Le comité de Bâle : accords, missions et influence sur la régulation bancaire

Table des matières

Au cœur de la stabilité financière mondiale, le Comité de Bâle est une instance incontournable, bien que souvent méconnue du grand public. Né d’une volonté de coopération internationale face aux crises, son influence sur les pratiques bancaires est considérable. Il est l’un des piliers des institutions financières internationales qui œuvrent à la régulation et à la stabilité du système. Comprendre son rôle, ses missions et la portée de ses fameux accords est essentiel pour tout acteur économique, car les règles qu’il édicte se répercutent directement sur les conditions d’accès au crédit et la solidité des banques avec lesquelles les entreprises travaillent au quotidien. Cet article propose une analyse détaillée de cette organisation et de son impact sur le secteur bancaire.

Naissance et évolution du comité de bâle

Le Comité de Bâle n’est pas né d’une construction théorique, mais d’une nécessité pratique face à des chocs financiers bien réels. Son histoire est celle d’une adaptation continue aux turbulences et aux innovations du secteur bancaire mondial.

Création et fonctions originelles : réponse aux faillites bancaires

L’origine du Comité de Bâle remonte à 1974. Sa création par les gouverneurs des banques centrales des pays du G10 est une réponse directe à une série de faillites bancaires retentissantes qui ont secoué le système financier international. Des défaillances comme celles de la Bankhaus I.D. Herstatt en Allemagne ou de la Franklin National Bank à New York ont mis en lumière les dangers d’une surveillance purement nationale dans un monde de plus en plus interconnecté. Ces banqueroutes, exacerbées par la crise pétrolière de 1973, résultaient aussi de gestions imprudentes et d’une prise de risque excessive. La mission première confiée au Comité fut donc d’améliorer la qualité du contrôle bancaire à l’échelle mondiale et de combler les lacunes de la surveillance transfrontalière.

Composition et élargissement progressif

Initialement, le Comité était un forum restreint, composé des représentants des autorités de surveillance bancaire et des banques centrales des pays du G10, auxquels s’ajoutaient le Luxembourg et la Suisse. Cette composition originelle reflétait les principales places financières de l’époque. Conscient que la stabilité financière est une préoccupation globale, le Comité s’est progressivement ouvert pour mieux représenter l’économie mondiale. Il compte aujourd’hui 28 membres, incluant des représentants de tous les pays du G20, ce qui a considérablement renforcé sa légitimité et la portée de ses travaux.

Missions principales : renforcement de la solidité du secteur bancaire mondial

La mission fondamentale du Comité de Bâle est de renforcer la solidité et la fiabilité du système bancaire. Pour y parvenir, il ne dispose d’aucun pouvoir de contrainte juridique formelle, mais son influence s’exerce à travers plusieurs fonctions clés qui en font une autorité de fait incontournable.

Soutien logistique aux superviseurs bancaires nationaux (forum d’échanges et de discussion)

Le Comité de Bâle est avant tout une instance permanente de coopération et de dialogue. Il offre un forum où les superviseurs bancaires du monde entier, comme l’ACPR en France, peuvent échanger des informations, discuter de leurs problématiques communes et partager leurs expériences. Ces réunions régulières, qui se tiennent à Bâle au siège de la Banque des Règlements Internationaux (BRI), sont essentielles pour forger une culture de surveillance commune et améliorer la coordination face aux activités des groupes bancaires internationaux. Cet échange constant permet d’anticiper les risques et d’harmoniser les approches de manière pragmatique.

Surveillance du secteur bancaire mondial (suivi et évaluation des transpositions)

Produire des normes ne suffit pas ; il faut s’assurer de leur correcte application. Depuis 2012, le Comité a mis en place un programme spécifique, le Regulatory Consistency Assessment Programme (RCAP), pour suivre et évaluer la mise en œuvre de ses standards par les pays membres. Ce programme poursuit un double objectif. D’une part, il vérifie que les exigences des accords de Bâle sont transposées de manière complète et cohérente dans les réglementations nationales. D’autre part, il analyse l’efficacité concrète des standards et identifie d’éventuels effets non désirés, permettant ainsi d’ajuster le cadre réglementaire si nécessaire.

Adaptation rapide aux évolutions financières (ex: transition environnementale et numérique)

Le travail d’évaluation et de surveillance permet au Comité de Bâle de rester pertinent face à un secteur financier en perpétuelle mutation. Il analyse en continu les nouvelles sources de risque. Ses priorités stratégiques pour 2023-2024 illustrent parfaitement cette capacité d’adaptation. Elles se concentrent sur des enjeux émergents majeurs, tels que les risques financiers liés au changement climatique et les défis posés par la transformation numérique du secteur bancaire, notamment l’essor des crypto-actifs et les questions de cybersécurité. Cette approche prospective est déterminante pour que la réglementation prudentielle ne soit pas dépassée par les innovations.

La production normative : les accords de bâle (bâle i, ii, iii, iv)

L’activité la plus connue du Comité de Bâle est sa production normative, incarnée par les « Accords de Bâle ». Ces textes constituent le fondement des règles prudentielles appliquées aux banques dans le monde entier. Bien que dépourvus de force juridique contraignante en droit international, leur adoption par les juridictions nationales leur confère une portée quasi universelle.

Définition des exigences minimales et « meilleures pratiques »

Le Comité définit des exigences minimales, ou « standards », que les banques doivent respecter, principalement en matière de fonds propres et de liquidité. Il s’agit d’un plancher réglementaire que les juridictions nationales sont libres de dépasser si elles l’estiment nécessaire. Ces standards sont souvent complétés par des documents plus détaillés, les « Guidelines » (lignes directrices), qui en précisent les modalités d’application. Parallèlement, le Comité publie des « bonnes pratiques » qui recensent les meilleures méthodes de surveillance observées à travers le monde, encourageant ainsi une convergence vers le haut des standards de contrôle.

Historique des accords : du concordat aux exigences de fonds propres

L’action normative du Comité a débuté avant même les célèbres accords sur les fonds propres. En 1975, il publie le « Concordat », un texte fondateur qui établit les principes de répartition des responsabilités de surveillance entre le pays d’origine d’une banque et le pays d’accueil de ses succursales. L’objectif était simple : s’assurer qu’aucun établissement bancaire n’échappe à une surveillance adéquate. Ce n’est que plus tard, face à la montée des risques de crédit dans les années 1980, que le Comité a orienté ses travaux vers la question de l’adéquation des fonds propres des banques.

Bâle i, bâle ii, bâle iii et bâle iv : évolutions et impacts

La série des accords de Bâle illustre une complexification croissante de la régulation bancaire, chaque version tentant de répondre aux faiblesses de la précédente et aux nouvelles réalités des marchés.
Bâle I (1988) : En réponse à la crise de la dette des pays en développement, ce premier accord instaure une règle simple et universelle : le ratio « Cooke ». Il exige des banques de détenir un minimum de fonds propres équivalent à 8% de leurs actifs, pondérés en fonction de leur niveau de risque de crédit. Son objectif était double : renforcer la solidité des banques et établir des conditions de concurrence plus équitables.
Bâle II (2004) : Après plusieurs années de consultation, une nouvelle version voit le jour pour mieux appréhender la diversité des risques. Bâle II repose sur trois piliers :
1. Des exigences minimales de fonds propres plus sensibles aux risques, autorisant les plus grandes banques à utiliser leurs propres modèles internes d’évaluation.
2. Un processus de surveillance prudentielle par les régulateurs nationaux pour s’assurer que les banques disposent de fonds propres suffisants au-delà du minimum réglementaire.
3. Une discipline de marché renforcée par des obligations de transparence et de publication d’informations.
Bâle III (2010) : La crise financière de 2008 a révélé les insuffisances de Bâle II. Bâle III est une réforme d’envergure visant à corriger ces faiblesses. Ses principaux apports sont le renforcement de la qualité et de la quantité des fonds propres (avec un accent mis sur les fonds propres « durs » ou CET1), l’introduction de ratios de liquidité (LCR et NSFR) pour s’assurer que les banques peuvent résister à des chocs de liquidité, et la mise en place de « coussins » de fonds propres supplémentaires pour les banques d’importance systémique.
Bâle IV (2017) : Ce terme, non officiel, désigne les dernières réformes finalisant Bâle III. L’objectif est de restaurer la crédibilité dans le calcul des actifs pondérés en limitant l’utilisation des modèles internes par les banques, qui conduisaient à des variations trop importantes. Ces accords introduisent notamment un « plancher de capital » (output floor), qui empêche que les exigences de fonds propres calculées par un modèle interne ne descendent en dessous d’un certain pourcentage de celles calculées par l’approche standard. Ils affinent également la mesure des risques de marché et opérationnels.

Critiques et déficit de légitimité

Malgré son rôle central, le Comité de Bâle fait l’objet de critiques récurrentes. L’une des principales porte sur son déficit de légitimité démocratique. En tant qu’organe technique informel, ses décisions, qui ont des conséquences économiques et sociales majeures, sont prises en dehors de tout cadre parlementaire classique. On lui reproche également un manque de transparence dans ses processus de décision et une interaction jugée insuffisante avec l’ensemble des parties prenantes, notamment la société civile et les représentants des pays non-membres. Certains économistes ont aussi pointé du doigt le caractère potentiellement procyclique de ses règles, qui pourraient amplifier les récessions en obligeant les banques à réduire leurs prêts au moment où l’économie en a le plus besoin.

L’accompagnement de Solent Avocats face aux exigences de Bâle

La réglementation édictée par le Comité de Bâle, transposée en droit européen puis en droit national, forme un corpus de règles d’une grande complexité. Pour les acteurs du secteur financier, s’y conformer est un défi permanent qui exige une expertise juridique et réglementaire pointue. Naviguer entre les exigences de fonds propres, les ratios de liquidité, les obligations de reporting et les dispositifs de gouvernance requiert une analyse fine des textes et de leur application pratique. Un conseil avisé est indispensable pour anticiper les évolutions réglementaires et structurer ses activités en toute sécurité juridique. Notre cabinet d’avocats, fort de son expérience, est à votre disposition pour vous accompagner dans la compréhension et la mise en œuvre de ces exigences. Si vous souhaitez une analyse de votre situation et un conseil adapté, contactez notre équipe d’avocats en droit bancaire et financier.

Sources

  • Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Report on the supervision of banks’foreign establishments – Concordat, 1975
  • Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, International convergence of capital measurement and capital standards, 1988 (Bâle I)
  • Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Basel II: International Convergence of Capital Measurement and Capital Standards: a Revised Framework, 2004 (Bâle II)
  • Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Basel III: A global regulatory framework for more resilient banks and banking systems, 2010 (Bâle III)
  • Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire, Basel III: Finalising post-crisis reforms, 2017 (Finalisation de Bâle III)
  • Charte du Comité de Bâle sur le Contrôle Bancaire

Vous souhaitez échanger ?

Notre équipe est à votre disposition et s’engage à vous répondre sous 24 à 48 heures.

07 45 89 90 90

Vous êtes avocat ?

Consultez notre offre éditoriale dédiée.

Dossiers

> La pratique de la saisie immobilière> Les axes de défense en matière de saisie immobilière

Formations professionnelles

> Catalogue> Programme

Poursuivre la lecture

fr_FRFR