La saisie malgré un dossier de surendettement est en principe interdite. Les exceptions sont toutefois assez nombreuses. On fait le point.
Le surendettement, c’est quoi ?
Le surendettement est caractérisé lorsque le débiteur ne peut pas faire face à ses dettes. La commission de surendettement analyse les dettes professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir (article L. 711-1 du code de la consommation).
Le dépôt d’un dossier de surendettement à la Banque de France est suivi d’une décision de recevabilité ou d’irrecevabilité.
Lorsque la recevabilité du dossier est constatée, la commission de surendettement décide de l’orientation à donner au dossier.
Il y a alors plusieurs hypothèses.
Tout d’abord, lorsque le débiteur ne peut pas régler partiellement ou totalement ses dettes. Une solution de rétablissement personnel peut alors être mise en place, dans les conditions suivantes :
- Si le débiteur ne possède pas de patrimoine, la commission peut imposer une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. Les dettes sont alors effacées.
- Si le débiteur possède du patrimoine, une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire peut être ordonnée. Le débiteur doit toutefois donner son accord. Un mandataire judiciaire sera désigné pour procéder à la vente du patrimoine et les dettes non remboursées seront effacées.
Ensuite, lorsque le débiteur peut régler partiellement ou totalement ses dettes. La commission peut alors proposer deux solutions :
- Si le débiteur est propriétaire d’un bien immobilier. La commission peut établir un plan de redressement ou ordonner un moratoire de 2 ans. Ce moratoire est généralement assorti d’un gel des intérêts et d’une demande de vente du bien.
- Si le débiteur n’est pas propriétaire d’un bien immobilier. La commission peut alors imposer les mesures de son choix.
Lorsque la décision de recevabilité est contestée, l’affaire est transmise au juge des contentieux de la protection.
La solution de principe : l’arrêt et l’interdiction des saisies
La décision de recevabilité entraîne la suspension des saisies en cours. Elle entraîne également l’interdiction d’en pratiquer de nouvelles (article L. 722-2 du code de la consommation).
Cela signifie que le débiteur n’est pas protégé entre le dépôt du dossier de surendettement et la décision de recevabilité.
Une mesure d’exécution peut donc être pratiquée à ce moment-là. Pour l’éviter, le débiteur dispose d’un recours. En effet, il peut demander à la commission la suspension et l’interdiction des saisies.
Celle-ci devra saisir le juge des contentieux de la protection d’une demande en ce sens. L’interdiction pendra alors effet dès le dépôt du dossier (article L. 721-4 du code de la consommation).
La saisie malgré un dossier de surendettement : les exceptions
Le principe de la suspension et de l’arrêt des mesures d’exécution connaît plusieurs exceptions, qui dépendent de :
- L’opposabilité du surendettement
- La durée de la procédure
- La nature de la dette
- La nature de la procédure d’exécution
L’opposabilité du surendettement
La décision de recevabilité de la commission de surendettement bloque les mesures d’exécution à l’encontre des créanciers énumérés par le débiteur.
En effet, le débiteur, lorsqu’il dépose un dossier, donne la liste de ses créanciers et le montant de leurs créances respectives.
Naturellement, le créancier qui aura été omis pour le débiteur conservera sa liberté d’agir. Il pourra pratiquer les mesures d’exécution de son choix, puisqu’il ne sera pas intégré au surendettement.
La durée de la suspension et de l’arrêt des mesures d’exécution
Tout d’abord, le délai de suspension et d’arrêt des mesures d’exécution est de 2 ans au maximum.
Pourquoi ? Pour éviter des recours dilatoires destinés à prolonger la durée de la procédure de surendettement.
La nature de la dette
La saisie malgré un dossier de surendettement est possible pour obtenir le paiement de certaines dettes. Sont autorisées les procédures d’exécution mises en œuvre pour obtenir le paiement :
- des dettes liées aux obligations alimentaires (ex. pensions alimentaires),
- des indemnisations des victimes d’infractions pénales,
- des dettes relatives à des fraudes aux prestations sociales (article L. 114-12 du code de la sécurité sociale),
- de certaines dettes fiscales,
- des amendes prononcées dans le cadre d’une condamnation pénale.
La nature de la procédure d’exécution : le cas spécifique de la saisie immobilière
La procédure de saisie immobilière, enfin, n’est pas arrêtée par la décision de recevabilité lorsqu’une date d’adjudication a déjà été fixée.
Dans cette hypothèse, la commission peut demander au juge de l’exécution de reporter la vente, mais pas de l’annuler. La vente aura donc lieu, tôt ou tard. Par ailleurs, le juge de l’exécution peut refuser la demande de report de la commission.
En pratique, la commission sollicite rarement le report. En effet, la vente aux enchères permet de liquider le patrimoine du débiteur et de payer ses créanciers. Elle permet donc d’obtenir un résultat recherché par la commission.
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Ne pas confondre saisir et titrer
Les mesures d’exécution que le surendettement bloque sont celles prévues par le code des procédures civiles d’exécution. On pense notamment à la saisie attribution, à la saisie immobilière et à la saisie des rémunérations. Ce sont, en effet les mesures d’exécution les plus courantes.
Pour pratiquer une mesure d’exécution, le créancier doit disposer d’un titre exécutoire. Il peut s’agit d’une décision de justice (ordonnance, jugement, arrêt…) ou d’un acte notarié revêtu de la formule exécutoire.
Lorsque le titre exécutoire est un acte notarié, il peut être soumis à des délais de prescription très courts. Par ailleurs, il est beaucoup plus facile à combattre au stade du recouvrement.
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Pour palier à cette difficulté, le créancier qui dispose d’un acte notarié peut décider d’assigner le débiteur. Cela lui permettra d’obtenir une décision de justice (jugement, arrêt, etc.). Cette décision sera soumise à des délais de prescription beaucoup plus longs.
La cour de cassation a confirmé que c’est parfaitement légal (Cass. 1re civ., 1er mars 2017, n° 15-28.012, Publié au bulletin).
Cette assignation peut être délivrée pendant le surendettement. En effet, le surendettement interdit de procéder au recouvrement d’une créance constatée dans un titre exécutoire. En revanche, il n’interdit pas d’obtenir un titre exécutoire pour obtenir la condamnation du débiteur à payer une certaine somme.