Le cautionnement, pilier du droit des sûretés, finit toujours par s’éteindre. Cette garantie personnelle peut disparaître de deux manières distinctes : par voie accessoire ou par voie principale. Comprendre ces mécanismes est essentiel pour les créanciers comme pour les cautions. Pour toute expertise juridique en la matière, nos avocats sont à votre disposition.
I. L’extinction par voie accessoire : quand la dette principale disparaît
A. Le principe d’accessoire
Le cautionnement est un contrat accessoire. Son sort dépend de l’obligation principale qu’il garantit. L’article 2313 du Code civil énonce cette règle fondamentale : quand l’obligation principale s’éteint, le cautionnement disparaît aussi.
Cette extinction découle du caractère accessoire du cautionnement. La caution s’engage à payer la dette d’un autre. Sans dette, pas de garantie possible.
B. Les cas d’extinction de la dette principale
1. Le paiement
Le paiement de la dette par le débiteur principal libère la caution. C’est à elle de prouver ce paiement si le créancier la poursuit. Un paiement partiel n’éteint le cautionnement qu’à hauteur des sommes versées.
Dans le cas d’un cautionnement partiel, le paiement s’impute d’abord sur la partie non cautionnée de la dette. Cette règle protège le créancier.
2. La compensation
La compensation entre créancier et débiteur principal éteint le cautionnement. La caution peut s’en prévaloir même si le débiteur y a renoncé. Cette règle s’applique aux cautions simples et solidaires.
3. La dation en paiement
Quand le créancier accepte un bien en paiement de la dette principale, le cautionnement s’éteint. La dation en paiement suppose une acceptation libre et réelle du créancier.
4. La confusion, novation, remise de dette
La confusion survient quand les qualités de créancier et débiteur se réunissent. Par exemple, quand le créancier hérite du débiteur ou inversement.
La novation éteint l’ancienne obligation en créant une nouvelle. Elle emporte extinction des sûretés, dont le cautionnement.
La remise de dette accordée au débiteur libère aussi les cautions. Mais pas l’inverse : la remise consentie à la caution ne libère pas le débiteur.
5. La prescription et la nullité
La prescription de la dette principale éteint le cautionnement. La caution peut l’invoquer même si le débiteur ne s’en prévaut pas.
La nullité ou résolution du contrat principal entraîne la caducité du cautionnement. Toutefois, la caution reste tenue de l’obligation de restitution, notamment dans les prêts annulés.
II. L’extinction par voie principale : quand seul le cautionnement s’éteint
A. Extinction de l’obligation de règlement
1. Le paiement par la caution
Le paiement effectué par la caution éteint son obligation envers le créancier. Ce paiement doit être valable et intégral. La caution dispose alors de recours contre le débiteur principal.
Le dirigeant caution peut déduire fiscalement les sommes versées, sous certaines conditions.
2. La remise de dette consentie à la caution
Le créancier peut accorder une remise de dette à la caution. Cette remise n’éteint que l’engagement de la caution, pas la dette principale. Elle ne profite pas aux cofidéjusseurs, sauf exceptions.
3. La prescription du cautionnement
L’obligation de la caution peut s’éteindre par prescription. Le délai est généralement de cinq ans, à compter de l’exigibilité de la dette principale.
Si la dette principale est régie par un délai plus long que celui du cautionnement, ce dernier peut s’éteindre en premier.
B. Extinction de l’obligation de couverture
1. Le terme extinctif
Dans un cautionnement à durée déterminée, l’arrivée du terme met fin à l’obligation de couverture. La caution ne garantit plus les dettes nées après ce terme.
L’obligation de règlement subsiste pour les dettes antérieures au terme.
2. La résiliation unilatérale
La caution qui s’est engagée pour une durée indéterminée peut résilier son engagement à tout moment (article 2315 du Code civil). Cette résiliation libère la caution pour l’avenir.
Cette faculté est cruciale pour les cautions qui garantissent des dettes futures, comme le solde d’un compte courant.
3. Le décès de la caution
Le décès de la caution n’éteint que son obligation de couverture (article 2317 du Code civil). Ses héritiers restent tenus des dettes nées avant le décès.
Cette règle protège les héritiers contre l’extension indéfinie du cautionnement.
4. Les opérations de restructuration
Quand une société débitrice change simplement de forme, le cautionnement subsiste. Pour une analyse approfondie des implications en cas de procédures d’insolvabilité du débiteur, consultez notre article dédié.
En revanche, la fusion, scission ou dissolution de la société débitrice ou créancière limite le cautionnement aux dettes antérieures à l’opération (article 2318 du Code civil).
III. Le bénéfice de subrogation : la sanction d’une faute du créancier
A. Le mécanisme du bénéfice de subrogation
L’article 2314 du Code civil permet à la caution d’être déchargée quand le créancier compromet la subrogation dans ses droits et garanties.
Ce bénéfice sanctionne la négligence du créancier qui perd des sûretés dont la caution aurait pu profiter après paiement.
B. Les conditions du bénéfice de subrogation
1. La perte d’un droit préférentiel
Il doit y avoir perte d’un droit conférant un avantage particulier pour le recouvrement. Cela inclut hypothèques, privilèges, nantissements, gages, droits de rétention, ou autres garanties.
La notion va au-delà des simples sûretés et englobe tout mécanisme facilitant le recouvrement de la créance.
2. Un fait du créancier
La perte doit être imputable au créancier. La preuve de cette faute incombe à la caution.
Cette faute peut être une action (mainlevée d’hyposubrogationthèque) ou une omission (défaut de renouvellement d’inscription).
3. Une atteinte aux prévisions légitimes
La caution doit avoir légitimement cru à l’existence du droit perdu.
Cette croyance peut être fondée sur des droits existant lors de son engagement ou sur des droits qu’elle pouvait raisonnablement espérer voir naître.
4. Un préjudice pour la caution
Le créancier peut éviter la décharge en prouvant l’absence de préjudice pour la caution.
Ce préjudice s’évalue à la date d’exigibilité de l’obligation de la caution.
C. Les effets du bénéfice de subrogation
1. Une décharge proportionnée
La caution est déchargée à hauteur du préjudice subi, correspondant à la valeur des droits perdus.
Cette décharge peut être totale si la valeur des droits perdus égale ou dépasse le montant du cautionnement.
2. Absence d’autres sanctions
Le bénéfice de subrogation n’ouvre pas droit à des dommages-intérêts. Pour en obtenir, la caution doit démontrer un préjudice distinct de la perte des droits préférentiels.
Le créancier ne peut pas être contraint de garantir la caution. La décharge est la seule sanction prévue.
Sources
- Code civil, articles 2288 à 2320
- Ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés
- Cour de cassation, Chambre mixte, 17 novembre 2006, n° 04-19.123
- Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 février 2013, n° 11-28.423
- Document « Répertoire Civil – Cautionnement » par Gaël PIETTE, février 2022