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Comprendre la saisie-appréhension : récupérer vos biens meubles corporels

Table des matières

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La récupération d’un bien non restitué ou non livré constitue souvent un casse-tête juridique. Comment reprendre possession d’un véhicule non rendu après un prêt? Comment récupérer du matériel dont vous êtes propriétaire? La saisie-appréhension représente la solution légale pour récupérer ces biens. Décryptage de ce mécanisme juridique méconnu.

Qu’est-ce que la saisie-appréhension ?

La saisie-appréhension est une procédure d’exécution forcée qui permet au créancier de faire appréhender des meubles que le débiteur est tenu de lui livrer ou de lui restituer. L’article L.222-1 du Code des procédures civiles d’exécution (CPCE) dispose que « le commissaire de justice chargé de l’exécution fait appréhender les meubles que le débiteur est tenu de livrer ou de restituer au créancier en vertu d’un titre exécutoire, sauf si le débiteur s’offre à en effectuer le transport à ses frais ».

Contrairement à la saisie-vente qui vise à vendre un bien pour payer une dette d’argent, la saisie-appréhension a pour objectif la remise matérielle du bien lui-même. Elle diffère également de la saisie-revendication qui n’est qu’une mesure conservatoire rendant le bien indisponible en attendant sa remise.

Conditions de mise en œuvre

Un titre exécutoire indispensable

Pour engager une saisie-appréhension, le créancier doit disposer d’un titre exécutoire. Selon l’article R.222-1 du CPCE, « un bien meuble corporel peut être appréhendé entre les mains de celui qui est tenu de le remettre en vertu d’un titre exécutoire ou directement entre les mains d’un tiers qui le détient pour le compte de ce dernier. »

  • Un jugement devenu définitif
  • Une décision de justice assortie de l’exécution provisoire
  • Un acte notarié revêtu de la formule exécutoire
  • Une ordonnance d’injonction de délivrer ou de restituer devenue exécutoire

Sans titre exécutoire, impossible de procéder à une saisie-appréhension. Le créancier peut cependant solliciter une ordonnance d’injonction de délivrer ou de restituer auprès du juge de l’exécution.

Les biens concernés

Seuls les biens meubles corporels peuvent faire l’objet d’une saisie-appréhension. La procédure vise:

  • Les objets mobiliers (mobilier, électroménager, etc.)
  • Les véhicules
  • Le matériel professionnel
  • Les marchandises

Les biens immeubles et les meubles incorporels (comme les parts sociales ou les créances) sont exclus du champ d’application.

Les obligations visées

La saisie-appréhension concerne uniquement les obligations de délivrer ou de restituer. Ces obligations peuvent découler:

  • D’un contrat de vente (obligation de délivrance)
  • D’un contrat de prêt (obligation de restitution)
  • D’un contrat de location ou de crédit-bail (restitution en fin de contrat)
  • D’une clause de réserve de propriété (restitution après résolution de la vente)

Déroulement de la procédure

Entre les mains du débiteur direct

Le commandement préalable

En principe, la saisie-appréhension débute par un commandement de délivrer ou de restituer signifié au débiteur. L’article R.222-2 du CPCE prévoit que ce commandement doit contenir, à peine de nullité:

  • La mention du titre exécutoire
  • L’indication que le débiteur peut transporter le bien à ses frais dans un délai de 8 jours
  • L’avertissement qu’à défaut, le bien sera appréhendé à ses frais
  • L’indication des voies de recours possibles

Ce commandement offre au débiteur une dernière chance de s’exécuter volontairement.

La procédure sans commandement

Dans certaines situations, le commissaire de justice peut procéder à l’appréhension immédiate, sans commandement préalable. L’article R.222-3 du CPCE autorise cette procédure accélérée lorsque:

  • Le débiteur est présent lors de la tentative d’exécution
  • Le commissaire de justice lui a demandé s’il s’offre à effectuer le transport du bien à ses frais
  • Le débiteur a refusé cette proposition

Cette procédure express permet d’éviter que le débiteur ne fasse disparaître le bien après avoir reçu le commandement.

Le procès-verbal et la remise du bien

Qu’il y ait remise volontaire ou appréhension forcée, le commissaire de justice dresse un procès-verbal détaillé. Selon l’article R.222-4 du CPCE, « il est dressé acte de la remise volontaire ou de l’appréhension du bien. Cet acte contient un état détaillé du bien. »

Le commissaire peut photographier le bien. Ces photos sont annexées à l’acte. Une copie du procès-verbal est remise au débiteur s’il est présent, sinon elle lui est notifiée.

Si le bien est remis à un créancier gagiste, des formalités supplémentaires sont prévues par l’article R.222-6 du CPCE.

Entre les mains d’un tiers

La sommation au tiers détenteur

Lorsque le bien se trouve entre les mains d’un tiers, la procédure diffère. L’article R.222-7 du CPCE impose une sommation directement signifiée au tiers détenteur et dénoncée au débiteur.

Cette sommation contient, à peine de nullité:

  • Une copie du titre exécutoire
  • Une injonction de remettre le bien dans un délai de 8 jours
  • La possibilité pour le tiers de communiquer ses motifs d’opposition
  • L’indication que les difficultés seront portées devant le juge de l’exécution

L’autorisation judiciaire spéciale

Si le tiers refuse de remettre volontairement le bien, le créancier doit saisir le juge de l’exécution. L’article R.222-8 du CPCE précise que « à défaut de remise volontaire dans le délai imparti, le créancier saisissant peut demander au juge de l’exécution du lieu où demeure le tiers détenteur du bien d’ordonner la remise de celui-ci. »

L’autorité judiciaire intervient pour protéger les droits du tiers, qui n’est pas directement visé par le titre exécutoire.

Une protection renforcée existe lorsque le bien se trouve dans le local d’habitation du tiers: dans ce cas, l’article L.222-1 du CPCE exige une autorisation spéciale du juge.

La protection du tiers détenteur

Le tiers détenteur bénéficie de plusieurs garanties:

  1. Il peut justifier son refus de remettre le bien
  2. Il peut saisir lui-même le juge de l’exécution
  3. Il peut invoquer un droit propre sur le bien (droit de rétention, par exemple)

Selon l’article R.222-9 du CPCE, l’appréhension entre les mains du tiers n’est possible que sur présentation de la décision du juge.

Cas particuliers

Biens placés dans un coffre-fort

La saisie de biens placés dans un coffre-fort obéit à un régime spécifique prévu aux articles R.224-1 à R.224-12 du CPCE.

  1. Signifier un acte de saisie à l’établissement où se trouve le coffre
  2. Faire signifier un commandement au débiteur
  3. Procéder à l’ouverture du coffre en présence du débiteur ou, à défaut, d’un représentant de l’établissement
  4. Dresser un inventaire des biens saisis

Ce dispositif protège à la fois les intérêts du créancier et le secret bancaire.

Appréhension d’un véhicule terrestre à moteur

Pour les véhicules, l’article R.222-16 du CPCE autorise le recours aux techniques d’immobilisation prévues pour la saisie-vente:

  • Utilisation d’un sabot de Denver
  • Enlèvement et mise en fourrière
  • Immobilisation par tout moyen rendant le véhicule inutilisable

Ces mesures permettent d’empêcher la disparition du véhicule avant son appréhension définitive.

Remise à un créancier gagiste

Quand le bien est appréhendé pour être remis à un créancier gagiste, la procédure se complique. L’article R.222-6 du CPCE prévoit que:

  • L’acte d’appréhension vaut saisie sous la garde du créancier
  • Le créancier peut ensuite procéder à la vente selon les règles de la saisie-vente
  • Un acte contenant diverses mentions obligatoires est signifié au débiteur
  • Le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour procéder à une vente amiable

Des règles particulières s’appliquent depuis le décret n°2021-1888 du 29 décembre 2021 si le créancier met en œuvre la procédure de réalisation simplifiée prévue par l’article 2346 du Code civil.

La procédure de saisie-appréhension, bien que technique, constitue un outil efficace pour récupérer des biens. Sa mise en œuvre nécessite cependant de respecter un formalisme strict, sous peine de nullité. Il convient également de prendre en compte les obstacles et limites potentiels à ces procédures. Pour naviguer dans ces complexités, l’assistance d’un avocat expert en voies d’exécution est souvent indispensable.

Sources

  • Code des procédures civiles d’exécution, articles L.222-1 à L.222-2 et R.222-1 à R.222-16
  • « Saisie-appréhension – Rémy BOUR – Décembre 2015 », Répertoire de procédure civile Dalloz
  • « Saisie-appréhension et saisie-revendication des biens meubles corporels », Catherine Tirvaudey-Bourdin, JurisClasseur Procédure civile, 22 août 2022
  • « Saisie-revendication – Rémy BOUR – Avril 2017 », Répertoire de procédure civile Dalloz
  • Décret n°2021-1888 du 29 décembre 2021 portant diverses mesures relatives aux voies d’exécution

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