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Conflits entre l’affactureur et les tiers : analyse des solutions juridiques

Table des matières

L’affacturage génère des conflits de droits entre l’affactureur et divers tiers. Ces situations opposent des prétentions sur les mêmes créances ou leurs produits. La résolution de ces conflits dépend de principes juridiques précis et d’une jurisprudence nuancée.

Conflits avec d’autres créanciers

Priorité chronologique entre créanciers

Le conflit entre l’affactureur et un autre créancier se résout par la règle « prior tempore, potior jure ». Le premier transfert valide l’emporte.

En cas de double mobilisation de créance, la jurisprudence compare les dates :

  • Pour deux subrogations : dates des paiements subrogatoires
  • Pour subrogation et cession Dailly : date de la subrogation contre date du bordereau
  • Pour cession et saisie : date de la notification contre date de la saisie-attribution

La Cour de cassation a confirmé ce principe dans plusieurs arrêts majeurs (19 mai 1992, 3 janvier 1996). Aucune priorité n’existe entre techniques de mobilisation.

Opposabilité de la cession aux créanciers saisissants

L’affactureur prime sur le créancier saisissant si son droit est antérieur. Cette règle s’applique même contre l’administration fiscale. Un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 14 avril 1975 a confirmé la supériorité des droits de l’affactureur face à des avis à tiers détenteurs postérieurs à la subrogation.

La saisie reste possible avant transfert. Aucune clause de globalité ne peut bloquer une saisie sur créances futures non encore transmises.

Pour plus de précisions sur les mécanismes de transfert qui fondent cette priorité, consultez notre analyse technique des mécanismes juridiques de l’affacturage.

Cas particulier du conflit avec les établissements bancaires

Ce conflit survient souvent quand une banque mobilise les mêmes créances que l’affactureur.

Plusieurs configurations existent :

  • Cession Dailly contre subrogation
  • Escompte d’effets contre subrogation
  • Nantissement contre subrogation

La date du transfert reste déterminante. Pour les effets de commerce, la propriété de la provision se transfère à l’échéance ou à l’acceptation. Ces dates servent de référence pour déterminer la priorité.

Cas spécifique du conflit avec le sous-traitant

Protection du sous-traitant par la loi du 31 décembre 1975

La loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 crée une protection forte du sous-traitant. Son article 13-1 limite la cession des créances issues d’un marché avec le maître d’ouvrage.

L’entrepreneur principal ne peut céder que la part correspondant aux travaux qu’il réalise personnellement. La jurisprudence applique strictement cette règle.

Dans un arrêt fondamental du 22 novembre 1988, la Cour de cassation a donné priorité au sous-traitant sur l’affactureur. Cette solution s’applique indépendamment des dates respectives de la subrogation et du sous-traité.

Solutions pratiques face au conflit avec un sous-traitant

L’affactureur dispose de quelques parades limitées :

  • Exiger que l’adhérent fournisse caution bancaire à ses sous-traitants
  • Identifier préalablement la part sous-traitée des marchés
  • Utiliser la lettre de change qui, paradoxalement, prime sur le sous-traitant

La fragilité de la position de l’affactureur justifie une prudence particulière. Notre guide complet sur l’affacturage approfondit ces questions cruciales.

Conflit avec le revendiquant en clause de réserve de propriété

Mécanisme de la revendication du prix de revente

L’article L. 624-18 du Code de commerce permet au vendeur initial avec réserve de propriété de revendiquer le prix de revente. Cette situation oppose le vendeur initial à l’affactureur qui a financé la créance du prix de revente.

La difficulté naît d’une chaîne de transactions :

  1. Vente initiale avec réserve de propriété
  2. Revente par l’acheteur (adhérent de l’affactureur)
  3. Transmission de la créance du prix à l’affactureur
  4. Procédure collective de l’adhérent

Priorité du vendeur initial sur l’affactureur

La jurisprudence accorde priorité au revendiquant sur l’affactureur. L’affactureur n’a pu recevoir que des droits précaires sur cette créance.

La Cour de cassation a établi ce principe dans un arrêt du 20 juin 1989, puis l’a appliqué spécifiquement à l’affactureur dans un arrêt du 27 juin 1989.

Cette solution s’explique par la logique de la subrogation. L’affactureur agit aux lieu et place du revendeur subrogeant, lequel s’efface devant la revendication du vendeur initial.

Limite : paiement déjà effectué

La priorité du vendeur initial connaît une limite importante : l’article L. 624-18 n’autorise la revendication que si le prix n’a pas été « payé, ni réglé en valeur, ni compensé en compte courant » à la date d’ouverture de la procédure.

Si le sous-acquéreur s’est déjà libéré entre les mains de l’affactureur avant l’ouverture de la procédure, le vendeur initial ne peut plus revendiquer. La Cour de cassation l’a confirmé dans un arrêt du 11 décembre 1990.

Pour comprendre comment ces situations interagissent avec le droit des procédures collectives, consultez notre article sur l’affacturage face aux procédures collectives.

Stratégies de protection pour l’affactureur

L’affactureur peut se protéger par certaines mesures :

  • Identifier les biens vendus sous réserve de propriété
  • Accélérer le recouvrement des créances à risque
  • Exiger des garanties supplémentaires de l’adhérent
  • Renforcer l’analyse contractuelle préalable

Ces conflits soulèvent aussi des questions d’opposabilité des exceptions qui méritent une attention particulière.

Conclusion

Les conflits entre l’affactureur et les tiers illustrent la tension entre efficacité du financement et protection des droits légitimes des tiers. La résolution de ces conflits repose sur des principes clairs mais techniques. Pour protéger vos droits dans ces situations complexes, notre cabinet d’avocats experts en affacturage vous propose un accompagnement juridique personnalisé.

Sources

  • Code de commerce, article L. 624-18
  • Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
  • Code monétaire et financier, articles L. 313-23 à L. 313-35
  • Cour de cassation, chambre commerciale, 22 novembre 1988 (sous-traitance)
  • Cour de cassation, chambre commerciale, 20 juin 1989 et 27 juin 1989 (réserve de propriété)

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