Bons de caisse : définition, régime juridique et réformes (2025)

Table des matières

Le bon de caisse est un instrument financier permettant à une entreprise de se financer en empruntant directement auprès d’investisseurs, en dehors des circuits bancaires traditionnels. Longtemps associé à une certaine opacité, notamment en raison de sa forme anonyme, son régime juridique a été profondément modernisé pour s’adapter aux exigences de transparence et de sécurité des transactions. Cet article propose une synthèse de son fonctionnement, de sa nature juridique et des évolutions qui ont marqué ce placement. Notre cabinet, intervenant en droit bancaire et financier, observe que la compréhension de ces instruments est essentielle pour les entreprises émettrices comme pour les souscripteurs. Pour une vision complète, il est à noter que certains aspects spécifiques, comme la fiscalité des bons de caisse, sont traités dans des articles dédiés.

La nature juridique des bons de caisse : une qualification en constante évolution

La qualification juridique du bon de caisse a longtemps été une source d’incertitudes, une situation clarifiée par les réformes successives. Cette évolution a transformé un titre souple en un instrument plus encadré.

Avant le 31 octobre 2016 : un flou juridique entre prêts et titres négociables

Avant la grande réforme de 2016, les bons de caisse se caractérisaient par un régime juridique succinct qui entretenait une confusion sur leur nature exacte. Ils étaient considérés comme des titres négociables, pouvant être stipulés à ordre (transmissibles par endossement) ou au porteur (transmissibles par simple remise manuelle). Cette négociabilité les rapprochait des effets de commerce, bien que la jurisprudence et la doctrine aient longtemps débattu de cette assimilation. Leur cause résidait toujours dans un contrat de prêt, mais leur souplesse de transmission et leur possible anonymat en faisaient un instrument à la frontière de plusieurs catégories juridiques.

Après le 31 octobre 2016 : des titres nominatifs et non négociables

L’ordonnance du 28 avril 2016 a mis fin à l’ambiguïté en redéfinissant clairement le bon de caisse. Depuis le 31 octobre 2016, l’article L. 223-1 du Code monétaire et financier dispose qu’il s’agit de « titres nominatifs et non négociables ». Cette modification est fondamentale : elle supprime l’anonymat, chaque bon devant être inscrit au nom de son propriétaire dans un registre tenu par l’émetteur. De plus, en devenant « non négociable », le bon de caisse ne peut plus circuler par les mécanismes simplifiés du droit commercial (endossement ou tradition).

Les distinctions clés avec les valeurs mobilières et effets de commerce

La nouvelle définition permet de distinguer nettement le bon de caisse d’autres instruments. Contrairement aux valeurs mobilières (actions, obligations), il n’est pas fongible et ne peut être négocié sur un marché financier. Chaque bon représente un prêt distinct avec ses propres caractéristiques. Il se différencie également des effets de commerce (lettre de change, billet à ordre) qui sont des instruments de paiement destinés à circuler. Le bon de caisse, lui, constate une créance de remboursement d’un prêt et sa transmission est soumise à un formalisme plus lourd.

L’émission des bons de caisse : conditions et obligations légales

L’encadrement de l’émission des bons de caisse vise à protéger les souscripteurs tout en offrant une source de financement alternative aux entreprises.

Les émetteurs autorisés : établissements de crédit et commerçants

L’émission de bons de caisse est réservée à deux catégories d’acteurs. D’une part, les établissements de crédit, qui les utilisent pour collecter de l’épargne. D’autre part, les commerçants, qu’il s’agisse de personnes physiques ou de sociétés commerciales. Pour ces derniers, la loi impose une condition de maturité : ils doivent avoir établi le bilan de leur premier exercice commercial. Cette exigence vise à garantir une certaine solidité financière et à éviter que des entités fraîchement créées ne captent l’épargne sans un minimum de recul sur leur activité.

Les modalités d’émission : durée, taux d’intérêt et interdiction de l’anonymat

Chaque émission doit respecter des règles précises. La durée du prêt constaté par le bon de caisse ne peut excéder sept ans. Le taux d’intérêt est en principe librement fixé par les parties, mais il doit être fixe et ne peut être usuraire. La principale obligation depuis 2016 est l’interdiction de l’anonymat. L’émetteur doit tenir un registre mentionnant le nom du propriétaire de chaque bon et remettre au souscripteur un certificat d’inscription. Cette transparence est une condition essentielle du nouveau régime.

Le cadre réglementaire de l’offre au public et du monopole bancaire

L’émission de bons de caisse constitue une exception au monopole bancaire, qui interdit à toute entreprise autre qu’un établissement de crédit de recevoir des fonds remboursables du public. Le législateur a ainsi ouvert une voie de financement direct entre les entreprises et les épargnants. Toutefois, cette pratique est encadrée pour protéger l’épargne publique, notamment lorsque l’émission s’apparente à une offre au public. Les règles visent à assurer une information claire et sincère des souscripteurs sur la situation de l’émetteur.

La circulation des bons de caisse : transmission et sûretés

Avec la fin de la négociabilité, la manière de transmettre un bon de caisse ou de l’utiliser comme garantie a été entièrement revue et alignée sur le droit commun des créances.

La cession des bons de caisse : règles de droit commun des créances

Un bon de caisse émis après le 31 octobre 2016 n’est plus transmissible par simple remise ou endossement. Sa circulation obéit désormais aux formalités de la cession de créance, régie par les articles 1321 et suivants du Code civil. Le transfert de propriété s’opère par un écrit entre le cédant et le cessionnaire. Pour que la cession soit opposable à l’émetteur (le débiteur), elle doit lui être notifiée ou il doit en prendre acte. Cette formalisation alourdit la circulation mais renforce la sécurité juridique des transactions.

La mise en garantie des bons de caisse : gage et nantissement

En tant qu’actif incorporel représentant une créance, le bon de caisse peut être affecté en garantie d’une autre dette, par exemple pour garantir un prêt bancaire. Cette opération s’analyse comme un nantissement de créance, une forme de sûreté mobilière. La constitution de cette garantie est soumise à un formalisme précis, notamment un écrit, pour être valable. Pour en savoir plus sur les principes généraux applicables, vous pouvez consulter notre article sur le droit des sûretés mobilières.

L’impact des procédures collectives et régimes matrimoniaux

La circulation et la valeur d’un bon de caisse peuvent être affectées par la situation juridique de son détenteur. En cas d’ouverture d’une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire), les droits du titulaire peuvent être gelés ou la créance peut devoir être déclarée au passif. L’impact des procédures collectives sur les sûretés est un sujet complexe qui peut affecter la réalisation de la garantie. De même, si le bon de caisse est un bien commun entre époux, sa mise en garantie pour la dette d’un tiers requiert le consentement des deux conjoints, conformément à l’article 1422 du Code civil. Enfin, un créancier peut chercher à recouvrer sa créance en pratiquant une saisie sur le bon de caisse ; il utilise alors une procédure spécifique, la saisie-attribution, qui permet de saisir la créance directement auprès de l’émetteur.

Le paiement des bons de caisse : débiteur, bénéficiaire et prescription

Le dénouement de l’opération, c’est-à-dire le remboursement du prêt, est l’étape finale qui obéit également à des règles claires.

Détermination du payeur (solvens) et du bénéficiaire (accipiens)

Le débiteur de l’obligation de remboursement (le *solvens*) est toujours la personne morale ou physique qui a émis le bon de caisse. Le bénéficiaire du paiement (l’*accipiens*) est le créancier dont le nom est inscrit dans le registre de l’émetteur. La tenue de ce registre est donc centrale car elle permet d’identifier sans ambiguïté la personne qui a le droit de recevoir les fonds à l’échéance.

Les modalités de paiement et la preuve de la libération

Le paiement intervient à l’échéance fixée dans le bon de caisse. Il inclut le remboursement du capital prêté ainsi que les intérêts convenus. La preuve du paiement, qui libère l’émetteur de son obligation, est assurée par les écritures comptables et la mise à jour du registre des bons. La remise matérielle d’un titre n’est plus pertinente depuis que les bons sont devenus nominatifs.

La prescription des actions en paiement des bons de caisse

L’action en paiement du bon de caisse se prescrit selon les règles de droit commun. La jurisprudence a confirmé que, les bons de caisse n’étant pas des effets de commerce, c’est la prescription de cinq ans applicable aux obligations nées entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants (article L. 110-4 du Code de commerce) qui s’applique. Le point de départ de ce délai est la date d’échéance du bon.

La complexité des instruments financiers, même modernisés, requiert une analyse attentive. Notre cabinet se tient à votre disposition pour vous conseiller sur leur utilisation et sécuriser vos opérations.

Foire aux questions

Qu’est-ce qu’un bon de caisse ?

Un bon de caisse est un titre qui représente la reconnaissance d’une dette par une entreprise (l’émetteur) envers un investisseur qui lui a consenti un prêt. Il s’agit d’un instrument de financement direct, nominatif et non négociable, avec une échéance et un taux d’intérêt déterminés à l’avance.

Qui peut émettre un bon de caisse ?

L’émission de bons de caisse est autorisée pour les établissements de crédit ainsi que pour les commerçants (personnes physiques ou sociétés commerciales) ayant déjà établi le bilan de leur premier exercice commercial.

Les bons de caisse sont-ils anonymes ?

Non, depuis la réforme de 2016, les bons de caisse ne peuvent plus être anonymes. Ils sont obligatoirement nominatifs, c’est-à-dire inscrits au nom de leur propriétaire dans un registre tenu par l’entreprise émettrice.

Comment un bon de caisse peut-il être transmis à une autre personne ?

La transmission d’un bon de caisse ne se fait plus par simple remise matérielle. Elle doit suivre les règles de la cession de créance du Code civil, ce qui implique la rédaction d’un acte de cession et sa notification à l’émetteur du bon.

Quelle est la durée maximale d’un bon de caisse ?

La durée maximale d’un prêt constaté par un bon de caisse est fixée à sept ans. L’échéance de remboursement doit être déterminée dès l’émission du titre.

Un bon de caisse peut-il servir de garantie pour un prêt ?

Oui, un bon de caisse peut être utilisé comme garantie. L’opération s’analyse comme un nantissement de créance, une sûreté qui permet au créancier de se faire payer sur la valeur du bon en cas de défaillance du débiteur.

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