noter que la participation de l’emprunteur à l’opération ou l’exécution volontaire du contrat ne peuvent lui être opposées pour déclarer son action irrecevable.

Les règles d’imputation des perceptions excessives

Lorsque le caractère usuraire est établi, l’article L. 341-48 du Code de la consommation organise précisément la manière dont les sommes versées en trop doivent être traitées. Les perceptions excessives sont d’abord imputées sur les intérêts normaux restant dus. Si un solde subsiste après cette première imputation, il vient en déduction du capital de la créance. Cette imputation s’opère de plein droit, ce qui signifie qu’elle s’impose au prêteur sans qu’une décision de justice supplémentaire soit nécessaire sur ce point précis.

La restitution des sommes indûment perçues

Si, après imputation sur les intérêts et le capital, la créance se retrouve entièrement éteinte, les sommes qui auraient encore été perçues en excès par le prêteur doivent être restituées à l’emprunteur. Cette restitution s’accompagne du paiement d’intérêts au taux légal, qui courent à compter du jour où les paiements indus ont été effectués. Le prêteur est ainsi contraint de rembourser non seulement le surplus perçu, mais également les fruits que ce surplus a pu générer.

L’importance de l’assistance d’un avocat en cas de litige pour usure

Les litiges relatifs à l’usure sont d’une grande technicité. Ils impliquent une analyse méticuleuse du contrat de prêt, de l’offre préalable, et un recalcul du taux effectif global (TEG) qui peut s’avérer complexe. La preuve du caractère usuraire repose souvent sur des expertises financières pointues. De plus, les enjeux financiers et les conséquences juridiques, qu’elles soient civiles ou pénales, sont importants. L’assistance d’un avocat compétent en droit du crédit est donc déterminante pour évaluer la situation, rassembler les preuves nécessaires et défendre efficacement les droits de l’emprunteur. Notre cabinet est à votre disposition pour assurer votre défense en cas de litige lié à l’usure.

La confrontation avec un établissement de crédit peut être intimidante pour un particulier ou une petite entreprise. Un avocat saura non seulement argumenter sur le terrain juridique, mais aussi négocier avec la partie adverse pour trouver une solution amiable lorsque cela est possible. Si vous suspectez que votre prêt comporte un taux usuraire, il est recommandé de consulter un professionnel pour une analyse de votre situation. N’hésitez pas à contacter notre cabinet pour discuter de vos options et obtenir un conseil adapté à votre dossier.

Sources

  • Code de la consommation
  • Code monétaire et financier
  • Code pénal

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