La saisie de navire permet à un créancier de bloquer ou de vendre un navire pour obtenir le paiement d’une dette.
Bien que le navire soit juridiquement un bien meuble, la saisie de navire ne suit pas les règles habituelles de la saisie des biens meubles corporels.
Le code des transports encadre cette procédure. Il distingue deux types de saisies : la saisie conservatoire et la saisie-exécution. Ces deux mécanismes ont des objectifs différents mais visent tous deux à protéger les droits des créanciers maritimes.
Qu’est-ce qu’une saisie conservatoire de navire ?
La saisie conservatoire est une mesure de protection. Son but est d’immobiliser temporairement un navire pour garantir une créance. Le navire ne peut plus être utilisé ni vendu. C’est une mesure provisoire qui précède l’obtention d’un titre exécutoire.
Le créancier peut ainsi s’assurer que le débiteur ne vendra pas son navire ou ne le déplacera pas pour échapper à ses obligations.
Pourquoi pratiquer une saisie conservatoire ?
La saisie conservatoire est pratiquée lorsqu’un créancier craint que le débiteur ne tente de se soustraire au paiement de sa dette en déplaçant ou en vendant le navire.
L’immobilisation du navire est une mesure de pression importante. Le débiteur, souvent propriétaire ou exploitant du navire, ne peut plus l’utiliser pour générer des revenus tant que la dette n’est pas réglée. C’est un frein majeur à son activité économique.
En cas de saisie conservatoire, le navire est bloqué dans le port où il se trouve, et il ne peut pas quitter le port sans autorisation du juge. Cette autorisation peut être accordée sous réserve de la fourniture d’une garantie suffisante, souvent une caution bancaire.
La procédure de la saisie conservatoire
La procédure commence par une demande faite au juge de l’exécution. Le créancier doit prouver que sa créance est fondée en son principe. Cela signifie qu’il doit démontrer que le débiteur lui doit de l’argent, même si la dette n’est pas encore exigible. Contrairement à d’autres types de saisies, il n’est pas nécessaire d’obtenir un titre exécutoire pour pratiquer une saisie conservatoire.
Une fois l’autorisation obtenue, un huissier de justice signifiera l’acte de saisie au débiteur et au capitaine du navire. Cela signifie que le navire est officiellement immobilisé. Toute tentative de déplacement du navire sans autorisation peut être sanctionnée par des poursuites.
Les effets de la saisie conservatoire
L’effet principal de la saisie conservatoire est d’immobiliser le navire. Le débiteur ne peut plus utiliser le navire pour son activité économique ni le vendre.
Cette immobilisation est coûteuse pour le débiteur. Par exemple, des frais de port peuvent être facturés pour le stationnement prolongé du navire. Ces coûts supplémentaires incitent souvent le débiteur à payer sa dette rapidement pour libérer son navire.
La saisie conservatoire reste en place jusqu’à ce que le débiteur règle la créance ou fournisse une garantie suffisante. Si le débiteur n’obtient pas l’autorisation de déplacer son navire, il risque de subir des pertes financières importantes.
La saisie-exécution : quand le navire est vendu
Contrairement à la saisie conservatoire, la saisie-exécution est une procédure qui permet la vente du navire. Elle intervient après qu’un titre exécutoire a été obtenu. Le but de la saisie-exécution est de vendre le navire pour rembourser la dette du créancier.
Conditions pour pratiquer une saisie-exécution
Pour pratiquer une saisie-exécution, le créancier doit disposer d’un titre exécutoire. Cela peut être une décision de justice ou un acte notarié. Une fois ce titre obtenu, le créancier peut demander au tribunal de vendre le navire afin de récupérer les fonds.
Déroulement de la saisie-exécution
La saisie-exécution commence par un commandement de payer. C’est un acte formel qui ordonne au débiteur de régler sa dette. Si le débiteur ne paie pas, le créancier peut alors demander au tribunal de fixer les conditions de vente vente du navire.
Le prix de départ de la vente est fixé par le juge en fonction de la valeur du navire. Une mise à prix est déterminée, et la vente est annoncée dans un journal d’annonces légales. Cela permet aux acheteurs potentiels d’être informés de la vente et de se préparer à participer à l’enchère.
Vente du navire
La vente du navire peut être réalisée par un notaire ou par un courtier maritime, selon le type de navire.
Les créanciers ayant des hypothèques maritimes inscrites sur le navire sont informés de la vente. Ces créanciers ont un droit de priorité sur le produit de la vente. Cela signifie qu’ils peuvent récupérer une partie de la somme avant les autres créanciers.
Si la vente échoue, le tribunal peut décider de fixer une nouvelle mise à prix et de relancer la procédure.
Réglementation : code des transports et droit international
Le code des transports
La saisie de navire est encadrée par le code des transports. Ce code prévoit des règles spécifiques à la saisie des navires, différentes de celles applicables aux autres biens meubles corporels.
Réglementation internationale
Les saisies de navire peuvent également être régies par des conventions internationales. La plus connue est la Convention de Bruxelles de 1952, qui unifie certaines règles concernant la saisie conservatoire des navires. Cette convention est applicable dans les pays signataires, et elle facilite l’exécution des créances maritimes à l’international.
Pour invoquer cette convention, le créancier doit alléguer une créance maritime, par exemple un prêt bancaire contracté pour l’acquisition du navire. La saisie doit être pratiquée dans un État contractant, garantissant ainsi que la saisie sera reconnue dans tous les pays signataires.
Une autre convention, la Convention des Nations Unies sur les effets internationaux des ventes judiciaires de navires (ou Convention de Beijing), a été adoptée en décembre 2022. Cette convention vise à harmoniser les règles de vente judiciaire des navires à l’échelle mondiale.
Bien qu’elle ne soit pas encore en vigueur, elle prévoit un cadre international plus cohérent pour les ventes de navires, garantissant que ces ventes soient reconnues dans différents pays.
Saisie de navire et arbitrage maritime
Mesures conservatoires dans le cadre de l’arbitrage
Dans le cadre de l’arbitrage maritime, il est possible de pratiquer une saisie conservatoire avant que le litige ne soit tranché. Le but est de protéger les intérêts du créancier pendant la procédure d’arbitrage.
Le tribunal arbitral ou le juge peuvent ordonner des mesures conservatoires, comme la saisie du navire ou l’imposition d’une garantie bancaire pour éviter que le débiteur ne déplace ou ne vende le navire avant la décision finale.
Ces mesures sont souvent sollicitées lorsque le créancier craint que le débiteur ne tente de faire disparaître ses actifs pour échapper à l’exécution d’une éventuelle décision arbitrale.
Compétence du juge étatique et arbitrage
La compétence du juge étatique pour ordonner des mesures conservatoires est expressément reconnue par le code des procédures civiles. Cela signifie que, même si le litige est soumis à un tribunal arbitral, le juge peut toujours prononcer des mesures conservatoires, comme la saisie d’un navire.
Si une saisie conservatoire est pratiquée, le créancier doit poursuivre la procédure en vue d’obtenir un titre exécutoire. Ce titre peut être délivré par un tribunal arbitral. Si le créancier ne poursuit pas la procédure dans le délai imparti, la saisie sera levée. Le juge peut également décider de maintenir la saisie pendant la procédure arbitrale, surtout si celle-ci est internationale.
Conclusion
La saisie de navire est une procédure incontournable dans le droit maritime, permettant de garantir le paiement des créances grâce à l’immobilisation ou à la vente d’un navire.
Régie par des règles spécifiques du code des transports et des conventions internationales comme celle de Bruxelles ou de Beijing, cette procédure offre aux créanciers maritimes un outil puissant pour protéger leurs droits.
La saisie conservatoire permet de bloquer rapidement un navire, tandis que la saisie-exécution aboutit à sa vente forcée si le débiteur ne régularise pas sa situation.
Face à l’enjeu économique que représente un navire, la saisie de navire constitue souvent un moyen de pression efficace pour obtenir le règlement des dettes.