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Le sort de la dette d’intérêts d’un prêt après jugement

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Ils sont légion, ces organismes de titrisation et autres agences de recouvrement à pratiquer des saisies pour tenter d’obtenir le paiement d’intérêts pourtant prescrits. Or, si le créancier a effectivement dix ans pour recouvrer les sommes dues au titre du capital emprunté à compter du jugement de condamnation du consommateur, il doit réagir plus promptement pour la dette d’intérêts et n’a que deux ans pour le faire.

La dette d’intérêts à l’issue du jugement

On sait que les sommes dues en vertu d’un contrat de prêt constituent par nature une créance dite périodique.

C’est-à-dire que le capital se rembourse en autant d’échéances mensuelles que nécessaire et qu’à ce premier poste s’ajoute un second poste : celui des intérêts mensuels (sur la composition de l’échéance de prêt et sur l’intérêt que le prêteur retire du prêt, voir notre série d’articles : Qu’est-ce que le capital restant dû ?)

Or, lorsque l’emprunteur est condamné par décision de justice au remboursement du prêt, l’on pourrait imaginer que la décision fige le temps et le quantum de la créance.

C’est vrai pour le capital emprunté. Une fois fixé par le dispositif du jugement, il ne bougera plus effectivement.

Mais les intérêts du prêt, qui deviennent des intérêts de retard, continuent à courir aussi longtemps que la totalité de la dette n’est pas remboursée. Ainsi, même si leur principe est fixé par le jugement, leur montant a vocation à augmenter à mesure que le délai de remboursement croît.

Les décomptes communiqués par les huissiers saisissants donnent à penser que ce poste de la créance peut augmenter sans limite de temps, or, il n’en est rien.

Il s‘agit alors de savoir s‘il se prescrit de la même manière que le jugement dont il résulte ou s’il suit un régime distinct.

Une dette soumise à la prescription biennale

La semaine précédente, nous avons vu que l’exécution d’un jugement se prescrivait depuis la réforme de 2008 par dix ans, avec toutes les nuances qui s’imposent sur la question (voir notre article : La prescription de l’exécution du jugement).

Ce n’est toutefois pas le délai de prescription du titre exécutoire que la Cour de cassation a choisi de retenir pour les sommes qui ne sont pas encore dues à la date du jugement. En effet, dans son avis du 4 juillet 2016 (16-70.004), la Cour a tout d’abord indiqué que « le délai d’exécution d’un titre exécutoire, prévu à l’article L. 111-4 du code des procédures civiles d’exécution, n’est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre exécutoire. ».

Elle a ensuite précisé, s’agissant des prêts à la consommation, qu’« il y a lieu de considérer que les créances périodiques nées d’une créance en principal fixée par un titre exécutoire, en raison de la fourniture d’un bien ou d’un service par un professionnel à un consommateur, sont soumises au délai de prescription prévu à l’article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance. »

Le créancier n’a donc pas dix ans pour vous réclamer les intérêts de retard et il n’a pas non plus cinq ans, mais deux ans seulement.

Il est par conséquent totalement abusif de réclamer des intérêts qui sont en réalité prescrits, et c’est d’autant plus grave qu’en pareil cas, le créancier affecte les sommes éventuellement versées par l’emprunteur au remboursement des intérêts alors que ce dernier pourrait rembourser le capital, et réduire plus rapidement le montant de sa dette.

Dans l’exemple ci-contre, on remarque une ligne qui s’intitule « Prescription quinquennale », qui vient manifestement en déduction de la créance, puisque le total dû passe de 7.174, 04 euros à 3.243, 45 euros, mais à l’évidence, l’huissier ou son mandant n’a pas appliqué le bon délai de prescription :

En somme, si vous apercevez dans le décompte de votre procès-verbal de saisie cette ligne intitulée « Prescription quinquennale », prenez le réflexe de venir nous consulter, nous obtenons régulièrement des dommages et intérêts pour nos clients qui sont victimes d’un abus.

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