L’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) est un acteur incontournable dans le paysage financier français. Adossée à la Banque de France, cette autorité veille sur les secteurs de la banque et de l’assurance, contribuant à la stabilité financière et à la protection des consommateurs. Comprendre son statut, son organisation interne complexe et le cadre de sa coopération internationale est essentiel pour les professionnels et les entreprises interagissant avec ces secteurs régulés. Cet article détaille ces aspects fondamentaux.
Qu’est-ce que l’ACPR et quel est son rôle ?
L’existence de l’ACPR répond à une nécessité profonde de supervision et de régulation des activités bancaires et assurantielles, des secteurs vitaux pour l’économie mais porteurs de risques systémiques importants. Sa création et ses missions actuelles découlent d’une évolution historique et d’une adaptation aux crises financières successives.
La nécessité d’une supervision des secteurs bancaire et assurantiel
Les secteurs de la banque et de l’assurance jouent un rôle central dans le financement de l’économie et la gestion des risques. Cependant, leur fonctionnement intrinsèque comporte des risques qui, en cas de crise, peuvent avoir des répercussions considérables sur l’ensemble du système financier et l’économie réelle. Les différentes crises financières ont mis en lumière la nécessité d’instaurer des mécanismes de surveillance robustes pour prévenir ces risques et protéger les usagers – clients, assurés, adhérents.
Historiquement, la surveillance de ces secteurs était fragmentée. Pour la banque, la Commission de contrôle des banques, créée en 1941, puis la Commission bancaire issue de la loi de 1984, assuraient le contrôle prudentiel, tandis que le Comité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (CECEI) gérait les agréments. Du côté de l’assurance, un contrôle étatique s’est développé dès la fin du XIXe siècle, aboutissant à la création de l’Autorité de contrôle des assurances et mutuelles (ACAM) pour la surveillance des activités et du Comité des entreprises d’assurance (CEA) pour les agréments.
Fusion des autorités : La naissance de l’ACPR
La crise financière de 2008 a accéléré la prise de conscience de la nécessité d’une approche plus intégrée de la supervision. Le rapport Deletré de 2009 a préconisé la fusion des différentes autorités sectorielles pour créer une entité unique ayant une vision globale des risques. C’est ainsi qu’est née, par l’ordonnance du 21 janvier 2010, l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP), résultant de la fusion du CECEI, de la Commission bancaire, du CEA et de l’ACAM.
Cette nouvelle autorité a hérité des compétences de ses prédécesseurs, notamment en matière d’agrément et de contrôle prudentiel. Par la suite, anticipant la directive européenne sur le redressement et la résolution des établissements de crédit (dite BRRD), la loi de séparation et de régulation des activités bancaires de 2013 a ajouté une mission essentielle à l’Autorité : la résolution des crises bancaires. L’ACP est alors devenue l’ACPR, Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution. Sa compétence en matière de résolution a ensuite été étendue au secteur de l’assurance en 2017. Vous pouvez trouver une présentation générale de l’ACPR plus détaillée sur notre site.
Missions générales : Stabilité financière et protection des clients
Les missions fondamentales de l’ACPR, définies à l’article L. 612-1 du Code monétaire et financier, sont doubles :
- Veiller à la préservation de la stabilité du système financier. Cela implique une surveillance macroprudentielle et microprudentielle des acteurs pour prévenir les risques systémiques.
- Veiller à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle. Cette mission couvre le respect des règles de bonne conduite, la solvabilité des organismes et leur capacité à honorer leurs engagements.
Pour remplir ces objectifs généraux, l’ACPR exerce une multitude de tâches spécifiques:
- Examiner les demandes d’agrément, d’autorisation ou de dérogation pour exercer les activités régulées.
- Exercer une surveillance permanente de la situation financière (solvabilité, liquidité) et des conditions d’exploitation des entités contrôlées.
- Contrôler le respect des règles de protection de la clientèle (issues des lois, règlements, codes de conduite homologués ou bonnes pratiques).
- Élaborer et mettre en œuvre les mesures de prévention et de résolution des crises bancaires et assurantielles.
- Veiller au respect des règles relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT).
- Contrôler le respect des obligations relatives à la lutte contre l’évasion fiscale et aux informations à fournir à l’administration fiscale.
- Coordonner son action au niveau européen, notamment dans le cadre du Mécanisme de Surveillance Unique (MSU) et du Mécanisme de Résolution Unique (MRU).
Cette liste, non exhaustive et évolutive, définit le périmètre d’action de l’Autorité et justifie l’étendue de ses prérogatives. Pour en savoir plus sur les pouvoirs de l’ACPR, consultez notre article dédié.
Le statut juridique particulier de l’ACPR
Contrairement à l’Autorité des marchés financiers (AMF), l’ACPR ne bénéficie pas du statut d’Autorité Administrative Indépendante (AAI) ou d’Autorité Publique Indépendante (API) au sens strict défini par la loi de 2017. Son statut est qualifié de « sui generis », marqué par un adossement fort à la Banque de France et l’absence de personnalité morale propre.
Une autorité « sui generis » adossée à la Banque de France
L’ACPR est intrinsèquement liée à la Banque de France. Le Gouverneur de la Banque de France préside le collège de supervision de l’ACPR. Les services de l’ACPR sont majoritairement composés d’agents de la Banque de France. Son budget est un budget annexe de celui de la Banque de France, bien qu’alimenté en partie par des contributions des organismes supervisés. Cet adossement, choisi consciemment par le législateur, vise des synergies et une efficacité accrue en matière de stabilité financière.
Pourquoi l’ACPR n’est pas une AAI ou API ?
Bien qu’initialement instituée comme AAI, l’ACPR a perdu ce statut avec les lois de 2017 sur les AAI et API. Ce déclassement s’explique principalement par son manque d’indépendance structurelle vis-à-vis de la Banque de France et, dans une certaine mesure, de l’Exécutif. Par exemple, le Directeur Général du Trésor, représentant de l’État, siège dans certaines formations et dispose d’un droit de veto sur certaines décisions du collège de résolution pouvant engager des fonds publics. De plus, l’ACPR ne dispose pas d’un pouvoir réglementaire général autonome, celui-ci étant principalement dévolu au ministre chargé de l’Économie.
Indépendance et garanties : Un équilibre spécifique
Malgré son exclusion formelle du statut d’AAI/API, l’ACPR bénéficie de garanties visant à assurer une certaine autonomie et impartialité. Ses membres nommés le sont pour un mandat fixe (cinq ans renouvelable) et bénéficient de protections contre une révocation arbitraire. L’Autorité n’est pas soumise à une tutelle ministérielle directe et n’a pas à recevoir d’instructions du Gouvernement dans l’exercice de ses missions courantes. Des règles déontologiques strictes s’appliquent à ses membres pour prévenir les conflits d’intérêts. La séparation organique entre les fonctions d’enquête/poursuite (collège de supervision/résolution) et de sanction (commission des sanctions) vise à garantir l’impartialité des procédures disciplinaires. L’ACPR apparaît donc comme une autorité administrative disposant d’une autonomie renforcée, bien que non totalement indépendante.
Absence de personnalité morale et conséquences
Point notable, l’ACPR n’a pas la personnalité morale, contrairement à l’AMF. Elle est un démembrement de l’État, adossé à la Banque de France. Cette absence de personnalité morale a plusieurs conséquences pratiques.
Représentation en justice et responsabilité de l’État
N’ayant pas de personnalité juridique propre, l’ACPR ne peut ester en justice en son nom propre de manière autonome. C’est le président de son collège de supervision (le Gouverneur de la Banque de France) qui a qualité pour agir au nom de l’ACPR devant toute juridiction, dans le cadre de ses missions. Il peut également, sur décision du collège, se constituer partie civile pour certaines infractions financières ou exercer un recours contre les décisions de la commission des sanctions devant le Conseil d’État.
Concernant la responsabilité, les dommages causés par une faute de l’ACPR dans l’exercice de ses missions (par exemple, une carence dans la surveillance ayant conduit à la défaillance d’un établissement) n’engagent pas sa propre responsabilité, mais celle de l’État. Toutefois, cette responsabilité de l’État n’est engagée qu’en cas de faute lourde, compte tenu de la nature des pouvoirs de contrôle et de la marge d’appréciation laissée à l’Autorité.
L’organisation interne de l’ACPR
L’organisation de l’ACPR est structurée pour répondre à ses différentes missions (supervision, résolution, sanction) tout en respectant des impératifs d’indépendance et d’impartialité, notamment par la séparation des fonctions. Elle repose sur plusieurs organes collégiaux et individuels aux compétences distinctes.
Vue d’ensemble : Organes collégiaux et individuels
L’architecture institutionnelle de l’ACPR comprend principalement :
- Trois organes collégiaux :
- Le Collège de supervision.
- Le Collège de résolution.
- La Commission des sanctions.
- Des organes individuels clés :
- Le Président du collège de supervision (Gouverneur de la Banque de France).
- Le Vice-président du collège de supervision.
- Le Secrétaire général de l’ACPR.
- Le Directeur de la résolution.
Le collège de supervision : Composition et rôle exécutif
Le collège de supervision est l’organe exécutif principal de l’ACPR, disposant d’une compétence de principe pour toutes les attributions non expressément confiées à un autre organe (essentiellement la résolution et la sanction). Il est présidé par le Gouverneur de la Banque de France.
Sa composition est large (19 membres) et vise à assurer une représentation plurielle et une expertise diversifiée:
- Le Gouverneur de la Banque de France (président).
- Un Vice-président (expert en assurance) et deux autres membres (experts en protection des clientèles ou techniques quantitatives).
- Le Président de l’AMF.
- Deux membres désignés par les présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat.
- Le Président de l’Autorité des normes comptables.
- Un membre du Conseil d’État, un de la Cour de cassation, un de la Cour des comptes.
- Quatre experts du secteur de l’assurance/mutualité/prévoyance.
- Quatre experts du secteur bancaire/services de paiement/investissement.
Les membres (hors ceux siégeant es qualité) sont nommés pour cinq ans renouvelables, avec des règles de parité. Ce collège arrête les principes généraux de fonctionnement, le budget, examine les questions générales, analyse les risques et établit les priorités de contrôle.
Formation plénière, restreinte et sous-collèges sectoriels
Pour exercer ses missions, le collège de supervision se réunit en différentes formations:
- Formation plénière : Compétente pour les questions générales, l’organisation, le budget, les priorités de contrôle et le rapport annuel.
- Formation restreinte : Composée d’un nombre réduit de membres, elle examine les questions individuelles communes aux deux secteurs (banque et assurance), celles relatives aux conglomérats financiers, ou les dossiers individuels importants sur décision du président.
- Sous-collèges sectoriels : Deux sous-collèges (un pour la banque, présidé par le Gouverneur, un pour l’assurance, présidé par le Vice-président) traitent les questions générales et individuelles spécifiques à leur secteur respectif.
Les décisions sont prises à la majorité, avec voix prépondérante du président en cas de partage. Des procédures de consultation écrite ou par téléconférence sont possibles en cas d’urgence.
Commissions spécialisées et consultatives
Le collège peut déléguer certaines décisions individuelles à des commissions spécialisées créées en son sein, mais cette faculté n’a pas été utilisée à ce jour.
En revanche, plusieurs commissions consultatives ont été instituées. Elles n’ont pas de pouvoir décisionnel mais rendent des avis au collège, notamment sur les projets d’instructions, de recommandations ou sur des sujets spécifiques. Leur composition inclut de nombreux professionnels des secteurs supervisés, favorisant le dialogue et l’acceptabilité des normes. On compte notamment la Commission consultative des affaires prudentielles, celle des pratiques commerciales, celle de la LCB-FT, et un comité scientifique.
Le collège de résolution : Composition et autonomie
Créé en 2013 pour gérer la nouvelle mission de résolution, le collège de résolution est l’autorité de résolution nationale française au sens du droit européen. Il est distinct du collège de supervision, bien que certains membres y siègent également. Sa composition est plus restreinte (7 membres) pour favoriser la réactivité:
- Le Gouverneur de la Banque de France (président).
- Le Directeur général du Trésor.
- Le Président de l’AMF.
- Un Sous-gouverneur de la Banque de France.
- Le Président de la chambre commerciale de la Cour de cassation.
- Le Président du directoire du Fonds de Garantie des Dépôts et de Résolution (FGDR).
- Le Vice-président du collège de supervision.
Ce collège bénéficie d’une autonomie structurelle significative au sein de l’ACPR, avec sa propre direction des services et une section dédiée dans le budget de l’ACPR, afin d’assurer l’indépendance et l’efficacité de la fonction de résolution. Ses compétences sont exclusives en matière de mise en œuvre des mesures de résolution (cession d’actifs, établissement-relais, renflouement interne, etc.). Il établit également les plans préventifs de résolution. Le Directeur Général du Trésor y détient un droit de veto sur les décisions impliquant un soutien financier public.
La commission des sanctions : Indépendance et fonction disciplinaire
La commission des sanctions est l’organe chargé exclusivement de prononcer les sanctions administratives (disciplinaires et/ou pécuniaires) en cas de manquement par une personne contrôlée à ses obligations. Sa création et son fonctionnement distinct des collèges visent à garantir l’impartialité de la fonction répressive, conformément aux exigences de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
Elle est composée de six membres nommés pour cinq ans (renouvelables une fois) : deux conseillers d’État (dont le président de la commission), un conseiller à la Cour de cassation, et trois personnalités qualifiées nommées par le ministre de l’Économie. Des suppléants sont désignés pour chaque membre. Une incompatibilité stricte existe entre la fonction de membre de la commission des sanctions et celle de membre des collèges de supervision ou de résolution. Les procédures devant la commission sont contradictoires et respectent les droits de la défense. Les sanctions de l’ACPR peuvent être lourdes, incluant des sanctions pécuniaires élevées ou le retrait d’agrément.
Rôle du secrétariat général et de la direction de la résolution
Le Secrétaire général de l’ACPR, nommé par arrêté ministériel sur proposition du Gouverneur, dirige l’ensemble des services de l’Autorité (sauf ceux de la résolution). Il organise les contrôles, propose les principes d’organisation et les règles déontologiques du personnel au collège de supervision, et peut recevoir d’importantes délégations de signature ou de compétence de la part du président ou du collège. Il est assisté d’un Premier secrétaire général adjoint dont la compétence sectorielle doit être complémentaire.
Le Directeur de la résolution, nommé également par arrêté ministériel sur proposition du président du collège de résolution, dirige les services spécifiquement dédiés à la préparation des travaux de ce collège. Il exerce, dans le domaine de la résolution, des pouvoirs similaires à ceux du secrétaire général concernant les contrôles (sauf sur place) et les auditions, et rapporte exclusivement au collège de résolution, marquant la séparation fonctionnelle de cette mission.
Règles déontologiques : Conflits d’intérêts et secret professionnel
Tous les membres des organes de l’ACPR (collèges, commission des sanctions) sont soumis à des règles déontologiques strictes pour garantir leur indépendance et leur impartialité.
- Prévention des conflits d’intérêts : Interdiction d’être salarié ou mandataire d’une entité contrôlée ; obligation de déclarer les intérêts détenus et les fonctions exercées (passées et présentes) au président du collège et à la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique ; obligation de se déporter en cas d’intérêt direct ou indirect dans une affaire ; mise sous mandat de gestion sans droit de regard des instruments financiers détenus dans les secteurs supervisés. Le règlement intérieur détaille ces obligations.
- Secret professionnel : Les membres et le personnel sont tenus au secret professionnel pour les informations recueillies dans l’exercice de leurs fonctions, sous peine de sanctions pénales. Ce secret n’est toutefois pas opposable à l’autorité judiciaire (dans certains cas) ou aux commissions d’enquête parlementaires, et des dérogations existent pour la coopération avec d’autres autorités.
Le respect de ces règles est surveillé par le président du collège de supervision (ou le doyen des magistrats pour le président lui-même) et leur violation peut entraîner la fin des fonctions du membre concerné.
La coopération de l’ACPR à l’échelle internationale
Dans un environnement financier globalisé, l’ACPR ne peut agir isolément. Elle participe activement à la coopération avec ses homologues étrangers, tant au niveau européen qu’international, pour l’échange d’informations, la coordination de la surveillance et l’entraide en matière de contrôle.
Intégration dans le système de surveillance européen (SESF)
L’ACPR est une composante clé du Système Européen de Surveillance Financière (SESF), mis en place en 2011. Ce système vise à harmoniser les pratiques de surveillance au sein de l’UE, à préserver la stabilité financière et à protéger les consommateurs. Il comprend :
- Le Comité Européen du Risque Systémique (CERS).
- Les trois Autorités Européennes de Surveillance (AES) : l’Autorité Bancaire Européenne (ABE), l’Autorité Européenne des Assurances et des Pensions Professionnelles (AEAPP), et l’Autorité Européenne des Marchés Financiers (AEMF).
- Les autorités nationales compétentes, comme l’ACPR et l’AMF pour la France.
L’ACPR collabore étroitement avec ces instances européennes, notamment en échangeant des informations (y compris couvertes par le secret professionnel) et en participant aux travaux communs. Elle joue un rôle essentiel dans la mise en œuvre des cadres européens comme le Mécanisme de Surveillance Unique (MSU) et le Mécanisme de Résolution Unique (MRU) en matière bancaire, agissant comme autorité nationale de surveillance et de résolution.
Coopération avec les autorités homologues de l’EEE
Au sein de l’Espace Économique Européen (EEE), la coopération entre autorités de surveillance est encadrée par les directives européennes (comme CRD IV pour la banque ou Solvabilité II pour l’assurance). Ces textes prévoient directement les modalités d’échange d’informations et de coordination pour la surveillance des groupes transfrontaliers, sans nécessiter systématiquement des accords bilatéraux spécifiques. L’ACPR participe ainsi aux collèges de superviseurs pour les groupes bancaires ou d’assurance ayant des activités significatives en France ou dont la maison mère est française.
Coopération hors EEE : Accords bilatéraux et multilatéraux
Pour la coopération avec les autorités de pays situés en dehors de l’EEE, l’ACPR s’appuie sur la conclusion d’accords de coopération bilatéraux ou multilatéraux. Ces accords permettent de déroger à la loi française dite « de blocage » (Loi n° 68-678 du 26 juillet 1968) qui interdit en principe la communication d’informations sensibles à des autorités étrangères.
Échange d’informations et loi de blocage
L’article L. 632-7 du Code monétaire et financier autorise l’ACPR (et l’AMF) à conclure des accords de coopération avec des autorités homologues d’États tiers pour échanger des informations nécessaires à l’accomplissement de leurs missions respectives. Ces accords peuvent aussi être conclus avec des autorités non homologues mais participant à la surveillance du secteur (ex: autorités de contrôle des comptes).
La transmission d’informations par l’ACPR est conditionnée à l’existence de garanties suffisantes de secret professionnel dans le pays tiers, au moins équivalentes à celles prévues en France. L’échange doit être strictement limité aux besoins de la mission de l’autorité requérante et ne pas constituer une recherche indifférenciée d’informations (« fishing »). Le transfert de données personnelles doit en outre respecter le cadre du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données).
Concernant la réception d’informations depuis l’étranger, la jurisprudence a précisé que l’ACPR (ou l’AMF) peut solliciter des informations auprès d’autorités étrangères même en l’absence d’accord formel, la loi de blocage ne visant que la transmission d’informations vers l’étranger.
Entraide en matière de contrôle et de preuves
La coopération peut aller au-delà du simple échange d’informations. Des accords peuvent prévoir une entraide en matière de contrôle, permettant par exemple à l’ACPR de demander à une autorité étrangère de réaliser des contrôles sur une filiale ou succursale locale d’un groupe français, ou inversement. L’extension d’un contrôle étranger en France est cependant encadrée, notamment limitée au respect des normes prudentielles de l’État d’origine pour la surveillance des groupes.
L’entraide peut aussi concerner l’obtention de preuves dans le cadre d’enquêtes ou de procédures disciplinaires (pièces saisies, auditions). Les éléments obtenus à l’étranger sont en principe recevables, même s’ils ont été recueillis selon les procédures de l’autorité étrangère. Toutefois, leur utilisation en France doit respecter les principes fondamentaux français, notamment la loyauté de la preuve et les droits de la défense. Si des preuves ont été obtenues à l’étranger en violation de ces principes (par exemple, une audition sous la menace de sanctions pénales contraire au droit de ne pas s’auto-incriminer), elles doivent être écartées par l’ACPR.
L’ACPR a conclu de nombreux accords bilatéraux (avec les États-Unis, la Suisse, le Canada, le Japon, le Maroc, etc.) et participe à des accords multilatéraux, notamment dans le cadre de l’Association Internationale des Contrôleurs d’Assurance (AICA/IAIS).
Les défis posés par la régulation financière et assurantielle nécessitent une vigilance constante et une adaptation permanente des autorités de supervision. Le statut et l’organisation de l’ACPR, ainsi que sa capacité à coopérer efficacement à l’international, sont des éléments déterminants pour sa mission. Si vous êtes confronté à une procédure initiée par l’ACPR ou si vous avez des interrogations sur la réglementation applicable à votre activité, un avocat en droit bancaire peut vous apporter un éclairage et un accompagnement face à l’ACPR.
Pour une analyse approfondie de votre situation et un conseil adapté, prenez contact avec notre équipe d’avocats.
Sources
- Code monétaire et financier (articles principaux cités dans le texte)
- Code des assurances (articles principaux cités dans le texte)
- Code de la mutualité (articles principaux cités dans le texte)
- Code de la sécurité sociale (articles principaux cités dans le texte)
- Règlement (UE) n° 1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013 confiant à la Banque centrale européenne des missions spécifiques ayant trait aux politiques en matière de surveillance prudentielle des établissements de crédit (MSU)
- Règlement (UE) n° 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution unique (MRU)
- Directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (BRRD)
- Directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (Solvabilité II)